Ce livre rassemble trois textes de Hannah Arendt qui se situent dans le sillage immédiat de son ouvrage majeur, Les origines du totalitarisme (1951), qu'il contribue à éclairer et à prolonger.
Deux articles de 1953, " Compréhension et politique " et " Religion et politique ", développent une analyse plus fine du phénomène totalitaire. Le second texte récuse la représentation du communisme comme " religion séculière ". Le texte central, " La nature du totalitarisme ", est la matière des conférences que Hannah Arendt donna en 1954 à la New School for Social Research. L’auteur prolonge, d’un point de vue philosophique, les réflexions du Système totalitaire et poursuit l’analyse de la terreur et du caractère singulier du totalitarisme.
Ce livre rassemble aussi des documents préparatoires antérieurs : le " Projet de recherche sur les camps de concentration ", un synopsis des Origines du totalitarisme, et le plan de cet ouvrage tel que l’auteur le concevait en 1946.
La préface de Michelle-Irène Brudny-de Launay a pour double objet de retracer la réception originale de l’œuvre de Hannah Arendt en France et d’analyser l’importance comme les limites de la conception arendtienne du totalitarisme, en la situant au sein d’une problématique désormais générale.
Hannah Arendt (1906 – 1975) was one of the most influential political philosophers of the twentieth century. Born into a German-Jewish family, she was forced to leave Germany in 1933 and lived in Paris for the next eight years, working for a number of Jewish refugee organisations. In 1941 she immigrated to the United States and soon became part of a lively intellectual circle in New York. She held a number of academic positions at various American universities until her death in 1975. She is best known for two works that had a major impact both within and outside the academic community. The first, The Origins of Totalitarianism, published in 1951, was a study of the Nazi and Stalinist regimes that generated a wide-ranging debate on the nature and historical antecedents of the totalitarian phenomenon. The second, The Human Condition, published in 1958, was an original philosophical study that investigated the fundamental categories of the vita activa (labor, work, action). In addition to these two important works, Arendt published a number of influential essays on topics such as the nature of revolution, freedom, authority, tradition and the modern age. At the time of her death in 1975, she had completed the first two volumes of her last major philosophical work, The Life of the Mind, which examined the three fundamental faculties of the vita contemplativa (thinking, willing, judging).
Cet ouvrage rassemble trois textes-conférences d'Hannah Arendt qui complètent "Les Origines du totalitarisme".
Le premier texte "Compréhension et politique" date de 1953. Il s'agit d'un long discours sur le processus de compréhension scientifique et de l'étude des totalitarismes. Hannah Arendt dépasse le concept fourre-tout d'impérialisme pour mieux analyser la véritable nature du totalitarisme. Ce qui est inquiétant dans l'émergence du totalitarisme, selon Hannah Arendt, n'est pas la nouveauté du phénomène mais ce qu'il révèle : la destruction des catégories de pensée et de jugement. L'homme est de fait vidé de toute substance, de toute pensée et de toute liberté. Elle fait également une longue digression sur la perspective historique en rejetant l'analyse "cause à effet" : l'historien n'est pas un prophète, il se doit de dépasser la vision unilatérale du temps, un évènement présent ne peut justifier le passé. "L'historien a pour vocation de déceler la nouveauté imprévue, ainsi que toutes ses incidences sur une période donnée, et d'en élucider toute la signification. Bien que son récit possède un début et une fin , l'historien doit savoir que celui-ci intervient dans un cadre plus vaste, celui de l'histoire elle-même. Or l'Histoire est un récit qui a plusieurs commencements mais pas de fin . La fin, dans l'acceptation rigoureuse de ce terme, ne peut être que la disparition de l'homme de la surface du globe. Car ce que l'historien appelle fin - fin d'une période, d'une tradition ou de toute une civilisation - constitue un nouveau commencement pour ceux qui vivent. Toutes les prophéties évoquant la fin des temps sont erronées parce qu'elles négligent de tenir compte de ce fait simple et néanmoins essentiel" (p.49).
Le deuxième texte "La Nature du totalitarisme. Essai de compréhension" pousse les intellectuels à comprendre les fondements du totalitarisme. La philosophie est présentée comme la seule discipline capable d'apercevoir la nature du totalitarisme. Hannah Arendt fait de nombreuses distinctions de terme qui éclairent très précisément la nature du totalitarisme. Le dirigeant totalitaire n'est pas un tyran. Le totalitarisme se distingue de toute les autres formes de gouvernement : ce n'est ni un impérialisme, ni une tyrannie. Le but ultime du totalitarisme est la négation même de l'être humain, c'est pourquoi l'épuration ne s'arrête jamais, les bourreaux sont des victimes et les victimes deviennent bourreaux. Ils ne sont pas supposés vivre du tout. Dans l’État totalitaire, ni l'armée, ni l’Église, ni la bureaucratie ne sont en mesure de contrôler ou de contenir le pouvoir ; tout le pouvoir exécutif est dans les mains de la police secrète. Confondre une domination totalitaire avec la tyrannie c'est nier la nocivité du totalitarisme : dans ce nature profonde, le totalitarisme ne s'attache à aucun pays particulier. La légalité est l'essence du gouvernement constitutionnel, la terreur est celle du gouvernement totalitaire. La terreur devient l'essence d'un gouvernement lorsqu'elle est dirigée contre des victimes qui sont innocentes et que d'importantes parties de la population sont punies pour des crimes qu'elles pourraient commettre. La terreur seule n'est pas suffisante. C'est son association avec la logique pure (c'est-à-dire privé de tout contact empirique ou pratique, donc coupé de la réalité) qui est nocive. Elle fait le lien entre la logique et l'isolement. Elle permet l'effondrement du foyer familial et conduit l'esseulement. L'esseulement n'est pas la solitude. La solitude c'est être avec soi-même, de sorte que l'on supporte sa compagne puis celle des autres. Être capable de solitude, c'est se connaître soi-même et être libre, puis être capable d'être libre en compagnie des autres. C'est ce qui définit notre humanité. L'esseulement conduit au mutisme et l'absence de tout dialogue.
Le dernier texte "Religion et politique" discute du phénomène de sécularisation, de la perspective de Karl Marx et d'Engels sur la religion. Elle les distingue du communisme comme idéologie et de son rapport à la religion. Il y a quelques points intéressants mais les deux textes précédents sont plus passionnants.
Les écrits d'Hannah Arendt sont toujours aussi dense, il faut beaucoup de concentration et de silence pour suivre sa lecture, mais ils sont passionnants. Elle apporte un soin particulier à la distinction des termes et de leur portée. C'est cette clarté qui change tout et fait de ces écrits des indispensables lectures pour les hommes et les citoyens d'aujourd'hui et de demain.
Livre constitué de deux essais de la grande Hannah Arendt. Analyse rigoureuse et stimulante, toujours actuelle. Un livre qui fait réfléchir et montre un esprit brillant au travail.