Il n’est pas de règne sans scandales, semblent nous dire Henri III et sa cour et La Tour de Nesle, deux fleurons du théâtre romantique. Dans le premier, les favoris du roi Henri s’amusent autour du trône. Dans le second, la reine Marguerite de Bourgogne tue ses amants et les jette dans la Seine après des nuits de débauche dans la tour de Nesle. Prenant des libertés avec la vérité historique, Dumas manipule les dates, assombrit les décors, tire les passions vers des ténèbres sanglantes et renonce au vers pour proposer un théâtre moderne, couronné de succès à sa création. Dans ces deux drames enfin, il livre une réflexion politique sur les manifestations de la violence d’État.
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Alexandre Dumas père, born Alexandre Dumas Davy de la Pailleterie, was a towering figure of 19th-century French literature whose historical novels and adventure tales earned global renown. Best known for The Three Musketeers, The Count of Monte Cristo, and other swashbuckling epics, Dumas crafted stories filled with daring heroes, dramatic twists, and vivid historical backdrops. His works, often serialized and immensely popular with the public, helped shape the modern adventure genre and remain enduring staples of world literature. Dumas was the son of Thomas-Alexandre Dumas, a celebrated general in Revolutionary France and the highest-ranking man of African descent in a European army at the time. His father’s early death left the family in poverty, but Dumas’s upbringing was nonetheless marked by strong personal ambition and a deep admiration for his father’s achievements. He moved to Paris as a young man and began his literary career writing for the theatre, quickly rising to prominence in the Romantic movement with successful plays like Henri III et sa cour and Antony. In the 1840s, Dumas turned increasingly toward prose fiction, particularly serialized novels, which reached vast audiences through French newspapers. His collaboration with Auguste Maquet, a skilled plotter and historian, proved fruitful. While Maquet drafted outlines and conducted research, Dumas infused the narratives with flair, dialogue, and color. The result was a string of literary triumphs, including The Three Musketeers and The Count of Monte Cristo, both published in 1844. These novels exemplified Dumas’s flair for suspenseful pacing, memorable characters, and grand themes of justice, loyalty, and revenge. The D’Artagnan Romances—The Three Musketeers, Twenty Years After, and The Vicomte of Bragelonne—cemented his fame. They follow the adventures of the titular Gascon hero and his comrades Athos, Porthos, and Aramis, blending historical fact and fiction into richly imagined narratives. The Count of Monte Cristo offered a darker, more introspective tale of betrayal and retribution, with intricate plotting and a deeply philosophical core. Dumas was also active in journalism and theater. He founded the Théâtre Historique in Paris, which staged dramatizations of his own novels. A prolific and energetic writer, he is estimated to have written or co-written over 100,000 pages of fiction, plays, memoirs, travel books, and essays. He also had a strong interest in food and published a massive culinary encyclopedia, Le Grand Dictionnaire de cuisine, filled with recipes, anecdotes, and reflections on gastronomy. Despite his enormous success, Dumas was frequently plagued by financial troubles. He led a lavish lifestyle, building the ornate Château de Monte-Cristo near Paris, employing large staffs, and supporting many friends and relatives. His generosity and appetite for life often outpaced his income, leading to mounting debts. Still, his creative drive rarely waned. Dumas’s mixed-race background was a source of both pride and tension in his life. He was outspoken about his heritage and used his platform to address race and injustice. In his novel Georges, he explored issues of colonialism and identity through a Creole protagonist. Though he encountered racism, he refused to be silenced, famously replying to a racial insult by pointing to his ancestry and achievements with dignity and wit. Later in life, Dumas continued writing and traveling, spending time in Belgium, Italy, and Russia. He supported nationalist causes, particularly Italian unification, and even founded a newspaper to advocate for Giuseppe Garibaldi. Though his popularity waned somewhat in his final years, his literary legacy grew steadily. He wrote in a style that was accessible, entertaining, and emotionally reso
[décembre 2022] « Il n'est pas de règne sans scandales, semblent nous dire Henri III et sa cour et La Tour de Nesle, deux fleurons du théâtre romantique. Dans le premier, les favoris du roi Henri s'amusent autour du trône. Dans le second, la reine Marguerite de Bourgogne tue ses amants et les jette dans la Seine après des nuits de débauche dans la tour de Nesle. Prenant des libertés avec la vérité historique, Dumas manipule les dates, assombrit les décors, tire les passions vers des ténèbres sanglantes et renonce au vers pour proposer un théâtre moderne, couronné de succès à sa création. Dans ces deux drames enfin, il livre une réflexion politique sur les manifestations de la violence d'État. »
Henri III et sa cour : 4/5 Il s’agit d’un drame qui présente deux amants de la cour d’Henri III : Saint-Mégrin et la Duchesse de Guise. A travers ce drame on peut entrevoir le règne d’Henri III qui tombe peu à peu sous l’influence de sa mère Catherine de Médicis. La pièce est très intéressante, les décors sont aussi bien pensés et on peut y voir par-ci par-là des critiques de la politique contemporaine de l’œuvre.
