Ils vivaient en bordure de l'Amazone. Ils détestaient les missionnaires, ils réprouvaient la morale des Blancs. Ils avaient leurs propres coutumes. Il n'y avait pas de police chez eux, mais un comptable surnommé " le diable au chapeau blanc " dont la fonction consistait moins à punir qu'à remettre les compteurs à zéro. Ils avaient le droit de voler, de tuer, à condition de se soumettre à l'appréciation de ce juge qui les notait, comme un maître d'école. Une bonne action compensait un crime. On avait le droit d'assassiner ses voisins à condition de sauver un bébé d'un incendie ; il fallait que les notes s'équilibrent... Si c'était le cas, vous pouviez aller librement, sans avoir à redouter la moindre sanction. Dans le cas contraire, il vous restait peu de temps à vivre. Très peu de temps...
Serge Brussolo est un écrivain français de science-fiction, de fantastique, de thriller et de roman historique né le 31 mai 1951 à Paris.
Il vécut une dure enfance tourmentée, principalement à cause de la folie de sa mère. Il eut très tôt la vocation de l'écriture et, dès l'âge de douze ans, commença à chercher à se faire publier. Après avoir suivi des études de lettres et de psychologie, il exerce plusieurs petits métiers tout en ne renonçant pas à vivre un jour de sa plume. Les débuts furent difficiles, son style particulier peinait à se voir ouvrir les portes des revues de science-fiction de l'époque. Sa prose correspondait peu aux critères un peu étriqués de la science-fiction française. La première reconnaissance arrive en 1978 lorsqu'il réussit à faire paraître une première nouvelle, Funnyway dans l'anthologie Futurs au présent dirigée par Philippe Curval. Ce texte sera récompensé par le Grand prix de la science-fiction française en 1979.
La collection Présence du futur publie ensuite un premier recueil de nouvelles, Vue en coupe d'une ville malade, œuvre très remarquée du public qui lui vaut également un autre grand prix. Très prolifique, Serge Brussolo enchaîne ensuite la parution d'une série de romans dans la populaire collection "Anticipation" des éditions Fleuve noir à un rythme très soutenu dont Les Semeurs d'abîmes en 1983, récompensé par un prix Apollo. Beaucoup de critiques de l'époque, admirateurs de ses nouvelles au style si personnel et orignal lui reprochèrent de galvauder son talent en entrant dans la collection Anticipation du Fleuve noir, souvent mal considérée. Rétrospectivement, cette accusation semble totalement infondée, premièrement parce que cette partie de son œuvre fût une des plus riches et inventives, ensuite parce qu'il devint rapidement un des auteurs les plus appréciés de la collection et qu'il contribua fortement à faire évoluer celle-ci qui s'ouvrira bientôt à d'autres auteurs originaux comme Daniel Walther ou encore Joël Houssin. Et si, sur le plan de l'écriture, cette série de romans semblent moins audacieuse que ses premières productions, sur le plan de l'imaginaire, on sent l'auteur parfaitement à l'aise au sein de cette collection qui, en plus de lui ouvrir les portes à un large public, lui permet de se débarrasser des contingences « scientifiques » de la science-fiction dite « sérieuse ».
Il faut préciser ici que le terme science-fiction ne convient pas tout à fait à Brussolo. L'intéressé se dit lui-même peu captivé par le genre tel qu'il existe par ailleurs. C'est souvent faute de mieux que nombre de ses romans sont considérés comme tels. Brussolo n'est pas du genre à donner dans le space-opéra, encore moins à réellement chercher à imaginer un futur de l'humanité en tirant des hypothèses sur les futures avancées scientifiques ou technologiques. Ses références sont plutôt à chercher du côté des légendes, mythologies et autres récits merveilleux. Et chez lui, la science-fiction n'est jamais très éloignée du fantastique ou de l'étrange. D'ailleurs, certains de ses romans parus dans la collection Anticipation sont de purs romans fantastiques (Catacombes, Docteur Squelette, La Nuit du venin) et annoncent déjà l'abandon progressif de l'étiquette "science-fiction" par un auteur décidé à ne pas se laisser enfermer dans le moindre carcan. En 1990, en pleine explosion "Stephen King", il entame une collection fantastique à son nom aux éditions Gérard de Villiers, dix romans paraitront à un rythme très soutenu (un livre tous les deux mois) et exploreront, de manière souvent originales certains vieux thèmes du genre : la lycanthropie, la maison hantée, le vaisseau fantôme... Parmi les plus renommés, citons Les Emmurés ou encore Les Bêtes.
