Quais du Polar 2021 : Franck Thilliez, Michel Bussi, Nicolas Lebel, Olivier Truc, Alexandra Schwartzbrod et autres grands noms du polar jouent Devant Dieu et les hommes de Paul Colize. Le succès est total. La pièce est aujourd'hui un roman qui paraît enfin en librairie. " Le 8 août 1956 restera dans nos mémoires comme un jour qui a marqué l'histoire de notre pays d'une de ses pages les plus tragiques. "
Lorsqu'elle déjeune avec le grand patron du Soir , Katarzyna ne s'attend pas à être envoyée sur le procès de Marcinelle. En 1958, être une femme journaliste est déjà peu habituel, mais couvrir l'affaire dont tout le monde parle est absolument extraordinaire. Deux ans auparavant, l'explosion au fond de la mine de Bois du Cazier a fait plus de 250 morts ; et c'est au cœur de cette catastrophe que deux mineurs italiens auraient assassiné leur supérieur tyrannique. Une occasion rêvée pour la jeune femme de prouver son talent de reporter. Or, si elle a un lien très personnel avec cette histoire tragique, Katarzyna comprend vite qu'on ne l'a pas envoyée là par hasard...
L'auteur, le livre (320 pages, 2023) : Le belge Paul Colize (que l'on connait déjà) continue d'explorer avec finesse et intelligence le passé et l'histoire de son pays. Devant Dieu et les hommes fut d'abord une pièce de théâtre (un faux procès joué au festival Quai du polar à Lyon en 2021) mais jamais éditée. Il fallut l'insistance de ses pairs pour que Paul Colize en transcrive un roman, en y ajoutant un personnage qui sera notre guide dans le procès : une journaliste, une femme dans un monde d'hommes (nous sommes en 1958).
Le contexte : Une sombre tragédie : le 8 août 1956, une explosion et un incendie ravage la mine de Marcinelle, au Charbonnage du Bois du Cazier. Il n'y aura que quelques rescapés et plus de 260 mineurs y laisseront la vie. Il y avait une majorité d'italiens parmi ces mineurs : à cette époque, les Charbonnages belges avaient littéralement "acheté" des travailleurs à l'Italie qui peinait à se remettre de la guerre.
On aime beaucoup : ❤️ On aime la façon dont Paul Colize nous transporte en 1958 à Charleroi : sa prose toujours très visuelle rend parfaitement compte des mœurs de l'époque, du machisme ambiant, du racisme envers les italiens (avec les bars interdits aux chiens et aux macaronis), des conditions épouvantables d'exploitation des mineurs (un esclavage moderne), des circonstances du drame, ... ❤️ On se passionne pour le procès imaginé par l'auteur, aux allures de polar rythmé par de courts chapitres qui rendent la lecture addictive, ménageant le suspense alors même que pour les deux italiens accusés, le verdict semble plié d'avance. ❤️ On apprécie la place faite aux femmes dans ce récit. Des femmes qui n'avaient pas la vie bien facile à cette époque : qu'elles fuient les armées en guerre, qu'elles essaient de tenir leur foyer aux côtés de leur mineur de mari ou qu'elles tentent de se faire une place dans la rédaction d'un grand journal.
L'intrigue : Plutôt que de retracer le long et fastidieux procès de l'accident, Paul Colize imagine un autre procès, celui de deux rescapés, deux mineurs italiens, accusés d'avoir profité du terrible accident pour assassiner leur Kapo, leur porion, un salopard notoire. Notre guide au tribunal sera une jeune journaliste d'origine polonaise (comme l'auteur) dont les parents ont fuit les armées russes en 1944. Notre guide journaliste est encore tourmentée par de sombres images de son passé (ses parents polonais ont fui les armées russes) : un traumatisme qui va bientôt entrer en résonnance avec le drame du Bois de Cazier. Pour celles et ceux qui aiment les mineurs.
