Qui sait ce qui se passe réellement aujourd'hui derrière les murs des classes préparatoires ? Accusées de tous les maux – fabriquer des crétins ou désespérer leur jeunesse – ou célébrées comme formation d'" élite " – dans l'oubli de sa contribution à la reproduction sociale –, les " prépas " sont en réalité très mal connues. Cette première enquête ethnographique sur les classes préparatoires vient donc combler un manque et remettre en question nombre d'idées reçues. Au travers d'une analyse très originale de l'" institution préparatoire ", Muriel Darmon nous montre quels types de sujets y sont " fabriqués ". Elle met ainsi au jour les dispositifs de pouvoir qui s'y exercent, la manière dont l'institution produit une certaine forme de violence envers les élèves tout en étant soucieuse de leur bien-être, comment elle opère en individualisant à l'extrême plutôt qu'en homogénéisant et comment, ce faisant, elle renforce sa prise sur les individus.
Je suis vraiment restée sur ma faim. Muriel Darmon donne l'impression de souscrire finalement à un certain discours sur les prépas qu'il aurait convenu de plus interroger : la prépa serait un monde clos et à part, une "expérience de vie" singulière. Si elle montre que la prépa, contrairement à certains stéréotypes, n'exerce pas une emprise totale sur les étudiant.e.s, celleux-ci ne sont jamais comparés à leurs homologues à la fac, en école, en BTS ... De la même façon, le fait que la prépa s'effectue au sein des lycées n'est jamais abordé. Quels points communs, quelles différences avec les trois années précédentes ? C'est particulièrement gênant dans la première partie, sur les conseils de classe, le comportement des profs et de l'administration : je n'ai pas du tout été convaincue par le fait que les discours prononcés tranchent significativement avec le secondaire ou d'autres instances du supérieur. La deuxième partie m'a aussi frustrée : j'aurais aimé trouver une analyse plus poussée des trajectoires, en fonction des origines géographiques et sociales des étudiant.e.s notamment, pendant la prépa et après.
J’ai adoré ce livre puisque la prépa me fascine. Les choses sont abordées avec une grande justesse, sans tomber dans la binarité (ce que n’est définitivement pas la prépa). D’autres sujets auraient pu être abordés, notamment les prépas littéraires (la sociologue n’a étudié que des prépas scientifiques et commerciales), qu’elle n’évoque que dans la conclusion alors qu’il y avait tellement de choses à en dire. (notamment sur le capital culturel, les devenirs de professeurs qui sont bien plus importants, les stigmates, etc)