Milan Kundera est l’un des écrivains les plus lus au monde ; il est aussi un disparu volontaire. À force de refuser toute apparition depuis trente-sept ans, il s’est effacé du réel. Le geste de la main d’Agnès au bord de la piscine, le sourire du chien Karénine, ses personnages restent gravés dans les mémoires ; lui est devenu un écrivain fantôme. Il a posé des scellés sur sa propre existence et ce siècle d’histoires qui s’enroule autour de la sienne.
Depuis ses vingt ans, Ariane Chemin rêve de rencontrer l’auteur de La Plaisanterie. Partie sur ses traces, elle voyage d’Est en Ouest, de Prague à Rennes, de la Corse à Belle-Île-en-Mer, rencontre sa femme Věra, remonte le temps à ses côtés, croise des éditeurs et des cinéastes célèbres, une speakerine mystérieuse, des compositeurs et des pianistes assassinés, de vieux dissidents et des espions repentis, entend la poésie de Desnos et celle d’Apollinaire, toujours à la recherche de Milan Kundera. Elle lit la vie dans l’œuvre et l’œuvre dans la vie d’un romancier désormais écartelé entre deux patries – quelque part perdu dans la traduction.
Ariane Chemin tente de rapiécer les pièces du puzzle de la vie de Milan Kundera qu’il s’est efforcé d’effacer, d’inventer à partir de sa notoriété croissante des années 1980 (voire de réécrire dans la Pléiade comme personne en assurant lui même la retraduction de ses ouvrages de jeunesse).
Elle le fait avec différents coups de projecteur : son enfance, sa première vie en Tchécoslovaquie, ses engagements communistes, ses premiers succès internationaux et son exil puis sa nouvelle vie en France (il refusera d’être classé dans la catégorie des dissidents, il a émigré légalement avec la possibilité croit-il de pouvoir revenir à son gré). Elle le fait avec sa sensibilité et son ironie, avec une très légère auto-narration.
C’est réussi et surtout ça donne envie de lire du Kundera, ce qui est également un succès !
Milan Kundera se méfiait des biographies ; il se méfiait même de la manipulation possible de sa parole d'auteur, au point de refuser pratiquement toutes les interviews dans les quatre dernières décennies de son existence. Ariane Chemin est journaliste ; on comprend que ce genre de réticence lui soit une provocation, d'autant qu'elle est une grande lectrice du romancier franco-tchèque depuis sa jeunesse. Elle a donc cherché à en savoir plus, et enquêté ; cela fut la source d'une série de grands articles dans "Le Monde", repris et, me semble-t-il, retouchés dans cet ouvrage. Il ne s'agit pas d'épuiser la biographie de Milan Kundera dans une exhaustivité des détails, mais plutôt, me semble-t-il, d'approcher le caractère du grand romancier tel qu'il se manifeste dans sa carrière, et peut-être de proposer quelques clés pour la lecture de l'oeuvre (qui n'est pas ici analysée). Elle montre notamment quels espoirs politiques déçus on peut lire dans la posture d'équilibriste de Kundera, qui ne s'est jamais voulu dissident, ou alors dissident en un plus haut sens : non pas anticommuniste, mais romancier, c'est-à-dire fondamentalement non aligné, non alignable. Ariane Chemin raconte donc à la fois la vie de Milan Kundera, et ses efforts pour puiser aux meilleures sources, le Graal étant évidemment de pouvoir s'entretenir avec le maître. Ariane Chemin fut-elle Perceval ou Gauvain ? Galaad ou Bohort ? Vous le saurez en lisant son livre. C'est une belle lecture. L'édition de poche reprend la présentation de l'édition en grand format, illustrée de photographies rares et de pauses typographiques créatives, qui allongent le texte un peu mince pour un volume (certains épisodes, comme celui qui concerne le premier mariage de Kundera, sont même frustrants de brièveté). Allègre, Ariane Chemin dépasse le style journalistique pour brosser des portraits, évoquer des lieux, raconter des anecdotes. Une coquille qui insère le prénom de Mme Kundera, Véra, dans le verbe "sauvera", peut dans ce contexte passer pour un jeu de mots à la manière d'un Lacan ou d'un Barthes ; c'est dire que ce livre respire l'amour de la littérature. Un chapitre est consacré à l'affaire Dvoracek : en 2008 des archives remontées du fin fond des eaux stagnantes de la police secrète tchécoslovaque ont autorisé certains journalistes à accuser Kundera d'avoir dénoncé, du temps de sa jeunesse communiste, les déviances idéologiques d'un camarade, dont la carrière fut brisée. Je me souviens de l'épisode et des hauts cris poussés par des admirateurs qui refusaient qu'on noircisse leur idole. Je m'étais dit alors qu'ils l'avaient bien mal lu, tant son oeuvre est hantée par les catastrophes déclenchées par ses personnages en toute inconscience. Selon Ariane Chemin, la rumeur ne tient pas. J'en suis bien content. Un autre apport intéressant de ce livre est le point de vue qu'il donne sur la personnalité malicieuse et profondément indépendante de Véra Kundera, journaliste vedette à la carrière brisée par son intransigeance, veillant férocement sur son artiste de mari comme il semble avoir veillé sur elle. On devine un couple aussi haut en couleur qu'il est discret, une vie parfois presque aussi romanesque que les romans.
Il s’agit d’une enquête littéraire menée par Ariane Chemin, journaliste au Monde. Depuis ses vingt ans, elle rêve de rencontrer l’auteur qui vit de façon très discrète, n’accorde plus d’interviews, refuse toute médiatisation.
Plongeant dans les archives et s’appuyant sur des témoignages, elle retrace le parcours de Kundera, depuis ses débuts en Tchécoslovaquie jusqu’à son exil en France. Le récit dévoile des aspects méconnus de sa vie ainsi qu’une réflexion sur l’identité, l’exil et la langue. Vera, la femme de Milan, occupe une place importante grâce à ses échanges avec A. Chemin.
J’ai beaucoup aimé cette courte biographie et j’en ai appris encore au sujet de Milan Kundera. Par ailleurs, cela m’a rappelé que je n’avais pas lu mon roman favori (la plaisanterie) dans la version approuvée par l’auteur. Car il faut savoir que M. Kundera était très critique des traductions de ses œuvres et ne voulait pas que ses propos soient déformés. Face à son grand succès dans les années 80, il a choisi au contraire de se mettre en retrait.
Ce livre permet de découvrir l’homme derrière l’œuvre et de lire ou relire ses romans à la lumière de son vécu. Je me demande d’ailleurs ce que Kundera, qui a tout fait pour protéger sa vie privée, penserait de notre société actuelle où il existe une sorte de concours de celui qui fera le plus gros buzz en l’étalant.
I read the Chinese translation of this book in one sitting at JF Book. It helped me connect Kundera's characters with his personal life. It mentioned that his wife was a photographer and that the couple was constantly monitored by the Czechoslovak Communist Party’s secret police. Now I understand his inspirations for The Unbearable Lightness of Being - no wonder he portrayed the story of Tomas and Tereza (who was a photographer, and eager young observer of the political changes in her country) so vividly; he had lived through such experiences himself. It is a good casual/easy read.
Questo testo non è ancora stato tradotto in italiano, poco male, leggere in francese non è un problema ed è anzi un ottimo esercizio. Un omaggio al grande scrittore cecoslovacco naturalizzato francese, riferimenti storici e molti spunti di riflessione per meglio comprendere il mondo all'interno dei suoi romanzi.