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Procès verbal

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Dans ce récit en forme de procès, qui déjoue habilement les codes du droit avec les armes de la littérature, Valérie Lefebvre-Faucher revient sur son parcours d'éditrice, d'écrivaine et de féministe pour réfléchir à l'épineuse question de la liberté d'expression. Contrôle de la parole par l'État, par l'argent, par les pairs... Toutes les pièces à conviction sont exposées à votre jugement. Il en résulte un plaidoyer magistral, à la croisée de l'essai et de la fiction, en faveur de l'art comme levier de résistance politique.

232 pages, Paperback

First published November 11, 2019

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Valérie Lefebvre-Faucher

20 books6 followers

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Profile Image for Nicolas Lontel.
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November 23, 2019
C'est encore un brouillon de critique, j'espère encore, dans un avenir, mettre ça plus au propre, peaufiner et élargir un peu mieux cette réflexion dans un texte sur mon blog. En attendant un jour qui n'adviendra peut-être pas, je partage mes impressions ici:

J'ai beaucoup beaucoup de choses sur lesquelles j'aime réfléchir dans cet essai. Divisé en deux parties, la première portant sur l'épisode Noir Canada dans laquelle elle livre sa vision, dans une perspective beaucoup plus littéraire/romanesque (elle cite des autrices et auteurs comme Barthes, Borgès, Mavrikakis, Brossard, Hamelin, Vallière, Woolf, etc.) que le premier ouvrage de la même collection (10 ans de Noir Canada) d'Anne-Marie Voisard qui avait un bagage beaucoup plus philosophique (de mémoire : Agamben, Kafka, Foucault, Bourdieu, Bergson, etc.). C'est donc une autre approche au juridique, pas seulement au niveau du vécu, de l’individu, du parcours, mais du jeu des références et de la perspective de la critique. J'ai dévoré cette première partie, regrettant souvent de devoir poser l'essai pour retourner au travail.

C'est surtout dans la seconde partie, qui parle surtout du retrait d'un texte dans l'essai collectif Libérer la colère suite aux pressions faites à l'égard qu'une agresseuse aurait écrit ce texte alors que l'essai désirer donner la parole à celles qui résistent. Je ne volerais pas vraiment de « punch » lorsque Lefebvre-Faucher explique que suite à l'affaire Noir Canada, elle a quitté la maison d'édition Écosociété peu après le second procès et cette défaite ressentie suite à la censure du livre obtenue dans un compromis qui n'en était pas un et son désir de retourner aux études pour changer d'air (elle l'exprime dans de meilleurs termes). Elle fut cependant happée de nouveau par l'édition et tomba chez Remue-Ménage pour se retrouver dans une situation, très différente, mais similaire à certains égards, de censure d'un texte qui l'a fait de nouveau quitter une maison d'édition qui n'a pas vraiment donner toutes ses chances pour garder ce texte dans le recueil.

Je dois être honnête en disant qu'à beaucoup d'égard, je la comprends d'avoir voulu garder ce texte, malgré toute la violence qu'il porte dans son contexte. J'ai vu les commentaires enflammés sous un statut Facebook de l'annonce de la parution du livre, appelant au boycott, traitant d'anti-féministes la maison d'édition et je ne sais quoi d'autres les éditrices de chez Remue-Ménage ce qui honnêtement dépassait à mon sens le réel. Un des arguments de Lefebvre-Faucher est notamment que ce retrait, le texte d'une femme noire, est précisément le retrait d'une dénonciation de violence, ce que se voulait être l'essai. J'ajouterais aussi que ce n'est pas parce qu'une personne est l'autrice de violence elle-même qu'elle ne peut pas en être la récipiendaire aussi et que cette parole aussi doit être portée (je ne pense pas que c'était le sujet du texte retiré toutefois). Il suffit de penser à toute la violence du système carcéral qui s'effectue aussi sur les meurtriers et qui reste une violence inacceptable et qui doit être dénoncée.

L'autrice de Procès Verbal nuance évidemment son propos de 1 001 manières, notamment en ce qui a trait à la violence que ce texte peut faire ressentir aux victimes, mais aussi au soulagement des directrices de l'essai, à l'apaisement que le retrait de ce texte a donné pour tout le monde. Il reste toujours toutefois que, et ça c'est moi qui apporte cet argument, cette dénonciation, ces appels au boycott, ces critiques toutes justifiées en ce qui peut avoir trait à la violence que cette femme a commise vient retomber sur des gens qui se sont associées, ne serait-ce qu'un moment, à cette personne, sans connaissance de cause ou à tout le moins, pas dans l'exercice et la reproduction de cette violence. On vient condamner la maison d'édition, les collaboratrices (qui doivent alors se justifier ou se distancier), les éditrices, les directrices alors qu'elles n'ont jamais été parties prenante de cette violence.
Il y a aussi, à mon avis, la question du double standard d'une maison d'édition féministe qui sera 100 fois plus critiquée que la maison d'édition qui accueille Jean Barbe (Leméac se porte très bien) ou je ne sais pas, MBC (Boréal aussi va très bien), pour ne nommer que des personnes aux comportements violents ou à la parole qui mène à l'exclusion et la discrimination dans le second cas (rien que l'essayiste, en sa qualité d'éditrice comme elle en parle avec l'exemple de l'animateur radio Gomeshi, défend la publication de ces textes, aussi mauvais, maladroit, décevants soient-ils).

