" De nombreuses personnes creusaient des trous dans le cimetière. En ville, la mort régnait, il fallait de nombreux trous. " Lituanie, 1941. Vincentas, photographe, conclut un pacte morbide avec un officier SS : en échange de sa sécurité et de celle de son amante juive, Judita, il photographiera les massacres de Juifs dans les villages et les forêts de sa patrie occupée. Vincentas, habitué à être de l'autre côté de l'objectif, à être distancé de la réalité par la pellicule, devient malgré lui le témoin d'une histoire irrévocable " la guerre arrachera les masques de nos visages. " Témoin de l'assassinat massif des juifs, il se transforme en observateur qui ne peut rien changer ni aider personne.
À travers la métaphore de la photographie, Sigitas Parulskis met à nu la passivité et la complicité de ses compatriotes dans le chapitre le plus sombre de l'histoire moderne de la Lituanie. Un roman très sombre et engagé, mettant en lumière les crimes perpétués durant la Seconde Guerre mondiale, que l'on pourrait rapprocher du travail de Jonathan Littel version balte.
" Par cet art de restituer l'inhumanité comme une inflexion de l'humanité, Sigitas Parulskis accomplit avec une puissance explosive son désir initial : réveiller les consciences, au miroir du crime. "
Florence Georgesco,Le Monde
" Un roman noir dont on ne ressort pas indemne tant il est empreint de violence, à l'image de son auteur, Sigitas Parulskis. "
Alexandra Schwartzbrod,Libération
- Prix National de la Culture et de l'Art lituanien
Sigitas Parulskis is a modern Lithuanian poet, essayist, playwright and reviewer. In 1990 he graduated from Vilnius University, Lithuanian language and literature. He was working in notable journals and newspapers (Literatūra ir menas, Lietuvos aidas, Lietuvos rytas, Šiaurės Atėnai). Today he gives lectures of creative writing for Vilnius University students, writes articles to various newspapers, journals and internet websites.
J’ai eu un peu de mal à entrer dans la petite musique de l’auteur, son imaginaire. Le premier chapitre avec les personnages qui se transforment en cochon est assez déroutant et tient du conte.
Et puis je me suis glissé aux côtés du personnage de Vincentas, photographe amateur recruté par l’Artiste (le commandant des SS en poste en Lituanie) pour tenter de capturer sur pellicule les visages au seuil de la mort.
Vincentas qui est amoureux de Judita, une femme juive mariée à Alexandras, compositeur d’opéras.
J’ai souri chaque fois que Judita apparaissait, une prune juteuse à la main.
Ce roman est celui de la Shoah par balles qui a eu lieu dans les pays du nord-est. Je n’ai donc pas échappé à quelques scènes descriptives révélant l’horreur de ces tueries.
C’est le but clairement affiché de l’auteur en fin de volume : écrire un roman sur ces faits passés sous silence dans son pays.
J’ai été étonné qu’il utilise des noms d’apôtres pour les bourreaux, des noms de disciples. Il s’en explique également : dans la conscience des Lituaniens, Jésus était bien juif. Ce qui ne les a pas empêché de laisser les juifs de leur pays se faire tuer.
La citation en épigraphe de Julian Barnes prend tout son sens : « Le plus grand patriotisme est de dire à son pays qu’il se comporte de manière déshonorable, idiote et cruelle ». M. PARULSKIS, vous êtes donc un grand patriote.
L’auteur pose la question, après Peter Brook, de savoir après combien de temps un massacre devient romantique ? Si tant est qu’il le devienne un jour, oserais-je dire.
Une lecture forte qui demande au lecteur de s’accrocher et pour entrer dans le récit et pour ne pas en sortir dégoûté par les actions humaines.
Une citation :
Montrer ce qu’est une chose dans sa vérité. La photographie se trouve toujours derrière la chose, au-dessus de la chose sans être la chose elle-même. (p.79)
L’image que je retiendrai :
Celle de Judita tenant la tête tranchée d’un rabbin sur ordre de l’Artiste.