ACTE IV SCÉNE 4 « SAINT-MÉGRIN, avec mélancolie. - Joyeuse, crois-tu qu'après notre mort, notre âme doive habiter un de ces globes brillants, sur lesquels notre vue s'est arrêtée tant de fois pendant notre vie ?
JOYEUSE. - Ces pensées ne me sont jamais venues, sur mon âme; elles sont trop tristes… Tu connais ma devise : Hilariter, joyeusement !… voilà pour ce monde... Quant à l'autre, peu m'importe ce qu'il sera, pourvu que je m'y trouve bien.
SAINT-MÉGRIN, sans l'écouter. - Crois-tu que, là, nous serons réunis aux personnes que nous avons aimées ici-bas?... Dis; crois-tu que l'éternité puisse être le bonheur ?...
JOYEUSE. - Vrai-Dieu ! tu deviens fou, Saint-Mégrin; quel diable de langage me parles-tu là ? Arrange-toi de manière que, demain, à pareille heure, M. de Guise puisse t'en donner des nouvelles sûres, et ne me demande pas cela, à moi. J'ai déjà le cou tout disloqué d'avoir regardé en l'air.
SAINT-MÉGRIN. - Tu as raison; oui, je suis un insensé...
JOYEUSE. - Voici le roi... Voyons, éloigne cet air soucieux. On dirait, sur mon ame, que ce duel t'inquiete. Est-ce que tu serais fâché?
SAINT-MEGRIN. - Moi, faché ?... Vrai-Dieu ! s'il me tue, Joyeuse, ce ne sera pas ma vie que je regretterai, ce sera de lui laisser la sienne. »
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La tour de Nesle : 5/5 incroyable ! ici on a une tragédie qui relate des évènements survenus à la Tour de Nesle avec la reine Marguerite de Bourgogne et ses deux belles-sœurs Jeanne et Blanche. A l’image d’une pièce de Shakespeare, sous la lune et durant la nuit des sombres les vengeances vont se succéder et se mêler aux histoires des personnages. L’intelligence des personnages, les pièges qu’ils mettent en place sont vraiment formidables !
ACTE IV SCÉNE 5 « BURIDAN. - Marguerite, tu oublies nos conventions?
MARGUERITE. - Je t'ai promis de te faire ministre, et j’ai tenu parole; tu m'avais promis de me laisser Gaultier; or tu exiges qu'il parte !
BURIDAN. - Nous avons dit : « À nous deux la France », et non : «A nous trois »; ce jeune homme serait en tiers dans le pouvoir et les secrets, c'est impossible!
MARGUERITE. - Cela sera pourtant.
BURIDAN. - As-tu oublié que tu étais en ma puissance?
MARGUERITE. - Oui, hier que tu n'étais que Buridan prisonnier, non aujourd'hui que tu es Lyonnet de Bournonville, premier ministre.
BURIDAN. - Comment cela ?
MARGUERITE. - Tu ne peux pas me perdre sans te perdre toi-même.
BURIDAN. - Cela m'aurait-il arrêté hier ?
MARGUERITE. - Cela t'arrêtera aujourd'hui. Hier, tu avais tout à gagner et rien à perdre que la vie... Aujourd'hui, avec la vie, tu as à perdre honneurs, rang, fortune, richesses, pouvoir... Tu tomberais de trop haut, n'est-ce pas? pour que l'espoir de me briser dans ta chute te décide à te précipiter ! Nous sommes arrivés ensemble au faîte d'une montagne escarpée et glissante; crois-moi, Buridan, soutenons-nous l'un l'autre, plutôt que de nous menacer tous deux.
BURIDAN. - Tu l'aimes donc bien ?
MARGUERITE. - Plus que ma vie.
BURIDAN. - L'amour dans le cœur de Marguerite ! j'aurais cru qu'on pouvait le presser et le tordre sans qu'il en sortît un seul sentiment humain... Tu es au-dessous de ce que j'espérais de toi. Si nous voulons, Marguerite, que rien n'arrête notre volonté où nous lui dirons d'aller, il faut que cette volonté soit assez forte pour briser sur sa route tout ce qu'elle rencontrera, sans coûter une larme à nos yeux, un regret a notre cœur... Nous sommes devenus des choses qui gouvernent, et non des créatures qui s'attendrissent. Oh ! malheur, malheur à toi, Marguerite ! je te croyais un démon, et tu n'es qu'un ange déchu.