À beaucoup d'égards, Valérie Lefebvre-Faucher et moi sommes d'accord sur le danger de la censure qui, une fois appliquée, même si elle empêche des voix haineuses envers les minorités, va toujours servir beaucoup plus à censurer les marginalités. Elle donne l'exemple de comment certaines lois peuvent empêcher la parole d'une résistance à l'état autoritaire, j'y ajouterais les lois anti-pornographiques qui ont toujours plus servies à censurer les textes gais, lesbiens et queer et à empêcher leur circulation que de stopper la violence qu'elles sont supposés prévenir.

Toute la question légale, coercitive, est abordée dans la première partie donc nous l'avons toujours en tête lors de la lecture de la seconde. L'essayiste parle aussi de l'importance de la meilleure répartition des voix, un des problèmes qu'elle relève, et elle n'est pas la première, est que la censure c'est aussi empêcher la parole des marginalités tandis que plusieurs se disent sur toutes les tribunes médiatiques censurés alors qu'ils ont justement accès à ces tribunes contrairement à leur critique. Un des points qu'elle soulevait, outre le fait de donner plus de tribunes aux voix encore trop peu entendues, et un point sur lequel elle ne s'étend pas beaucoup, c'est aussi de réduire le nombre de publications, de livres, de tribunes qui propagent toujours les mêmes propos et ne font qu'ajouter à une cacophonie (là, c'est plus moi qui parle) ambiante. Elle y revient à la fin en parlant de slow edition, mais c'est quelque chose qui vient rejoindre un sentiment que je partage beaucoup travaillant dans une librairie et voyant les mêmes romans 100 fois ré-écrit ou les essais si-similaires avec si peu de différences avec leurs prédécesseurs théoriques. Je crois que Procès Verbal est justement de ces essais qui non seulement ajoute vraiment à la réflexion, mais prend de nouvelles perspectives et vaut la peine d'être publié. En contre-partie, je crois justement que pour donner plus de voix à certaines, sans multiplier à l'infini les discours et publier encore plus de livres qu'il y a en, il faut tout simplement la retirer (dans une certaine mesure) à d'autres, par la production de moins de livres ou de chroniques (plutôt que pas de livres). De la même manière que pour l'égalité d'embauche, si on aurait voulu la faire beaucoup plus rapidement, il aurait fallu retirer des emplois à des hommes plutôt que de le faire progressivement sur des décennies (et être encore en train de le faire). Évidemment, on pourra répondre qu'on peut créer plus d'emplois comme on peut créer plus de livres, cela répare-t-il l'injustice?

J'ai cependant aussi des points de divergence avec l'essayiste en ce qui à trait à la censure de la gauche. Je ne nierais pas que j'ai vu des gens dit « de gauche » avoir un certain soulagement à l'annulation de X ou Y, ce ne sont cependant pas les plus vocales à mon avis et souvent, c'est un sentiment tenu en privé. Par exemple, dans les tribunes, elle évoque brièvement SLAV/Kanata, je n'ai jamais lu un seul texte publié dans un média autre que les réseaux sociaux (ou alors un seul) prônant l'annulation/la censure des pièces (et je tiens la bibliographie de ces textes à jour [https://biscuitsdefortune.com/bibliog...] donc je n'en manque pas vraiment) alors que de l'autres côté, on n'hésitait pas à parler du racisme des anti-racismes, de leur communautarisme, repli identitaire, fascisme, eugénisme, et j'en passe d'autres horribles. C'est là cependant que je vois que la réflexion de Lefebvre-Faucher est très intéressante puisqu'elle parle du débordement, avec Facebook, de l'espace de parole public qui tombe dans le privé et vice-versa et c'est dans ce contexte là que je crois que le bas blesse le plus puisque les pressions de retirer le texte de l'essai Libérer la colère vient justement de cette plateforme (à ce que j'ai vu), des échanges semi-privés, des violences subies et partagés semi-publiquement, je n'ai pas vu de textes publiques sur la question (contrairement à des SLAV/Kanata, des Exhibit B, des critiques de la venues de Roosh V, etc. qui n'ont jamais mené à quelconque censure complète, sinon à un report de la pièce).

