Fin des sociétés paysannes, cuisines équipées, bétonisation des terres arables, effacement des savoir-faire et cosmogonies autochtones, ignorance des rythmes du monde vivant… Ces phénomènes divers que l’on apprend aujourd’hui à déplorer sont bel et bien liés, nous disent depuis un demi-siècle des théoriciennes écoféministes, critiques de la modernité industrielle. C’est à leurs pensées, méconnues en France, ainsi qu’aux leçons existentielles et politiques qu’il convient d’en tirer, qu’est consacré cet ouvrage. L’auteure explore les alternatives écologiques et anticapitalistes contemporaines pour démontrer que la vie quotidienne est un terrain politique fondateur. Sans politique du quotidien, sans reconstruction collective et radicale de notre subsistance, il n’y aura pas de société égalitaire ni écologique. Contrairement aux idées reçues, ce n’est pas la généralisation du salariat qui a permis d’accéder à la société de consommation et au confort appareillé, mais le colonialisme et le travail domestique féminin. Une autre organisation politique de la vie et des rapports à la nature est possible. À condition d’être redistribué, ancré dans une communauté en prise avec un biotope et des usages, le travail de subsistance ainsi repensé devient un facteur d’émancipation. La fabrique du quotidien apparaît alors pour ce qu’elle est : un enjeu révolutionnaire.
Selon Pruvost , le capital se reproduit en détruisant les sociétés vernaculaires et vicinales autant autochtones que paysannes, une accumulation primitive constante et permanente prédatrice de l’autonomie en éradiquant les savoirs-faires ancestraux pour le relayer à l’économie de marché et au monde de la marchandise. Reprenant l’argumentaire des féministes de la subsistance, des anarchistes, des marxistes autonomiste, des écologistes et des promoteurs de la décroissance , l’autrice nous invite à aller individuellement et collectivement vers le chemin politique de la reprise de notre vie quotidienne et de notre subsistance, car selon la maxime féministe bien connu : le privé est politique. En passant par Henri Lefebvre, Émile Pouget , Maria Mies et plusieurs autres elle dresse un argumentaire magistral en faveur de ce quotidien politique, d’une révolution journalière par l’action directe constante de la subsistance tout en gardant le lien intrinsèque avec les mouvements sociaux de masse pour une rupture avec l’état, le patriarcat,le capitalisme et le néolibéralisme, l’union des moyens et de la fin. Un des meilleurs livre que j’ai lu depuis belle lurette !! Vive la subsistance !! À lire conjointement avec le livre d’Aurélien Berlan : terre et liberté.
Après le livre de Futures - Comment le féminisme peut sauver le monde de Lauren Bastide, le livre de cette sociologue est une nouvelle grande gifle de pensée. A lire absolument pour faire le poisson volant !