Reprise est un roman d’une écriture à la fois fragmentée et nuancée. Dix ans après avoir dénoncé son professeur de qui elle était la maîtresse alors qu’elle était encore adolescente, la narratrice devient l’amante de l’avocat ayant agi en tant que poursuivant dans cette affaire. Cette double relation crée une sorte de triangle amoureux décalé, superposé.
À partir du moment où les fantasmes se réalisent, elle plonge dans une dimension perpétuelle d’irréalité. En même temps, sa liaison avec le procureur l’oblige à habiter son corps jusqu’à l’abîmer, à déterrer chacune des pulsions qu’elle a enfouies. Et persiste la lutte qu’elle mène contre le doute, raisonnable ou imaginaire.
On y suit une femme qui, 10 ans après avoir dénoncé le professeur avec qui elle avait une relation lorsqu’elle était adolescente, devient l’amante du procureur qui était attitré au dossier..
« En vérité, c’est peut-être seulement ton âge qui m’empêche de t’aimer. Tu es trop vieux pour que je puisse souhaiter être en couple avec toi - les autres impossibilités me paraissent moins importantes. »
Difficile de sortir indemne de cette lecture..
Les limites sont transgressés. La morale et la déontologie ont laissé leur place au désir..
C’est dérangeant, cru et déstabilisant.
Les ressemblances entre le passé et le présent sont frappantes.
« Tu n’es plus le procureur que j’ai connu. Rarement, le contexte dans lequel on s’est rencontrés traverse mon esprit, aussi irréel et discordant qu’un rêve. »
J’ai eu le cœur lourd pour Elisabeth..
Son trauma l’habite. Il est perceptibles dans ses réflexions, ses gestes et ses habitudes..
« Au fil des séances, je comprends que je préserve, perfectionne, potentialise mon intelligence, mon corps - ma minceur -, mon statut social, pour l’intérêt, le désir, l’estime qu’ils me valent. »
4,5 ⭐️ J'ai adoré ! Une lecture dérangeante et intense. Les deux histoires finissent par se mêler avec subtilité, nous entraînant dans un malaise permanent. Les courts paragraphes maintiennent le suspense tout en installant une atmosphère oppressante. Une jeune maison d’édition qui s’annonce prometteuse avec des textes marquants.
On attaque Reprise, le premier roman de Florence Chadronnet, en sachant qu’il va nous confronter. C’est un récit qui joue dans les zones grises de la moralité, qui donne à la fois dans l’impudeur et dans la retenue. Deux époques sont superposées, celle où la narratrice a été «groomée» et agressée par un de ses professeurs dès ses treize ans, et celle où elle est devenue la maîtresse du procureur qui s’est occupé de sa poursuite dix ans plus tôt.
On explore l’aspect obsessif et perfectionniste de la narratrice, ses troubles alimentaires, ses efforts pour atteindre un «équilibre» qui la satisferait. Notre lecture oscille entre fascination et malaise, et il est très difficile de s’arracher du livre avant d’arriver à sa conclusion. L’écriture fragmentaire sert parfaitement le fil narratif. Pour un premier roman, c’est très maîtrisé. Ventricule gauche, la nouvelle maison d’Éric Simard, est fort bien lancée.
[Je dois déclarer en toute transparence que j’aide Éric avec ses médias sociaux, mais mon avis demeure impartial malgré tout.]
Quel grand livre! Deuxième livre chez Ventricule Gauche et un grand livre. C'est cru et parfois difficile à lire, mais c'est profond et ça frappe l'imaginaire littéraire!
Un récit percutant où deux relations toxiques s’entremêlent à travers les années. Des sujets, parfois difficiles à lire, comme les problèmes alimentaires et les idées suicidaires, sont abordés.