Je crois que le parcours et l'expérience de l'autrice amène à donner beaucoup beaucoup d'importance à la parole et à l'écrit puisqu'elle a vue et expérimentée de première main la facilité avec laquelle on peut la retirer (historiquement, par les entreprises et les personnes fortunées, mais aussi la pression sociale). Mon expérience est cependant légèrement différente et j'aurais plutôt préféré qu'avec le retrait du texte dans Libérer la colère, ce même texte ou un autre similaire, qui y réfléchit, émerge ailleurs. Je le vois dans une perspective qu'il y a pas de mauvais texte en soi, mais peut-être un mauvais contexte d'éditorialisation. Je pense que la question de prioriser l'écoute des personnes victimes (comme Lefebvre-Faucher priorise aussi!) l'emporte sur l'édition d'un texte, mais que la parole des agresseur·es qui doit ''malheureusement'' être portée pour plusieurs raisons que l'essayiste explicite très bien, je vous laisse lire l'essai, a sa place, mais ailleurs, dans d'autres récits, dans d'autres livres. Peut-être que les témoignages anonymes (que je ne sais pas s'ils sont fictifs our réels) qu'elle insère dans Procès Verbal sont une tentative de restaurer ces textes là. Je ne sais pas. Ils sont à clef et même si je pense en avoir une, je n'ai malheureusement pas le contexte pour les autres et s'adresse probablement plus aux censurés qu'au public.

J'aurais beaucoup beaucoup d'autres réflexions à avoir suite à la lecture du texte de Valérie Lefebvre-Faucher, peut-être est-ce que ce sera pour une prochaine fois puisque ce sont là des impressions à froid après ma lecture de l'essai (il faudra que je le relise, mais j'ai aussi tant à lire). Je n'ai pas trop l'habitude des commentaires méta-critiques, mais il est bientôt 1h30 du matin, ça fait plus d'une heure que je réfléchis par écrit au texte et c'est malheureusement tout le temps que j'ai pour parler de cet essai avant un moment. Je voulais au moins laisser ces notes, en attendant de les revisiter éventuellement, je ne sais trop quand, mais je voulais au moins témoigner de l'immense intérêt que j'ai porté à cet essai et, je me répété, le fait que je ne voulais vraiment pas le déposer. Je vais clairement tenter de le faire lire au maximum à mes collègues libraires qui, je crois, pourrait profiter de la réflexion et alimenter nos très très nombreuses discussions à ce sujet.

J'ai passé beaucoup plus de temps à parler de la seconde partie, et j'espère que ça n'a pas du tout laissé l'impression que Lefebvre-Faucher passe son temps à critiquer une gauche armée de censure à tous vents parce que ce n'est pas du tout ça qu'elle propose comme essai. Elle voit, à travers son parcours, des similarités, des lieux presque communs et sans tomber dans la pente glissante, ne peut s'empêcher de s'interroger sur la facilité à retirer un texte et à se demander comment on peut concilier ça avec une liberté d'expression qui est tout aussi questionable à la base (à savoir, qui possède la parole), mais pour laquelle les femmes se battent depuis des siècles et sitôt obtenue, sitôt elle peut être ôtée aussi facilement. J'ai beau être en désaccord ça et là justement sur quelques points et beaucoup plus sur les conclusions que les raisonnements, n'empêche que la perspective de l'essayiste pose des bases de réflexions solides et claires sur lesquelles s'appuyer pour une réflexion plus approfondie.
81 reviews2 followers
January 4, 2022
Une réflexion sur les cadres de la langue, les contextes d’énonciation et le poids de la parole qui remet en question sa propre voix, sa propre posture pour permettre le débat, pour que les idées s’érigent sur des bases solides. La liberté d’expression et les enjeux féministes s’entrecroisent, s’opposent, se répondent jusqu’à ce qu’apparaisse sous les yeux des lecteurs ce silence fait d’un trop plein de bruit. Par réflexe on souhaiterait un filtre, mais Lefebvre-Faucher le déchire, laisse la place à tous les discours au nom d’une liberté totale sans censure positive ou négative.
182 reviews9 followers
May 2, 2021
Bien que déprimant, un livre qui fait du bien par ses réflexions intelligentes sur le rapport entre l'édition et la censure et un propos très loin des positions campés et polarisantes qu'on voit dans les médias et les réseaux sociaux. J'adore le style littéraire de l'essai, qui assume ses envolées lyriques. Certaines parties volontairement fictionnalisées m'ont moins parlé, sinon ça aurait facilement été une note parfaite
Profile Image for Josiane Stratis.
Author 3 books296 followers
May 28, 2021
Quelle belle discussion importante. Encore plus maintenant.
Displaying 1 - 4 of 4 reviews

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