"Être écrivaine me suffirait ; mais je suis aussi écrivaine francophone. Comme Marcel Proust et Boualem Sansal. La francophonie est un concept exclusif dans le monde. Voyez : l'anglophonie n'existe pas. Les Anglo-Saxons se gardent de brandir la promesse d'une adhésion à une communauté linguistique et culturelle. [...] Au nom de la littérature et de l'identité française, autorisera-t-on un jour des adjoints de mairie à censurer les manuscrits des écrivains et à leur imposer de ne pas écrire des phrases de plus de 50 signes, d'asphyxier les mots en les privant d'r ou d'expulser de leur lexique les termes d'origine provençale, comme frousse ; espagnole, comme bizarre ; néerlandaise, comme varlope ?"
1.5 étoiles. elle sait écrire des jolies phrases mais quelques fâcheuses généralisations abusives sur la culture et langue vietnamiennes me sont regrettables.
Quelques (très rares, hein) mots "difficiles" semblent arrachés du dictionnaire et collés sur la page blanche pour faire joli. (Ex: grands-oncles et grands-tantes matrilinéaires ou patrilinéaires => l'autrice voulait surement dire pater/maternel(le)s).
Quelques fausses infos sur la langue vietnamienne me dérangent (Ex: En vietnamien, le mot xuyên tac signifie doublement «sculpter» et «induire en erreur» => Non, xuyên tạc veut dire diffamation/diffamer/calomnie, mais tạc en un mot veut dire sculpter).
La posture de l'autrice se revendiquant du mot "sauvage (mọi en vietnamien)" me semble factice, fake-ass, irritante, surtout venant d'une bourgeoise du pôle culturel de la classe dominante. (Ex: "Je suis consanguine des sauvages et des étrangers sur tous les sols piétinés et n’échangerais ma condition contre aucune autre" => mais de quelle condition parle-ton ? Victime de racisme d'état ou la simple identité d'expatriée ? Condition de la classe exploitée ou celle d'une dominante (racisée certes mais dominante quand même) ?).
Les propos de l'autrice sur la francophonie ou sur le fait d'être écrivain racisé francophone me semblent pertinents (la hiérarchie : francophonie = France + autres. Autres = francophones du Nord + autres^2) mais comme elle apporte peu de nouveau, je suis laissée sur ma faim... Malgré le titre, le livret parle assez peu de la francophonie mais plus de l'autrice, sa conception de l'écriture en tant que polyglotte (elle parle 6 langues), la langue et la culture vietnamienne,... Ça se voit qu'elle sait écrire, pourtant.