«Nous avions beaucoup enduré et puis, un jour, nous nous sommes dit que cela ne pouvait plus durer. Nous avions trop longtemps baissé les bras. À nouveau cependant — comme nous avions pu le faire à l’occasion, comme d’autres si souvent l’avaient fait avant nous — nous élevons nos bras au-dessus de nos épaules encore fourbies par l’aliénation, courbées par la douleur, par l’injustice, par l’accablement qui régnaient jusque-là. C’est alors que nous nous relevons : nous projetons nos bras en l’air, en avant. Nous relevons la tête. Nous retrouvons la libre puissance de regarder en face. Nous ouvrons, nous rouvrons la bouche. Nous crions, nous chantons notre désir. Avec nos amis nous discutons de comment faire, nous réfléchissons, nous imaginons, nous avançons, nous agissons, nous inventons. Nous nous sommes soulevés». Ce livre est un essai de phénoménologie et d’anthropologie — voire une poétique — des gestes de soulèvement. Il interroge les corps avec la psyché à travers le lien profond, paradoxal, dialectique, qui s’instaure entre le désir et la mémoire. Comme il y a «ce qui nous regarde» par-delà «ce que nous croyons voir», il y aurait peut-être «ce qui nous soulève» par-delà «ce que nous croyons être». C’est une question posée en amont — ou en dedans — de nos opinions ou actions partisanes : question posée, donc, aux gestes et aux imaginations politiques. Question posée à la puissance de se soulever, même lorsque le pouvoir n’est pas en vue. Cette puissance est indestructible comme le désir lui-même. C’est une puissance de désobéir. Elle est si inventive qu’elle mérite une attention tout à la fois précise (parce que le singulier, en l’espèce, nous dit plus que l’universel) et erratique (parce que les soulèvements surgissent en des temps, en des lieux et à des échelles où on ne les attendait pas).
Georges Didi-Huberman, a philosopher and art historian based in Paris, teaches at the École des Hautes Études en Sciences Sociales. Recipient of the 2015 Adorno Prize, he is the author of more than fifty books on the history and theory of images, including Invention of Hysteria: Charcot and the Photographic Iconography of the Salpêtrière (MIT Press), Bark (MIT Press), Images in Spite of All: Four Photographs from Auschwitz, and The Surviving Image: Phantoms of Time and Time of Phantoms: Aby Warburg's History of Art.
Me duele la cabeza como para hacer una reseña acabada. Digamos que, so pena de que en algunos momentos casi se idealice el levantamiento y su concomitante evanescencia, sí es un análisis histórico-crítico bastante útil no solo en lo que se refiere a levantamientos efectivos en la historia sino que, también, a los análisis a los que han servido de base, inspiración o modelo de lectura. Me refiero, en particular, a una aguda crítica al pensamiento de Agamben --filósofo al que amo críticamente-- y a la inclinación de pensar cualquier salida de la maquinaria ontoteológica como una pura fuga autodestituyente. Sin embargo, no comparto taaanto la crítica a Badiou como un filósofo de la rigidez y más cercano a la doxa comunista por su énfasis en la Idea. De todos modos, un libro encantador por su prosa y por su llamado a la revisión de textos teóricos clásicos que, por tales, no dejan de invitar no solo a la lectura sino que, también, a su crítica. Si leemos a Foucault, Benjamin o Mil mesetas no es tanto para entregarnos apresuradamente a una celebración acrítica ni, tampoco, a despacharlos sin más como producciones teóricas metropolitanas --que lo son-- que desatienden trayectorias teóricas del Tercer Mundo: debemos ser nosotros los que hagan esos diálogos y hagan florecer los textos. Debemos adentrarnos, en la textura misma de sus salidas políticas, a entender sus limitaciones y yuxtaponerlos a matrices teóricas heterogéneas que nos hagan sentido en la propia materialidad histórica de la que somos partes o, al menos yo, como latinoamericanxs. Cualquier pensamiento de la potencia y de la diferencia no debe enclaustrarse en su propio autotelismo europeo, pero tampoco debemos esperar que este mismo sea el que se abra. Debemos abrirlo nosotros. El devenir y su concomitante política actua a la vez que es "actuada" por nosotros en su forma teórica y debemos (o quiero creerlo) hacerla constelar de manera crítica con una práctica teórica materialista que nos haga sentido.