“Il avait un curieux sourire et plus j'observais l'expression de son visage, plus je sentais qu'il s'apprêtait à lancer un assaut dont il sortirait vainqueur. Le combat qui opposait l'homme et la femme, cette étrange lutte factice dans laquelle chaque femme était seule face à l'homme qui était, lui, barricadé derrière la tradition, la loi et la religion, soutenu par des générations successives et des siècles d'histoires, par une foule d'hommes, de femmes et d'enfants qui avaient les langues aussi acérées que des lames, des canons à la place des yeux et de grandes bouches qui s'ouvraient en mitrailleuses.
L'homme se tenait près de la femme, s'appuyant au monde entier. Il tenait entre ses mains le sceptre de la vie. Le passé, le présent et l'avenir lui appartenaient. L'honneur, le respect et la morale lui revenaient, à lui et à lui seul, ainsi que les médailles de ses conquêtes féminines. En somme, il régnait sur le monde matériel et spirituel. Il possédait même cette goutte de sperme qui allait croître dans le ventre de la femme après la bataille.
Il pouvait choisir de reconnaître ou non sa création, de lui donner son nom et de l'honorer. Il pouvait la condamner à vivre ou à mourir.”