Technoféminisme: Comment le numérique aggrave les inégalités

by Mathilde Saliou

« Règle 30 : il n’y a pas de filles sur Internet. » Cet adage qui circule sur certains forums depuis le début des années 2000 illustre l’accueil réservé aux femmes en ligne. Le monde numérique tisse nos vies à tous et pourtant, il a un problème avec la diversité : il l'oublie et l'agresse, jusqu’à menacer la démocratie. En analysant les ressorts de la haine en ligne, en dévoilant le sexisme et le racisme qui président au fonctionnement de l’industrie et en proposant une contre-histoire du numérique, ce sont les racines et les effets concrets de cette marginalisation que décortique méthodiquement Technoféminisme.
On y observe des communautés masculinistes, auxquels les géants numériques ont permis de se rassembler sous couvert de promotion de la liberté d’expression. Leurs adeptes, se proclamant parfois « célibataires involontaires », multiplient les actions violentes et font toujours plus de victimes – harcèlement, divulgation d’informations personnelles et d’images intimes, jusqu'au meurtre. Leurs idées excluantes les transforment en relais des extrêmes-droites qui fleurissent un peu partout dans le monde.
On y croise la route de l’auteure du premier programme informatique, aussi, Ada Lovelace, brillante mathématicienne et fille de Lord Byron. D’Hedy Lamarr, qui a passé plus de temps à inventer toutes sortes d’objets qu’à jouer devant les caméras. Ou de Katherine Johnson, dont le talent repoussa les limites imposées par la ségrégation au sein de la NASA. On y rencontre, encore, des chercheuses et des activistes à l’œuvre pour faire évoluer nos mondes numériques à mesure qu’ils s’étendent, des premiers espaces connectés jusqu’au champ de l’intelligence artificielle.
Dans cet essai-enquête unique en son genre, Mathilde Saliou explique les dessous d’un monde fait par et pour des hommes : les effets discriminants de nombre d’algorithmes sur la société, le financement biaisé de la tech par l’entre-soi masculin du capital-risque, la façon dont le consentement de chacun est sans cesse forcé par les géants du Net pour tirer profit de nos données... Interviewant universitaires, ingénieures, activistes, précurseuses, elle dégage aussi des pistes de résistances à l’architecture discriminatoire du numérique, des manières de prendre le pouvoir pour dessiner des futurs technoféministes.

Genres: Feminism, Nonfiction, France

284 pages, Kindle Edition

Published February 15, 2023

Reviews

[charlie medusa · Rating 5 out of 5]

vraiment vraiment si chouette !!! ça m'a fait beaucoup rire la façon dont l'autrice dit "pas tous les hommes hein vous inquiétez pas :)" page 15 pour calmer les profanes puis procède lentement tout au long du livre à dire "les hommes sont poubelle" as she should

j'ai particulièrement apprécié la première moitié de l'essai, qui s'attarde davantage sur l'histoire de la création et de l'essor de l'informatique et la place que les femmes y ont occupée, ainsi que l'histoire du cyberharcèlement, comment tout ça est lié, la façon dont l'industrie de l'informatique s'est structurée autour de l'exclusion des femmes et d'absolument toutes les minorités sociales possibles (et c'est ça qui est cool d'ailleurs, le livre ne parle pas que de sexisme mais aussi de bcp bcp d'autres formes d'oppression, merci Mathilde), bref, du bon concret comme on aime et ça c'était vraiment passionnant
moins à fond dans la seconde moitié qui est plus partie dans un délire en mode l'algorithme façonne nos regards etc. etc. parce que j'ai déjà un peu trop lu sur le sujet et que c'était moins neuf et plus abstrait, but you know, it was still excellent writing, excellent research, excellent points, bravo pour tout ça c'était super et c'est d'autant plus rare que peu d'essais féministes arrivent à tirer leur épingle du jeu en proposant un contenu à la fois un petit peu frais et pas surchargé de faux mots intelligents surchargés de syllabes pour dissimuler leur absence de pertinence

[Clémence · Rating 5 out of 5]

Le sous-titre du livre "comment le numérique aggrave les inégalités" est déjà assez explicatif sur son contenu. L'autrice y aborde différentes thématiques allant de la création des ordinateurs à la conquête spatiale, où la participation des femmes a été complètement minimisée (si ce sont des femmes qui l'ont fait, et qu'elles ont été si peu payées, alors ce n'était certainement pas si important au fonctionnement final du produit et/ou à l'avancée des recherches) voire complètement effacées de l'histoire. Elle aborde également avec beaucoup de justesse la thématique du harcèlement en ligne, les inégalités salariales dans les domaines informatiques, et encore bien d'autres sujets.

