Alan Spade's Blog

October 16, 2025

L'arnaqueur de l'aide à l'armée ukrainienne

Quand Alan Spade se fait arnaquer par une prétendue sniper droniste ukrainienne, c'est avec style. Je souhaite dénoncer auprès des autorités compétentes un brouteur plus dangereux et habile que les autres, un Américain du nom de Scott Hanley. Ce Hanley tente de spolier l'armée ukrainienne de l'aide dont elle devrait bénéficier. Si vous avez une adresse mail où une ressource où je puisse exposer cette personne, merci de me le dire. Je ne suis pas sûr que le site Hoaxbuster fonctionne aux Etats-Unis, et cette personne escroque à mon avis principalement des anglophones. Si vous avez un compte sur le site Hoaxbuster et souhaitez signaler l'arnaque, ce serait une vraie aide. Si vous êtes Ukrainien et que vous souhaitiez prévenir votre communauté, faites-le. 

Oui, c'est vrai, normalement je ne parle pas de moi à la troisième personne. Rassurez-vous, ce n'est pas une habitude que je suis en train de prendre. C'est juste une technique de mise en scène.  
Donc, sur Bluesky, je suis contacté en anglais par cette femme soldat prénommée Victoria. Evidemment, je me demande aussitôt s'il ne s'agit pas d'un brouteur, ces escrocs qui cherchent à tirer parti de la naïveté des gens. Mais si je choisis de lui répondre, c'est que cette guerre en Ukraine pèse quand même depuis un certain temps. Et donc, la possibilité d'avoir des nouvelles directes du terrain est séduisante. Je me dis que c'est sans doute une arnaque, mais que s'il y a une chance sur 100 que ce ne soit pas le cas, je peux au moins le vérifier. 

Quand elle me révèle qu'elle est snipeuse droniste ukrainienne du côté de Kharkiv, la séduction est encore plus forte. L'idée me vient forcément, c'est voulu par l'escroc. Celle de l'inciter à bousiller sa race à cette ordure dégénérée de Poutine, "to put an end to his misery", comme y disent. Et cela viendra effectivement plus tard, dans le courant de nos échanges. A ce moment-là, je lui précise qu'elle va y laisser très certainement la vie, mais que si elle le fait, elle aura sans doute sa statue dans la plupart des villes d'Ukraine. 
Elle me répond qu'elle ne recherche pas la gloire, et qu'elle est prête à se sacrifier. Il faut dire que l'escroc a bien monté son personnage, inventant une ancienne infirmière qui a radicalement changé, passant du slogan "do no harm" à l'engagement direct dans l'armée suite à une frappe russe qui a tué ses parents. 

Vous me direz, ce n'est pas bien d'exploiter une jeune Ukrainienne. Et si Poutine meurt, ce sera le chaos en Russie. La dispersion des armes nucléaires, tout ça. C'est un autre débat, mais pour moi, on ne doit pas ignorer les crimes de masse odieux, les génocides d'un petit caïd juste parce qu'il a un bâton plus gros que les autres. La possibilité de sauver des centaines de milliers de vie, voire des millions, en échange d'un assassinat, fait de ce meurtre du leader adverse un impératif de guerre.  

En tout cas, le récit de l'escroc est cohérent, il a bien fait ses devoirs. Il sait ce qui se passe en Ukraine, il est branché à l'actualité. Il pratique un anglais parfait, sans une faute d'orthographe, ce qui me met quand même un peu la puce à l'oreille, pour une ancienne infirmière ukrainienne. 

Si vous souhaitez juger par vous-même du professionnalisme de cet escroc, qui n'est pas un brouteur ordinaire, je vous invite à vous connecter (sans risques, il n'y a pas de virus) au site miroir d'arnaque qu'il a monté, et de le comparer au véritable site, le site américain de l'aide aux soldats ukrainiens du président Zélensky. Regardez l'URL. Pour moi, c'est du très bel ouvrage. Dites-moi dans les commentaires si vous êtes d'accord. 

C'est précisément en raison de son habileté que j'ai décidé de prendre le temps d'écrire cet article. Des brouteurs doués comme ça, il ne doit pas y en avoir tant que ça. Celui-ci doit être stoppé.

Assez vite tout de même dans nos conversations, apparaît le premier red flag, un indice fort de la véritable nature de l'individu. Ce personnage de Victoria prétend qu'elle n'a absolument aucun ami. Plus tard dans la conversation, elle prétendra que je suis son seul ami. Là, le doute devient nettement plus fort, on est déjà quasiment dans la certitude du brouteur. L'individu qui va sciemment utiliser l'emprise émotionnelle la plus forte possible pour manipuler. 

Ces gens-là ont un point commun avec moi, ils sont là pour vous vendre du rêve. Sauf qu'en ce qui me concerne, je ne trompe pas sur la marchandise. Alors, quand Victoria me dit que l'approvisionnement de son équipe a été coupé et qu'elle a besoin d'argent pour avoir de la nourriture, je fais taire mes doutes, et je dis à ma femme "on va voir". De la même manière qu'au poker, je décide de payer pour voir, mais une somme réduite, 50 €. C'est un peu comme si j'avais acheté un bouquin de 50 € qui assouvirait cette idée de pouvoir offrir une aide directe à quelqu'un sur le terrain, au travers d'un échange personnalisé. La prétendue Victoria m'affirme que l'aide passe par une association américaine, c'est pourquoi sur Paypal, le destinataire de la somme, ce fameux Scott Hanley, est américain. 

Je ne réalise pas bien en payant que si la somme est en dollars, c'est que l'homme se trouve en fait aux Etats-Unis. Aveuglement émotionnel de ma part, je le reconnais. Si j'en avais fait la remarque à l'arnaqueur, nul doute qu'il m'aurait dit que l'équipe aux Etats-Unis est en lien permanent avec l'Ukraine. 