La catastrophe du Bois du Cazier en Belgique a eu lieu le 8 avril 1956, c'est une des catastrophes minières les plus meurtrières, 262 mineurs périssent asphyxiés seuls treize mineurs survivent. L'auteur a choisi ce drame qui a réellement existé pour construire une fiction passionnante. Le procès de Marcinelle débutera deux ans plus tard. Deux mineurs italiens rescapés sont accusés d'avoir tué leur contremaître, profitant du drame pour commettre l'irréparable. Entre en scène le personnage de Katarzyna, une jeune femme qui débute dans le journalisme, elle porte en elle un terrible secret, féministe avant l'heure. Elle couvre l’événement, c'est à travers son regard que nous allons suivre le procès. Le procès va mettre en lumière les conditions de travail extrêmement dangereuses des mineurs, à fortiori des mineurs venus de l'étranger. Le racisme, les humiliations, les retenus sur salaire, le manque de sécurité étaient quotidiens. L'action se déroule le plus souvent dans un prétoire et aurait pu prendre la forme d'une pièce de théâtre. Les plaidoiries sont bien menées et on a vraiment l'impression d'être sur les bancs du public. J'ai beaucoup aimé « l'utilisation» du dessinateur judiciaire pendant le procès pour donner au lecteur une vision animalière et caricaturale des différents intervenants. L'auteur a su créer une ambiance immersive, ses protagonistes sont bien développés on entend même l'accent italien des accusés. Au-delà du drame en lui-même, les thèmes abordés sont profonds avec une grande connaissance de la psychologie humaine et des questions sociales ou morales. Le procès que l'on aurait pu croire joué d'avance va se révéler bien plus complexe et nous réserver quelques surprises, la manifestation de la vérité est à ce prix. Un excellent roman à découvrir pour se replonger dans une autre époque entre Germinal et Douze hommes en colère. Bonne lecture.
« — Avant de savoir, on ne sait pas.... — Et quand les hommes ne savent pas, que font-ils ?... — Les plus sages avouent leur ignorance. Quelques téméraires avancent des hypothèses avec les réserves qui s'imposent. Je vous le concède. Mais que fait le plus grand nombre?... — Ils supputent, mesdames et messieurs." p 86
Marcinelle, 1958. S'ouvre le procès de 2 mineurs. Ils sont accusés d'avoir, le 8 août 1956, lors du terrible drame survenu au charbonnage du Bois du Cazier, tué un porion. Catherine Lézin est une jeune journaliste au Soir, à sa grande surprise le rédacteur en chef lui a confié la couverture du procès; Est-ce un piège? Une femme en ces années là n'est guère admise dans le monde des hommes.. Mais Katarzyna est bien décidée à relever le défi ... Je ne vous révèlerai rien de plus , il vous faut aller vous assoir dans la salle d'audience, écouter les plaidoiries, les réquisitoires, les témoins .. et ensuite seulement vous aurez le droit d'avoir un avis , vous ne supputerez plus!
Monsieur Colize merci. Devant Dieu et les hommes est venu rejoindre Back up dans mon Panthéon livresque ..
Un thriller et drame judiciaire impossible à lâcher, lu en une soirée et un jour - belle étude de caractères surtout celui d’une jeune femme journaliste confrontée au monde masculin des années 1950 - à lire absolument
Le 8 août 1956 est un jour qui restera dans la mémoire de l'histoire de la Belgique, c'est le jour de la tragédie du Bois du Cazier, 275 hommes sont descendus dans la mine le matin, seuls 13 remonteront à la surface.
C'est au départ de ce fait historique que Paul Colize imagine son intrigue. Deux mineurs italiens Donato Rinzini et Francesco Ercoli sont accusés d'avoir profité de l'occasion pour tuer leur chef, le porion Gustave Fonck. Le procès d'assises va avoir lieu en septembre 1958.
Katarzyna Leszczynska, polonaise d'origine, de son nom de plume Catherine Lézin, une des deux femmes journalistes au journal Le Soir est mandatée pour couvrir le procès. Wellens, le rédacteur en chef exécute ainsi la demande de la patronne du journal qui pense que les temps changent et que le succès de la journaliste de l'INR, Janine Lambotte n'est qu'un début, mais au fond de lui Wellens espère bien prouver le contraire.
Nous sommes en 1958 dans un monde d'Hommes, que ce soit les assesseurs, le juge, le procureur et les avocats, tout est au masculin, tout comme les autres journalistes couvrant le sujet. Katarzyna est la seule femme et les commentaires vont bon train sur son inexpérience, incompétence, sa place tout simplement mais elle n'a pas dit son dernier mot. Elle veut prouver que sa vision des choses, sa sensibilité féminine, peut apporter un autre regard sur cette affaire qui par ailleurs réveille en elle des similitudes avec son histoire.
C'est un roman de procès où les témoignages se suivent de manière très intéressante, on comprend bien le contexte, le travail dans les mines que personne ne voulait chez nous, les conditions difficiles pour la majorité des italiens à qui on avait promis monts et merveilles, les difficultés d'intégration, surnommés souvent "macaronis". On comprend les conditions de travail, la vie dans les corons, l'éloignement de la famille mais aussi le détail de la catastrophe, la situation économique et la crise du logement.
Les rouages du procès sont bien décrits et à travers Katarzyna on comprend que la condition de la femme était plus que compliquée, le machisme étant un art de vivre à l'époque.
L'écriture est dynamique, prenante. Le rythme est donné par les courts chapitres qui rendent la lecture addictive, un peu à la manière d'un polar. J'ai pris énormément de plaisir à la lecture découvrant l'écriture de Paul Colize et me donnant envie d'en découvrir d'autres.