Depuis qu’il est arrivé à Paris, Adrien Naselli, père conducteur de bus et mère secrétaire, tient une liste des gens comme lui, ces « transfuges de classe » qui concentrent l’attention des médias. Pour cette enquête, il est allé à la rencontre de leurs parents. Ils sont ouvriers, agriculteurs, aides-soignantes, petits employés, tandis que leurs enfants sont journalistes, écrivains, magistrats ou universitaires. Ils gagnent le smic ou à peine plus, ont quitté l’école avant dix-huit ans et n’ont pour la plupart jamais pris l’avion. Dans le conte de fées de la méritocratie, ils sont l’envers du décor.
Dans ce livre tendre et poignant, Adrien Naselli a voulu redonner la parole à ceux qu’on n’entend jamais. Princes et princesses de la République, les transfuges de classe ont vu leurs parents, ni rois ni reines, relégués au second plan. Ce livre leur rend la couronne.
Comme le sous-titre l'indique, il s'agit d'une enquête journalistique sur les transfuges et leurs parents. Si je trouve l'idée géniale (on écoute et lis les transfuges mais rarement leurs parents, ce à quoi cette enquête essaye de remédier), j'ai eu beaucoup de mal avec 1) la structure du livre, ce qui m'a gâché la lecture et 2) la représentation très biaisée des transfuges de classe.
On y suit 16 transfuges de classe, y compris l'auteur, et leur parents (et parfois d'autres membre de leur famille). Chaque chapitre correspond à une étape du parcours de ces 16 transclasses (enfance, la transition, l'arrivée à un autre monde,...) - ce qui, même au risque d'une généralisation des parcours transclasses, est, selon moi, méthodologiquement justifié. Le problème, c'est que l'on passe d'une personne à une autre au moins 15 fois par chapitre et au bout d'un moment, on ne sait plus qui est qui, avec tous les parents et membres de la famille, c'est vraiment difficile à suivre.
L'auteur est journaliste et fait son enquête sur les transfuges de classe qu'il connaît grâce à son métier et ses réseaux, ce qui fait que les transclasses interviewés sont tous : 1) ce que j'appelle vaguement des "transclasses culturels" (comme Ernaux, Bourdieu, Eribon,...) et 2) de gauche (bon nombre d'entre eux peuvent être qualifiés de "personnalités politiques/militant-es" de gauche). Pourtant, tous les transfuges ne s'élèvent pas par la culture et tous les transfuges ne sont pas de gauche. Ces deux biais nous donnent un échantillon (même avec toutes les différences ethniques et sexuelles) assez homogène qui ne représente qu'une façon d'être transfuge / un type de parcours transclasse (c'est-à-dire, une mobilité sociale intragénérationnelle ascendante relativement considérable par l'acquisition d'un fort capital culturel plutôt qu'économique). Ce qui n'est pas un problème en soi, il faut simplement préciser qu'on traite seulement un type/groupe de transfuges dans l'introduction, précision que l'auteur, si ma mémoire est bonne, a oublié de faire. Quand on écrit un livre sur les transfuges de classe sans définir ce que veut dire "transfuge", c'est déjà pas très bien parti.
Pourtant, j'ai beaucoup apprécier qu'on donne la parole aux parents de ces 16 transfuges. Leurs témoignages sont éclairants et touchants. On y voit à quel point le rôle des parents (les premiers "alliés d'ascension", pour reprendre les termes de Rose-Marie Lagrave) est prépondérant dans la mobilité sociale ascendante de leurs enfants. Il est intéressant de noter les 3 points communs, repérés par Annie Ernaux à la lecture de l'ouvrage, dans l'enfance de ces 16 transfuges : 1) pratiques culturelles légitimes (la lecture, surtout) inculquées à l'enfant par (le plus souvent) la mère ; 2) "l’acceptation, sans ostentation, des sacrifices pour accompagner la réussite scolaire" et 3) "le désir de ne pas se vanter, qui a comme pendant sans doute la crainte que s’arrête la faveur du destin". Il est fascinant aussi de constater que tous ces 16 transfuges de classe éprouvent/ont éprouvé très fortement le décalage/l'aliénation de classe et puis "la honte sociale" (qui les conduit à être horrible avec leurs parents à un moment donné (souvent durant la "transition")). Les témoignages sur ce que ressentent les enfants et leurs parents sont très émouvants => c'est un très gros plus de cet ouvrage, malgré une organisation textuelle franchement chiante à lire.
Il parait que le sujet des transfuges de classe est "à la mode" en cette rentrée littéraire. J'ai vu passer des articles qui s'émouvaient, positivement ou négativement, de cette tendance. Il y a bien sûr Changer : méthode, le nouvel ouvrage d'Edouard Louis, et d'autres que je n'ai pas encore eu l'occasion de lire, si je le fais un jour.
Il y a également ce livre dont le titre "Et tes parents, ils font quoi ?" et le sous-titre "Enquête sur les transfuges de classe et leurs parents" ont l'avantage de la clarté. Lui-même transfuge de classe, le journaliste Adrien Naselli propose une véritable enquête journalistique sur une quinzaine de transfuges de classe et leurs parents. Il utilise pour cela l'un des outils essentiels du journalisme : l'entretien, à la fois avec des transfuges de classes rencontrés au fil de sa carrière et avec leurs parents.
Le livre se structure autour des grandes étapes de la trajectoire des enfants : l'enfance et la scolarité, les études supérieures, puis la vie professionnelle, avant une conclusion émaillée de commentaires d'Annie Ernaux.