Harcelé par des satanistes et ayant conscience d'avoir fait le tour de ces sujets, Brussolo arrête la collection en 1992
Un mauvais Brussolo. Ce qui est rare de la part de cet auteur. L’intrigue est convenue tandis que les personnages sont trop classiques et connectés les uns aux autres de manière très artificielle. Tout ce qui semble mystérieux est expliqué immédiatement et l’intérêt retombe inexorablement. Le titre des chapitres décrit très souvent ce qui va se passer et supprime tout suspens. La fin est décevante et les actions des personnages ne font pas sens. En résumé, le tout forme une sorte de bouillie où quelques passages seulement sortent du lot. L’ajout de mots et expressions étrangers ne contribue pas à renforcer l’atmosphère mais produit seulement un effet comique et prétentieux. Un roman alimentaire au mieux.
Mon premier Brussolo de l’année 2008. Tout en dépaysement ! Comme d’habitude, Brussolo use d’une imagination sans bornes pour nous entraîner dans un univers hors du commun. Il nous plonge ce coup-ci au cœur de l’Amazonie, dans une ville moderne coincée entre la forêt ancestrale et l’Amazone. Il oppose la richesse des classes favorisées à la misère des favelas. São Carmino est une ville moderne peuplée de vieillards chics et de voyous dépravés. Les deux sociétés ont en commun un sens aigu de la superstition et de la religion. Les deux cohabitent dans cette étrange ville où de curieuses choses se passent. Un Maître d’école distribue bon points et punitions corporelles selon les délits. Des singes envahissent la ville et terrifient les petits vieux sans défenses. Un hold-up tourne mal et le butin ainsi que le coupable disparaissent de la circulation. Pas mal de personnages, d’événements en apparence secondaires qui prennent peu à peu leur sens. Pas vraiment de personnage principal, puisque tour à tour chacun a son rôle à jouer. La veuve bourgeoise, l’enfant des favelas neveu d’une sorcière, le voyou pas vraiment méchant, la brute sanguinaire, le proxénète, le raté prêt à tout pour des diamants, le créateur mégalo, tout y est. Pourtant, peut-être à cause de cet éparpillement, j’ai eu du mal à rentrer dans l’histoire dès le départ. Les intrigues s’emmêlent, les personnages s’entrecroisent. On a du mal à cerner l’histoire elle-même, mais vers la fin tout s’emboîte. Enfin, j’ai quand même beaucoup aimé ce livre, pour son dépaysement, sa façon de traiter les histoires et les personnages, l’atmosphère suffocante, le thème de la superstition…mais je pense que ça peut surprendre et perdre un peu le lecteur qui ne s’y attend pas forcément, surtout à la lecture de la 4ème de couverture. Je range ce titre dans le fantastique, uniquement à cause de certains détails de la fin du livre, mais je me trompe sans doute…Quoique…?!
J’aime beaucoup l’écriture de Brussolo et j’ai trouvé cette histoire très originale, captivante et bien construite. Ici, aux personnages protagonistes (et la liste est assez longue), s’ajoutent d’autres entités de moindre importance: d’abord, la Ville « idéale », une enclave rutilante au cœur de l’Amazonie, avorton d’utopie construite avant d’avoir des habitants, puis, en son centre, une favéla regorgeant de pouvoirs obscurs, et enfin, menaçante, tout autour de la ville (et pour l’effet menaçant, on peut compter sur les talents de l’auteur!) : la jungle. Une jungle qui semble toujours attendre la première occasion pour reprendre ses droits. D’autres entités, participant à ce grand château de carte: des animaux qui se rebelles, des groupuscules, issus d’alliances improbables, composés d’êtres avides, issus de milieux divers, prêts à s’entretuer pour avoir le dernier bout d’os. On a donc plusieurs cartes : quelques criminels, deux enquêteurs, une sorcière et son fils aventurier, un justicier fantôme (la légende locale), un embaumeur à rabais, un prêtre missionnaire, un journaliste... Finalement, le reste de la population, les citoyens, ceux dont on parle moins en fait, les habitants des beaux immeubles : êtres peureux, retraités, ou petits rentiers, dont la vie semble presque arrêtée, endormis dans l’ombre de leurs intérieurs cossus, se tenant terrés à l’abri de la chaleur... Et que se passe t-il quand toutes les cartes de ce château se metteront à changer de places?