Quand mon père est mort, je n’ai pas hérité de boîtes pleines de documents et de lettres. Ses cendres ont été jetées à l’eau. Ses biens ont été donnés, détruits à la hâte. Il avait les yeux clairs et portait la barbe. Sur les photos, il avait cette allure virile et négligée caractéristique des années soixante-dix. Il ne pouvait pas se mettre à table sans son couteau de poche et du pain. Il disait « il » à ceux qu’il aurait dû vouvoyer, parce qu’il refusait de se soumettre à leur supériorité de classe. Il était drôle et colérique. Il était sensible. Il fumait, il buvait ; il n’a pas laissé grand-chose derrière lui. Je crois qu’il avait commencé à disparaître de son vivant déjà. Quand on a soulevé son corps, j’ai vu la légère empreinte qui creusait le drap, là où était posé son crâne. Puis elle s’est effacée, et le drap est redevenu lisse. C’est cette disparition qui a déclenché l’écriture de ce livre, cette absence que laissent les morts, avec laquelle ceux qui leur survivent tissent des fictions pour s’en sortir.
Terminer ce livre et ne plus pouvoir parler … le retourner, relire la quatrième de couverture, le serrer contre son cœur, pleurer encore un peu, hésiter encore à le déposer, finalement si résoudre le cœur toujours gonflé … Ce livre, je l’attendais depuis longtemps…
Original et touchant. Hybride entre roman et carnet de bord, certains textes m'ont laissé indifférente (les rêves, les inventaires), d'autres m'ont bouleversé (le style "journal intime", les questionnaires). L'oeuvre me rappelle les travaux artistiques de Sophie Calle: le soucis de scruter maladivement des moments intimes, l'utilisation des photos, l'archivage des souvenirs, les frontières floues de l'autofiction et la réalité, du public et du privé... Le récit en tant que tel tourne un peu en rond. Céline Huyghebaert a choisit le média du roman pour nous présenter son travail; j'ai l'impression que cette oeuvre pourrait prendre bien d'autres formes!
se dévore d’un seul coup tellement c’est magnifiquement et originalement et puissamment écrit, et si triste à la fois qu’on a seulement envie d’appeler ses parents pour leur dire qu’on les aime avant de ne plus pouvoir le faire en personne.
A cause de circonstances personnelles, ce texte a résonné en moi. Mais si je n'avais pas eu l'esprit embrumé par mon expérience, j'aurais été agacée par certains travers : trop nombriliste ( pour reprendre le terme d'une critique lue ici), un récit qui tourne en rond ,la vie de ce père pas si passionnante...
Céline Huyghebaert est une artiste, dont le travail tourne autour des thèmes de la disparition et des traces. Ce livre présente une partie d'un immense projet de recherche au sujet de son père décédé. C'est un travail de collecte d'informations, d'analyse et d'introspection vraiment impressionnant, rigoureux et intelligent, et courageux également. J'ai trouvé la démarche admirable et inspirante. L'histoire racontée est touchante, mais jamais larmoyante. C'est un documentaire biographique aussi passionnant qu'un récit ou qu'un roman. Je suis passée à travers les 400 pages en deux jours.
La première qualité de ce livre est de ne pas faire semblant - comme trop de romans contemporains - de ne pas être entièrement autobiographique (sauf à la fin, ce qui défait un peu le reste, mais bon). La démarche de l'auteure est honnête, sincère et authentique; de même, l'écriture est impeccable. C'est toutefois un livre qui prend beaucoup - trop - de temps à arriver au coeur de son propos.
Les diverses formes que prennent l'écriture sont originales; j'ai énormément apprécié l'idée de faire des dialogues théâtraux avec les témoignages de chacun, ainsi que les passages autobiographiques. Par contre, certaines parties m'ont semblé de trop, en particulier les 45 pages où l'auteure a demandé à ses amis - qui ne connaissaient pas son père - de remplir un questionnaire sur lui... (ça m'a semblé à la limite de la décence; j'étais si choquée que j'ai dû arrêté de lire).
