Parce qu'elle a laissé ses amies organiser leur escapade sororale durant la Toussaint, Clotilde se retrouve dans une ville qu'elle avait rayée de la carte. Ici, il y a vingt ans, elle a vécu avec Monsieur, un homme qui fit d'elle sa Madame sous prétexte de lui faire du bien. Les demoiselles en détresse qui guettent le chevalier blanc omettent d'être lucides, croire en l'existence de l'âme sœur fait oublier que, sous son heaume, le chevalier peut être un loup.
De son assujettissement d'alors, Clotilde a encore honte, et elle a beaucoup de mal à se découdre la bouche pour reconnaître les faits. La preuve : ni Adélaïde, ni Judith, ni Bérengère, ni Hermeline ne connaissent cette histoire, et aucune ne se doute qu'à deux rues de leur location, dans son immense maison, habite toujours Monsieur. Clotilde se demande si libérer sa parole pourrait aider la honte à enfin changer de camp.
Chloé Delaume, de son vrai nom Nathalie Dalain, née à Versailles le 10 mars 1973, est une écrivaine et éditrice française. Elle est également performeuse, musicienne, chanteuse, de manière plus anecdotique. Son œuvre littéraire, pour l'essentiel autobiographique, est centrée sur la pratique de la littérature expérimentale et la problématique de l'autofiction.
À toutes les personnes dont le silence et la honte brûlent les lèvres. Ce texte porte haut et fort nos voix atrophiées, et peint avec une terrible justesse non pas seulement les faits de violences sexuelles, mais bien les conséquences que celles-ci ont sur la perception de nous-mêmes et sur les problèmes de santé mentale et physique qui en découlent. Mille mercis à Chloé Delaume de nous faire sentir légitimes et acteurices de nos corps, de nos émotions, de nous libérer des mains de sang qui agrippent nos chairs..
Dans Ils appellent ça l’amour, l’autrice nous livre un récit poignant à travers le personnage de Clotilde, dont l’évolution entre ses 30 ans et ses 50 ans est frappante. Autrefois snob et attachée à des idéaux romantiques, Clotilde est désormais confrontée aux réalités amères de ses choix passés. L’écriture, à la fois poétique et vitriolique, oscille entre sarcasme et lucidité crue.
Le roman déconstruit le mythe du prince charmant, un idéal auquel Clotilde a cru, piégée par sa dépendance financière et émotionnelle. L'amour apparaît ici non pas comme un refuge, mais comme une cage dorée. La réflexion philosophique sur des concepts tels que l'âme sœur, héritée de Platon, est vivement critiquée, mettant en lumière l'endoctrinement sociétal des femmes à croire en un amour salvateur et absolu.
Le personnage masculin, bien que censé avoir 50 ans, est décrit avec une lourdeur et une autorité rappelant un homme beaucoup plus âgé. Il illustre parfaitement les mécanismes d'aliénation et de contrôle dans la violence conjugale : flatteries, refus du mariage prétexté comme un gage de pureté des sentiments, infantilisation de Clotilde sous couvert d'agir "pour son bien". Le roman dévoile la manipulation derrière ces gestes anodins, souvent banalisés.
Le passé tragique de Clotilde, témoin de l’assassinat de sa mère par son père, ajoute une profondeur sombre à son rapport à la violence et à l’amour. L’autrice tisse des liens entre trauma familial et relations de couple abusives, soulignant la répétition des schémas de soumission.
À travers des clins d'œil à des œuvres précédentes comme Phallers, le roman propose une réflexion sur le consentement et la complexité des agressions sexuelles dans un cadre intime. Clotilde questionne la frontière entre se forcer et être forcée, entre amour et pouvoir, entre volonté et manipulation. Cette confusion est exacerbée par les paroles rassurantes de l’agresseur, illustrant l’ambiguïté douloureuse du consentement sous emprise.
Le roman culmine dans un crescendo d’émotions où la réappropriation de soi passe par la reconnaissance de la violence subie. Ils appellent ça l’amour est une dénonciation puissante des illusions romantiques et des stratégies insidieuses de domination masculine, une œuvre nécessaire et percutante.
Merci aux Éditions du Seuil et à La Boîte à Diffusion pour le service de presse!
À travers « Ils appellent ça l’amour », Chloé Delaume explore avec une maîtrise troublante les mécanismes de l’emprise et du silence. Clotilde, de retour dans une ville qu’elle avait fui, se confronte à un passé enfoui : celui d’une relation toxique, d’un amour qui l’a réduite au silence et à l’effacement.
Sans jamais tomber dans un voyeurisme mal placé ou jeter un regard inconfortable, le roman dépeint la violence conjugale dans ce qu’elle a de plus insidieux et destructeur. Porté par une écriture pudique mais percutante, le récit met en lumière la honte persistante des victimes et le difficile chemin vers la parole libératrice.
L’autrice donne voix à des personnages féminins d’une grande complexité : imparfaites, intelligentes, courageuses, faillibles, profondément humaines. Ce chœur de femmes, chacune à sa manière, incarne une sororité salvatrice qui donne au récit sa lumière et sa force de résistance.
Un texte marquant en cette rentrée littéraire 2025 à ne pas manquer.