L'angle adopté par l'auteur est intéressant et même essentiel dans ce livre : par définition, la trajectoire de transfuge de classe se fait en s'éloignant du milieu social de ses parents, il semble donc pertinent de s'intéresser à la façon dont cette trajectoire a été vécue par les parents du "transfuge". Très souvent, la littérature à ce sujet s'intéresse au transfuge lui-même, dans un exercice qui reste auto-centré. Ici, Adrien Naselli s'intéresse avant tout aux parents, et le résultat est plutôt intéressant.
J'ai tout de même un regret : la multitude de cas traités, une quinzaine, rend la lecture un peu rébarbative à certains moments. Chaque trajectoire reste unique, mais le livre aurait peut-être gagné en impact et en fluidité si l'auteur avait choisi de resserrer un peu le nombre de "cas" traités.
Malgré tout, c'est une lecture enrichissante sur un sujet qui m'intéresse particulièrement.
C'était vraiment super intéressant. j'ai beaucoup apprécié la capacité de l'auteur à faire son autocritique par rapport au fait d'interviewer uniquement des personnes du milieu médiatique et artistique, et de reconnaître son biais de passer par le storytelling pour parler de la passion et des talents innés comme moteurs de ces gens. Ça manque effectivement de personnes D'autres milieu, comme l'industrie, et de questionner les motivations plus "terre à terre" comme le fait de simplement vouloir avoir une situation financière différente de celle des parents. Mais vu que c'est reconnu par l'auteur et qu'il questionne lui-même ces biais, ça ne m'a pas tant dérangée, et c'était quand même très intelligent. j'ai adoré la manière d'aborder l'impact sur les relations parents/enfants
Un intéressante introduction du sujet des transfuges de classe avec des témoignages touchant. Néanmoins, la structure du livre empêche une lecture fluide car on saute de portrait en portrait comme si l'accumulation de témoignage était la seule flèche que possède l'auteur et c'est dommage. Dans ce même domaine des transfuges la littérature de Eribon est plus académique, celle d'Edouard Louis plus humaine, on est dans un entre deux qui peine à trouver son utilité.
Ça partait super bien, j'étais parfois émue à la lecture de certains témoignages de parents. Et puis, les pages défilant, le style narratif m'a totalement perdu. Déçue de ce livre qui traite pourtant du sujet si intéressant.
Intéressant. Parfois touchant. Ç’aurait mérité d’être un peu plus approfondi mais le parti pris est assumé dans le style de l’auteur. On reste cependant un peu sur sa faim quant aux analyses du phénomène de transfuge de classe. J’aurai apprécié des entretiens plus étayés avec chaque famille et/ou du commentaire plus analytique.
Beaucoup d'avis soulignent la complexité de lire ce livre car il y a un chassé-croisé entre les différentes personnes interrogées, mais les transitions sont bien faites. L'écriture de Naselli est simple et offre ses idées au début et à la fin du livre. Merci de nous avoir fait écouter les transfuges de classe, et les parents, qu'on oublie souvent mais qui sont là, dans l'ombre.
Essai très intéressant sur le sujet des transfuges de classes. C’est original d’avoir le point de vue des parents. On est parfois un peu perdu entre toutes les personnes suivies mais ce n’est qu’un détail.
Le sujet est très intéressant et les témoignages sont touchants. Toutefois, en raison de la construction du livre j'ai eu des difficultés à suivre les trajectoires et les récits de chacun.
Quand on vient d'un milieu populaire et qu'on a réussi dans les études, c'est très intéressant de lire l'histoire d'autres familles. C'est le point positif qu'on peut trouver à ce livre si on a suffisamment de patience.
La rédaction est le point négatif qui m'a forcé à en abandonner la lecture à peu près au tiers. Il n'y a aucune construction. On a l'impression qu'il s'agit d'un carnet ou d'enregistrements d'entretiens mis sur papier avec quelques notes personnelles de l'auteur. Parfois on ne sait même pas si l'on nous parle de la même personne d'un paragraphe au suivant. Très souvent on nous parle des parents mais on n'a aucune idée de la trajectoire de l'enfant, le "transfuge", ni même de son métier.
Être publié chez un grand éditeur et être diplômé de l'École Normale Supérieure ne sont manifestement pas des gages de qualité.
Ceci est sur la liste de lecteurs au mediatheque. Je l'ai lu en diagonale premièrement parce qu'il nomme des personnes "réussies "que je ne connais pas ; deuxièmement parce que leur route de succès ne m'intéresse pas. Mais j'ai trouvé dans ce livre une description du système scolaire et sociale que je ne connais pas et qui explique, un peu, pourquoi mes enfants de parents immigrés ont des difficultés à trouver un boulot gratifiant.
Très bon livre sur le sujets des transfuges de classe. Même si je m’attendais à une réelle étude sur le fait que malgré ces transfuges on ne pourrait tout de même pas croire en la méritocratie. Mais j’ai apprécié suivre la jeunesse de ces transfuges ainsi que les discours émouvants de leurs parents ou plutôt leurs alliés d’ascension.
Clairvoyant essai sur un sujet bien connu (les transfuges de clases) à travers un angle novateur (leurs parents). Élégantes, multiples, touchantes, ces histoires de darons et daronnes réussissent à insuffler de la texture et de la vie dans une question importante de la sociologie aujourd'hui.
Sujet extrêmement intéressant et qui me passionne beaucoup; l’angle du livre qui se base sur les vécus des parents était important et pas assez abordé dans la literature.
However, I find that he didn’t develop the topic enough and the nuance between first-generation transfuges de classe and french transfuges de classe is not taken enough into consideration. We cannot compare these two experiences, whether in terms of social or cultural capital! I find he brushed over these differences way too quickly.