Dans la “maison des femmes” où l’on redresse les torts, réels ou supposés, dont épouses, sœurs, ou filles se seraient rendues coupables à l’encontre des lois patriarcales, une jeune fille cherche en vain l’amour de sa mère enfermée avec elle. Celle-ci, indifférente à son existence, ne vit plus que dans le seul espoir que vienne la délivrer celui qui l’a abandonnée. Dehors, là-bas, dans la maison du père, où sévit le “clan” familial tout-puissant, un cauchemar affreusement symétrique menace de fondre sur l’héritière sacrificielle née d’un couple tragique et fourvoyé. Sur les ravages du désamour et de l’exil intérieur auquel il condamne, une fable cruelle et incandescente qui pose en lettres de sang la nécessité de la rupture comme condition de toute survie.
Un texte bouleversant, habite par une voix, celle de la narratrice, vibrante de colère et d'émotions, de révolte face à un monde brutal et violent sans autre raison que son genre. Le roman met en scène dans sa première partie une maison habitée seulement par des femmes "emmurées" par leur mari, leur frère, le famille, accusées d'avoir causé le déshonneur. La narratrice, seule enfant née dans cette maison, explore cette réclusion et l'impossibilité qui caractérise son rapport avec une mère dont la "faute" n'est jamais dite. La jeune fille fantasme un père obscur qui viendrait la sauver, un homme sans visage et inconnu, jusqu'à ma mort de sa mère, qui signe le début de la seconde partie du roman. Après la mort de la mère (il faut remarquer avec beaucoup d'intérêt l'absence de possessifs dans le roman), la jeune fille part vers la maison de son père pour y découvrir une famille sclérosée par la haine et la jalousie, pleine d'hypocrisie et de non-dits. La question qui habite ce roman à l'écriture extrêmement poétique et brillante est celle de l'enferme ment, qu'il soit métaphorique ou réel, idéologique ou névrotique. Il s'agit d'un texte incontournable au style particulier, dont la lecture ne peut être regrettée.
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Attention, mieux vaut prévenir, ce livre n’est pas une partie de plaisir. C’est de la violence faite aux femmes ou comment en niant ce qu’est une femme on tue la liberté de tous, y compris celle des hommes. Divinement écrit, il nous retient le souffle, tend nos muscles, crispe les mâchoires, hurle à l’intérieur, génère des flots d’invectives et des salves de coups de pied, donne envie de partir loin de quitter un monde où des choses pareilles sont possibles et en même temps de les tuer tous. « Et je parle, je parle, je lui dis merci de m’avoir préparée avec dureté, avec distance, avec froideur, à ce qui désormais m’attend. Je lui dis merci de m’avoir habitué au manque, à l’insuffisance, à la rareté, mérci, car grâce à elle plus jamais je n’aurai faim, plus jamais je n’aurai soif, plus jamais je ne serai seule. Je lui dis merci pour son amour qui ne m’a jamais comblée, pour sa présence qui ne m’a jamais satisfaite, pour ses baisers qui ne m’ont jamais consolée. Merci de m’avoir appris, en m’aimant de si loin, en m’aimant si peu, en m’aimant si mal, à devenir ma propre mère, à m’aimer moi même ».
C'est l'histoire de la "maison des femmes". De ces femmes enfermées contre leur gré par les hommes de leur famille. C'est l'histoire d'une petite fille qui vit au milieu d'elles, seule enfant parmi ces femmes qui désirent être mères.
Elle vit isolée. Elle observe, impuissante, la Mère sombrer dans la folie, fuit les femmes trop envahissantes et attend désespérément le Père qui la délivrera de cette prison.
À l'origine notre père obscur est plus un ressenti d'émotions qu'une histoire à proprement parler. L'auteur décrit cet enfermement et les relations de dépendance qu'il crée à travers les yeux d'une enfant qui grandit. Presque beau, c'est surtout étouffant et dérangeant.
Une histoire de femmes opprimées qui oscille entre le touchant et l'agaçant par son écriture emphatique qui n'est pas sans rappeler une certaine Assia Djebar...