La langue de Chloé Delaume est d’une imagination toujours aussi débridée ! Dans Ils appellent ça l’amour, l’écrivaine reprend son thème favori, l’emprise et la domination masculine. Elle le décortique dans ce récit où la sororité s’immisce pour apaiser et même, peut-être plus ! Le style est toujours aussi inventif et travaillé, et même drôle pour conjurer un sujet, plus que sérieux. Pourtant, ces mots n’évitent pas la description de la souffrance. Chloé Delaume dissèque le sentiment de honte qui habite toutes les femmes pour mieux aider à s’en libérer ! Écrivaine, elle combat avec les mots et il faut bien reconnaître qu’elle gagne la partie, haut la main, encore cette fois-ci ! Chronique entière et illustrée ici https://vagabondageautourdesoi.com/20...
Ils appellent ça l’amour, c’est pas une histoire pour faire rêver. Ça parle de relations mêlées, mal définies, parfois déséquilibrées. De ce qu’on accepte, de ce qu’on excuse, juste pour ne pas être seul.
C’est cru, direct, parfois inconfortable. Ça tourne un peu en rond par moments, mais ça sonne vrai. Pas de romantisme inutile ici. Juste une question qui reste ,est-ce que c’est vraiment de l’amour ou juste l’habitude de rester?
Rien ne me déprime plus que de réaliser que le roman que je suis en train de lire est de l’autofiction. Là au moins le livre ne fait pas semblant, c’est presque plus proche d’un pamphlet aux gros sabots, des citations et des références balancées là à l’emporte pièce.
Clothilde est en week end avec des amies, un week end qui va lui rappeler sa relation avec un homme il y a presque vingt ans de cela et dont elle n’a jamais parlé.
La violence monte crescendo dans ce récit. Au départ on est dans un paternalisme assez banal (monsieur est plus âgé et mieux installée et souhaite surtout son bien, dit il), et puis les choses dérapent peu à peu jusqu’au récit de ce qui est un viol conjugal et sur lequel la narratrice n’avait pas mis de mot pour le décrire.
Plus qu’un livre sur la violence c’est un livre sur la parole et sur la manière d’en parler. Les amies de Clothilde ne sont pas toujours à l’aise avec l’idée de regarder leur histoire avec les hommes et de tout à coup se découvrir victimes, il y a sans doute quelque chose de confortable à ne pas savoir. La honte peut aussi rendre muette, la honte d’être restée, de ne pas forcément avoir réalisé tout de suite qu’il fallait partir.
C’est une fiction mais la narratrice s’appelant Clothilde (c’est presque Chloé) et étant écrivaine je ne peux m’empêcher de me demander si c’est un roman à clef et qui est le monsieur dont on parle.
"Parce qu’elle a laissé ses amies organiser leur escapade durant ce week-end de trois jours, Clotilde se retrouve dans une ville qu’elle avait rayée de la carte. Ici, il y a vingt ans, elle a vécu avec Monsieur, un homme qui fit d’elle sa Madame sous prétexte de lui faire du bien. C'est ainsi que Clotilde se dépouilla d'elle-même, jusqu'à devenir un simple objet, mais un objet d'amour. De son assujettissement d’alors, Clotilde a encore honte, et elle a beaucoup de mal à se découdre la bouche pour reconnaître les faits. La preuve : ni Adélaïde, ni Judith, ni Bérangère, ni Hermeline ne connaissent cette histoire, et aucune ne se doute qu’à deux rues de leur location, dans son immense maison, habite toujours Monsieur. Clotilde se demande si libérer sa parole pourrait aider la honte à enfin changer de camp."
Réussir les livres à messages est périlleux. Pourtant, Chloé Delaume s’en sort plutôt bien et porté par une sororité polyphonique, ce court roman réussi à convaincre tout en restant une fiction bien torchée.
Me reste pourtant un sentiment un poil malaisant… Les coupables ne sont-ils finalement jamais réellement punis par la justice ?
Écouté lu par l'autrice. Une lecture dense qui peut heurter par son sujet autour de l'emprise et des VSS. Mais un sujet qui mérite d'être lu pour que puissent parler les personnes qui n'osent les dire. Le prisme de lecture des différentes femmes du récit est également très intéressant. Pour un public de lecteurs lectrices averti.e.s car certains chapitres peuvent chambouler ...
On trouve souvent des ouvrages décrivant les mécanismes d'emprise mais un peu moins sur l'après... Est-ce que réussir à sortir d'une relation toxique suffit pour enfin respirer à nouveau ? Peut-on aussi facilement tourner la page ? C'est à découvrir dans ce roman.
Clotilde et ses amies sont parfois un peu casse-pieds mais l’histoire est essentielle donc ça compense : c’est un récit énervé, intense, à lire d’une traite (don’t be fooled par les petits paragraphes et tournez la page)
très très déçue. j’avais adoré Pauvre Folle mais il faut se rendre à l’évidence : chloé delaume n’est pas constante dans son écriture. le fond est bon, nécessaire, intéressant, mais il est noyé dans un apitoiement agaçant sur la première moitié et des banalités féministes sur la seconde.
Une bonne claque dans ma gueule oui oui… Je recommande à TOUT LE MONDE de lire ce livre, en particulier si vous êtes un homme, ou une victime d’abus, quel qu’il soit. Attention aux triggers warnings, surtout les violences sexuelles et psychologiques.
Si la mise à nu de l'auteure me paraît encore un peu éloignée du plus simple appareil, si le processus politique des idées me paraît au-delà de mon propre canevas de penser, je dois avouer que la lecture de ce livre est digne d'intérêt afin de nourrir le lecteur ou la lectrice.
un roman avec une écriture qui relève de la poésie. un sujet trop rarement abordé - des quinquagénaires - et leurs histoires intimes. une vraie prise de position et une réflexion sur les hommes et leurs agissements, leur manipulation.