Depuis le début des années 1980, l'apparition des quartiers gays a participé à la visibilité croissante de l'homosexualité dans les sociétés occidentales. Mais que sait-on exactement de ces espaces urbains spécifiques ? Comment sont-ils nés ? Qui s'y installe et pourquoi ? Comment les citadins les pratiquent-ils et les vivent-ils au quotidien ? Une enquête sociologique menée à Paris et Montréal permet de dépasser les clichés et les stéréotypes sur des espaces fortement médiatisés, mais finalement peu connus. En revenant sur la naissance de ces espaces, l'enquête montre comment les gays ont participé ici à la gentrification des métropoles par leur nouvelle présence commerciale, résidentielle et symbolique au centre-ville. Elle montre aussi que, loin de constituer des ghettos communautaires, ces quartiers voient cohabiter des trajectoires, des modes de vie et des identités socialement différenciées. La comparaison entre Paris et Montréal révèle enfin des convergences internationales, mais aussi des spécificités locales et nationales : les formes urbaines, les usages concrets et les représentations que suscitent les quartiers gays traduisent des rapports différenciés à la ville et à l'homosexualité selon les sociétés.
Un essai beaucoup plus proche de l'enquête sociologie que je ne l'aurais imaginé, l'essentiel de l'ouvrage tournant autour de l'enquête d'une cinquantaine de personne dans les quartiers du Village (Montréal) et du Marais (Paris) que de la construction des lieux eux-mêmes bien que le premier chapitre aborde les questions d'émergence des quartiers et un peu comment ils se sont construits à partir des commerces qui s'y sont installés, puis, dans le deuxième chapitre, un peu les questions d'image qui se forment et sont utilisés pour en faire la promotion.
Les enquêtes sont cependant vraiment fascinantes dans la préhension qu'ont les habitants du quartier, de leurs entourages, des commerces, de leurs voisins, etc. C'est une vaste enquête avec un paysage démographique assez divers (tous des hommes gais toutefois). L'auteur étant français, on sent définitivement une meilleure connaissance du Marais ou du moins une meilleure mise en avant des dynamiques qui occupent ce quartier, le Village faisant souvent office de dernier exemple ou de seul exemple dans une liste bien que la partie historique est bien maîtrisée ainsi que les lieux mentionnés.
On aborde aussi de manière intéressant la gentrification ainsi que la "gaytrification", comment elle se manifeste, à travers les différentes couches sociales, comment elle est entraînée, mais aussi comment la population étudiée la perçoit.