Une anthologie imprévue ? Oui, car elle n’a pas été imaginée pendant sa genèse. Et la plupart de ses vers sont fortuits : dus au hasard des rencontres sur les réseaux sociaux entre mes états lunatiques et des textes qui apparaissaient dans le feed selon les humeurs des algorithmes et la liste d’amis. Depuis sept-huit ans, en fonction de l’écho provoqué par un poème repéré çà et là, j’ai transvasé en français et parfois librement adapté ces pépites lyriques roumaines. Il n’y a pas de calcul ou de hiérarchie dans la poésie : il n’y a que l’émotion et le plaisir qui m’ont conduit à ce livre. Les partager avec vous serait une fleur de rêve ou bien une épopée. Un vieil adage (qu’on doit à l’écrivain Vasile Alecsandri) dit que « le roumain est né poète ». Vous pouvez le vérifier dans cette anthologie, à vos risques et périls : la beauté des images peut être contagieuse. Radu Bata
La lecture de ce recueil de poésies avait tout pour me plaire. Une superbe couverture tout d'abord. J'adore les tons sombres d'où surgissent une luminosité et des coloris délicats. Ici, il faut féliciter Iulia Schiopu, pour la première de couverture et l'illustration intitulée « La Blouse roumaine », ainsi que Horațiu Weiker, dont la quatrième de couverture reprend (c'est un peu dommage que cela soit en taille 4 x 5 cm) le tableau « Il est où le bonheur ». Sur celui-ci on peut lire ceci : « Când o cauți/Fericirea e ca un ac/ În carul cu fân/Când o găsești, / E un nod/ În papură! » (Quand on le cherche/ le bonheur est comme une aiguille/Dans une botte de foin/ Quand on le trouve/ C'est un noeud dans la canne de jonc ! Cette dernière expression est l'équivalent de « chercher des taches dans le soleil ») Voici la liste des 57 auteurs réunis ici. Elle trône légitimement avant la préface de Jean-Pierre Longre. Il faut y ajouter le poète Radu Bata avec plusieurs poèmes d'ailleurs (« la beauté », p. 31, « pornographie avec les nuages », p. 43, « plus chauds sur la banquise, plus seuls dans la bise », p. 76-77, « flagrant délit de faciès dans le pays du feu aux fesses », p. 84, « entre les cuisses de la nature », p. 126-127) : Iuliana Alexa, Dan Alexe, Luminita Amarie, George Bacovia, Ana Barton, Ana Blandiana, Max Blecher, Dorina Brândusa Landén, Emil Brumaru, Alexia Ema Ema/Artema Burn, Nina Cassian, Mircea Cartarescu, Mariana Codruţ, Mihaela Colin, Ben Corlaciu, Traian T. Coșovei, Silviu Dancu, Carmen Dominte, Rodian Drăgoi, Adela Efrim, Mihai Eminescu, Raluca Feher, Anastasia Gavrilovici, Horia Ghibutiu, Matei Ghigiu, Silvia Goteanschii, Mugur Grosu, Cristina Hermeziu, Nora Iuga, Vintilă Ivănceanu, Claudiu Komartin, Ion Minulescu, Ramona Müller, Ion Mureșan, Iv cel Naiv, Bil Bill Kostel Bezos/Felix Nicolau, Florin Partene, Elis Podnar, Mircea Poeana, Ioan Es Pop, Alice Popescu, Radmila Popovici, Eva Precub, Petronela Rotar, Ana Pop Sirbu, Octavian Soviany, Nichita Stănescu, Petre Stoica, Ramona Strugariu, Robert Serban, Mihai Şora/Luiza Șora, Iulian Tănase, Mihai Ursachi, Paul Vinicius, Gelu Vlasin, Vitalie Vovc, Anca Zaharia Une poésie qui me parle, une poésie aux thématiques variées, une poésie résolument moderne, d'où internet par exemple n'est pas absent (cf. notamment p. 42 où l'on reçoit « comme un hostie infinie/ like après like »), bien au contraire, il serait même à l'origine de la rencontre des différents protagonistes. Une poésie qu'on lit sans modération et qu'on a envie de citer à profusion. Je vous recommande ce recueil dont l'avant-dernier poème me semble brillant : « nous sommes tous/ une fourmi/traversant/-insouciante-/ le tranchant / de la hache » (p. 129, poème de Petre Stoica), car quoiqu'il arrive il ne faut pas « renonce[r] à la marotte fourbe de la poésie » (p. 106, poème de Mihai Ursachi), elle nous teint souvent en vie, parfois en joue.