Bref, le livre et ce qu'il raconte m'ont touché (à moins d'avoir un coeur de pierre, on ne peut pas ne pas être touché), mais l'effet aurait été plus percutant sans les trop nombreuses digressions et faux-fuyants.
Découvrir quelqu'un de mort à travers les amis, la famille, c'est tout un travail émotif qui nous rapproche, brise et qui nous rend vulnérable. Très bouleversant et bien écrit!
« Tout part de là : les témoignages ne sont pas des documents. Ce qui s'y révèle n'est pas la vérité de l'événement, mais la relation que la personne qui parle entretient avec lui. »
Suivre le processus de deuil de l’auteur à travers les conversations avec d’autres. Original. Plusieurs des réflexions de l’auteure ont été les miennes. On se pose les mêmes questions, on imagine les mêmes hypothèses. La mort est un concept brumeux...
Une lecture dans laquelle j’ai choisi de me lancer, consciente que les émotions suscitées seraient intenses, éprouvantes, douloureuses. Au-delà du parallèle évident que j’ai fait avec un pan récent de mon histoire personnelle, cette autofiction est avant tout un très grand livre, magnifiquement écrit. Le deuil, la mémoire et le manque y sont abordés en fragments, au gré de quelques photos et d’habiles variations de formes. La vie de cet homme et de ses proches de même que la tendresse que ressent pour lui sa fille Céline m’ont profondément touchée, émue.
C'était quand même bon, mais honnêtement, j'ai pas tant accroché à l'histoire. Je trouvais qu'il y avait quand même beaucoup de redondances, surtout dans les dialogues, qui, des fois, disaient la même chose, mais de manières différentes.
Mais je dois avouer que l'œuvre de Céline m'a inspiré pour de futurs textes/projets👀
En soit, je suis quand même contente de l'avoir lu pour sa forme qui va dans pleins de directions, mais je pense pas que c'est une oeuvre dont je vais me souvenir dans 2 ans, mettons🤷🏼♀️
J'ai pu embarquer dans le livre après une centaine de pages. Je ne comprenais pas bien pourquoi autant était écrit sur une personne qu'on n'arrive toujours pas à saisir et à connaître. Puis, j'ai compris que ce livre était une sorte d'exercice de style au sujet d'une personne qu'on n'a pas réussi à connaître, du moins pas autant qu'on l'aurait souhaité. Et c'est beau ainsi. Ce père continue à nous échapper, on y retient des choses contradictoires, et ça finit par nous obséder.
Je n'aime pas donner de mauvaises critiques, et je comprends que c'était un projet artistique et un processus de deuil, mais j'ai trouvé ce livre incroyablement ennuyeux. En fin, j'ai sauté quelques pages au milieu. Cela aussi je n'aime pas faire. Mais parfois on n'a pas de choix ...
Attentes élevées. J'aurais cru que ce livre me toucherait vu ma situation personnelle similaire. Père décédé, sans aurevoir officiel. Le dernier quart du livre est le plus intéressant.
Récit poignant pour ceux qui peuvent s’y identifier d’une quelconque manière. Pour ma part, ce roman a fait resurgir plusieurs émotions/réflexions que je croyais achevées.
Un bel hommage aux pères qui sont parfois au second plan, à ceux qu'on a l'impression de ne pas si bien connaître après tout. J'ai vu Le drap blanc comme une quête de savoirs, en douceur et en respect pour un père parti trop vite, ne laissant que peu de traces derrière lui. Je n'ai pas échappé à me mettre à la place de la narratrice et à m'imaginer quelles questions je me poserais sur la vie de mon père, qu'est-ce que je voudrais savoir... Puisqu'il est encore temps de lui demander.
Si j’avais pu mettre dix étoiles sur cinq, je l’aurais fait!! J’ai beaucoup trop aimé ce roman. Mon coup de cœur de l’année au complet!! 🤩Je l’ai lu pour l’université, mais il va rester dans ma tête longtemps simplement parce que je m’identifie beaucoup à la narratrice et c’est un sujet qui me rejoins!!