Ce livre était vraiment super intéressant. Il faut s'accrocher par moments (je ne suis pas hyper calée dans le domaine informatique), mais c'est une lecture qui m'a beaucoup appris, et je ne peux que vous le conseiller !

[Lovate · Rating 5 out of 5]

C'est l'essai qu'il fallait pour toutes les personnes qui avaient (ou non) vu l'expo "Computer Grrrls" (quel bangerrr) et qui avaient envie de creuser les liens entre le numérique + tout ce qui lui est lié, avec les questions sur le sexisme et l'implication des femmes sur ces sujets. Pas grand chose d'autre à dire sinon que c'était vraiment trop bien, un travail de qualité et richement fourni (pas toujours évident de s’immerger dans le milieu qui a ses usages, son jargon, etc, mais des faits ponctuels hyper intéressants ; ce qui est notamment le genre de chose vraiment agréable et à souligner dans un essai), une pluralité de sujets très bien couverts, des portraits de personnes badass qui sont devenues mes idoles (pour ce qui est de la partie chronologique de l'essai). Tout était intéressant, les algo biaisés qui perpétuent un langage non-inclusif juste par manque de représentation, le cyberharcèlement et son organisation tentaculaire et pernicieuse, l'énorme pouvoir du code, l'historiographie même de la prise du pouvoir du numérique par les hommes (rien de neuf sous le soleil misogyne), milieu plus féminin à l'époque, la création de mythes sur des pseudos-génies qui se cassaient le crâne dans leur garage miteux, enlevant alors tout crédit au taf phénoménal qu'avait pu accomplir des femmes/personnes brillantes avant ça. Breeef, le numérique est un domaine si vaste et qui abrite tellement de micro-univers qui ne sont jamais à l'abri de reproduire un schéma violent et discriminant ; mais aussi un lieu de ressources sororale qui peut être très puissant. Puis la couv <3

[Solène · Rating 5 out of 5]

Un super livre, très documenté, pédagogique et instructif sur les inégalités amplifiées par le numérique et la fausse "neutralité" des technologies que l'on utilise tous les jours. Ouvre aussi des voies alternatives et des pistes de solutions. Salutaire !

[Marine McCllgn · Rating 5 out of 5]

Passionnant, un livre d'utilité public ! On y apprend de nombreuses choses sur l'histoire du numérique, le fonctionnement des algorithmes et sur notre société en général. Avec le prisme du féminisme mais pas uniquement, avec une écriture précise et juste, ce livre m'a beaucoup plu et je le recommande.

[Hypathie · Rating 4 out of 5]

Au début de l'ère informatique, les femmes, nombreuses dans l'aventure, faisaient les calculs fastidieux tandis que les hommes se gardaient le câblage et vissaient les boulons, selon la règle établie que les boulots assis, à base de crayon papier, ressemblant à ceux des secrétaires comptables et dactylos, étaient réservés aux femmes. Dans la première partie de l'ouvrage, Mathilde Saliou rappelle l'histoire chronologique des calculatrices, généralement mathématiciennes bosseuses et à fulgurance, d'Adélaïde Lovelace ou Hedy Lamarr, à nos créatrices actuelles de startups, en passant par Grace Hopper, inventrice de l'interface femme-machine comme on devrait dire (au contraire de ma première SSII dont les ingénieurs m'ont appris sans faiblir à dire "homme-machine"), puisque c'est elle a inventé le premier langage de compilation, le Cobol, permettant de programmer des machines en utilisant des commandes proches du langage humain, et langage intéressant par sa portabilité entre systèmes. Puis à un moment tout bascule : les machines étant devenues opérables et fonctionnelles, donc dépourvues du charme pionnier, les hommes arrivent à la programmation et, selon une méthode éprouvée, s'emparent des commandes, renvoient les femmes, et effacent les pionnières en arrangeant l'histoire à leur sauce, à base de "mythes du garage où tout à commencé", et en faisant de l'endroit une "zone de prédation" : si quelques obstinées s'y aventurent, c'est à leurs risques et périls. Elles doivent en plus, forcément, en adopter tous les codes virils, id est maltraitants.
Pendant le même temps, les débuts de l'Internet libertaire des pionniers se transforment insidieusement en zone publicitaire et marchande de siphonnage de données sous la houlette des gars "du garage" buveurs de soda et mangeurs de pizzas à clavier gras, tels les fondateurs de Facebook, Google, Microsoft, Amazon and Co, leveurs de fonds et bientôt milliardaires imposant leurs standards, enfermant les utilisateurs/trices dans des "rabbit holes", faisant leur beurre avec nos métadonnées extraites à coup d'IA, de deep et machine learning, imposant leurs systèmes propriétaires, à l'opposé des aspirations libertaires et coopérantes des débuts. En outre, la dématérialisation qu'on tente de nous imposer est une idéologie, appuyée par les "nudges" ces coups de pouce en forme de 'par défaut' qui vous conduisent insidieusement à consentir sans que vous en ayez conscience (les gros boutons rouges et verts de la loi RGPD par exemple, la case cochée par défaut échappant à votre vigilance du service des impôts vous faisant adhérer à la dématérialisation en créant un compte) ; il n'y a pas plus de dématérialisation que de beurre en broche, le papier étant remplacé par des serveurs gros consommateurs d'électricité ; la pseudo-automatisation qui rend les salariés obsolètes est en fait soutenue, permise par les petites mains du tiers-monde, les "forçats du clic" de l'économie informelle ou du bénévolat. La dématérialisation est l'obsolescence du salariat mais l'avènement d'une nouvelle forme d'esclavage. L'apprentissage machine est tissé de tous les préjugés humains aka masculins, puisque ce sont les hommes qui codent. Et le code c'est le pouvoir : il gère vos allocations familiales et chômage, il oriente en France les choix professionnels des lycéens, il suit le déplacement de vos colis en ligne et répond à vos réclamations, calcule vos impôts, entre autres. Attention donc, à force de laisser le pouvoir dans les mains masculines des prétendus petits génies no life, hackeurs de l'informatique, nous sommes en terrain dangereux. Il est temps que les généralistes, les imaginatifs, les personnes à capital culturel dont font en majeure partie les femmes, les intéressées par les sciences humaines et même par la philosophie, s'emparent rapidement du sujet. C'est la recommandation impérative de cet ouvrage. Sinon, il nous restera nos yeux pour pleurer. A LIRE.

[Marc Augier · Rating 5 out of 5]

Un ouvrage très intéressant et bien documenté que j’ai apprécié de lire en détails jusqu’au bout.
Je suis pourtant le contraire de la cible car homme, blanc et… vieux, quoique cette dernière caractéristique me donne peut être accès à une forme de minorité.
Il nous faire prendre conscience de problèmes qui vont bien au delà de la question féministe et des minorités, comment vivre en société avec le numérique.

[Les paravers de Millina · Rating 5 out of 5]

Hey les amis ! Si vous me suivez depuis un moment, vous savez que je ne suis pas très fan des essais. D'habitude, je suis plutôt réticente à ce genre d'exercice. Quand je lis un essai, j'ai toujours l'impression qu'on essaie de me donner un cours magistral et de me dire ce que je dois penser. Ça alourdit le texte et ça me donne l'impression d'être passif. Mais avec l'essai de Mathilde Saliou, c'est différent. Elle écrit de courts paragraphes percutants, elle souligne ce qui la choque, elle creuse le sujet sans imposer son avis. C'est un peu comme lire un article de journal bien construit. J'ai vraiment accroché à sa narration. Même si ça m'a pris du temps pour le lire, je voulais vraiment m'imprégner de la thématique, comprendre et m'approprier les informations. Je préfère prendre mon temps pour assimiler les idées plutôt que de simplement lire et passer à autre chose. Mathilde Saliou explore le technoféminisme à travers l'histoire, en remontant jusqu'à l'invention des ordinateurs. Elle met en lumière les inégalités de genre dans le cyberespace et les mouvements masculinistes qui en découlent. C'est vraiment intéressant et ça m'a donné envie de rendre Internet plus sûr pour tout le monde. Je recommande cet essai à tous ceux qui sont curieux d'en apprendre davantage sur ces sujets fascinants. Si vous êtes tentés, foncez ! 📚💡 #lecture #essai #technoféminisme #MathildeSaliou #internet #égalitédesgenres
Mon avis détaillé :
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