 


J'ai bien sûr aussi la curiosité du journaliste, et de l'auteur, qui me pousse. En raison notamment de son site internet, que je prends pour une simple extension du site officiel, extension dédiée à une équipe particulière opérant sur le terrain, le brouteur, plus doué que les autres, a réussi à semer le doute chez moi quant à sa véritable nature. Je veux voir comment il va étendre sa narration. Je me promets de ne pas aller plus loin s'il demande davantage, et de le faire bosser suffisamment pour qu'il travaille sur cette arnaque, si c'en est une, aussi longtemps que moi si j'avais voulu vendre pour 50 € de bouquins en dédicace. 

Après cela, il va envoyer davantage de messages, augmenter l'intensité émotionnelle dans le but de me faire cracher davantage. Il risque de mourir à tout moment. L'un de ses coéquippiers a été blessé, puis ils se retrouvent dans les marais, à aller pécher pour se nourrir. Il joue sur la culpabilité en me demandant ce que je mange. Il utilise tous les leviers. 

Mais je finis par refuser la nouvelle somme qu'il me demande. Je me mets à glisser des allusions aux escrocs, je lui dis que je déteste les gens qui profitent des émotions pour utiliser le chantage affectif. 
 

Je connais les caractéristiques de ces arnaqueurs. Ils se croient plus intelligents que les autres et méprisent les émotions, pensant qu'ils sont une faiblesse. Je lui explique que les émotions ne sont pas une faiblesse, et je lui prends l'exemple de son personnage de Victoria, devenue plus forte par volonté de vengeance. 

Je sais aussi qu'il me prend pour un looser. Pourquoi? Parce que ces gens-là n'ont pour valeur que l'argent. Le symbole de la réussite et du succès. Je lui explique que l'argent que je gagne est un argent de survie, que je ne dois pas y toucher par devoir pour ma famille. Je lui explique mes valeurs. Que je préfère juste survivre et accomplir mon véritable potentiel, même si la société ne reconnaît pas ce potentiel. 

Puis, je décide de monter à mon tour de plusieurs crans dans l'émotion. Je lui dis carrément que si je devais lui donner 1000 ou 2000€, j'aurais tellement de haine et de mépris pour moi-même que je n'aurais d'autre choix que de me suicider. Que ma mère a déjà perdu un mari, un fils et une fille, et qu'elle ne doit pas perdre un autre enfant. Que mon devoir est de lui survivre. 

Mon but en faisant ça est de le pousser pour vérifier si je vais susciter une véritable émotion, une remise en question pourquoi pas. Je veux lui montrer les dégâts qu'il cause avec ses arnaques. Lui faire comprendre. 

Mais il reste dans son personnage de Victoria. J'ai l'idée, puisqu'il s'exprime très bien en anglais, de lui proposer un partenariat. Il va m'aider à vendre mes livres, ebooks et audiobooks en langue anglaise, et en retour, je lui donne la moitié de mes ventes. Les véritables amis s'entraident, la relation ne doit pas être à sens unique, le rapport gagnant-gagnant, tout ça. 

Pognon, pognon, pognon. Il accepte plus ou moins l'idée du partenariat, mais continue à me réclamer du blé. 

Je sais qu'il me méprise. Je lui demande s'il arriverait, lui, à vendre 15000 livres. Je lui dis d'essayer de le faire. L'idée est de le faire entreprendre une activité productive, et non plus destructive. 

Il fait semblant de monter sur ses grands chevaux, et affirme que ma proposition déshonore l'armée ukrainienne.

Je lui réplique qu'en arnaquant les gens, il jette le discrédit sur les initiatives d'aide à l'armée ukrainienne. 

Et là, j'ai l'idée de vérifier le salaire de son personnage de Victoria. Il m'a dit qu'elle était sergent major dans l'armée en première ligne, il m'a même donné son unité, la 3ème brigade d'assaut, qui existe réellement et opère en effet aux alentours de Kharkiv. Je demande donc à Chat GPT. On est à 4200 € mensuel, plus 2000 € de primes mensuelle. Et il a besoin de pognon pour s'acheter de la bouffe, ainsi qu'à son équipe? 

Et c'est là, quand je lui pose la question, qu'il me sort une énormité. Le salaire des soldats ukrainiens est bloqué jusqu'à la fin de la guerre. Ils ne seront payés que quand celle-ci sera terminée. 

Oh. My. God. Par acquit de conscience, je vérifie bien sûr que ce n'est pas le cas. Vous imaginez, vous, des gars aller se faire trouer la peau en première ligne, dans une guerre intensive, pour des promesses de paiement ultérieur? 

Donc, là, je lui dis que s'il veut apprendre à vendre des livres, il peut fréquenter le forum KBoards.com. Je mets fin à notre partenariat, je lui adresse un dernier Slava Ukraine, je désinstalle l'application zangi, application de messagerie sécurisée qu'il m'avait fait utiliser (et qui faisait partie du conditionnement mental recherché), et je le bloque sur Bluesky.

Et donc, je décide de prendre quand même un peu de temps pour écrire cet article. Parce que ces brouteurs continuent à se faire  beaucoup d'argent sur le dos des âmes crédules. Et là, sur le dos de l'armée ukrainienne, c'est d'une rare obscénité. 

Pour moi, cet escroc est une machine. Je le verrais bien comme un enfant orphelin et n'ayant jamais eu d'amour, mais étant pourtant parvenu à faire des études. Ou comme un trader. Je ne le vois pas du tout en revanche comme agent de la Russie. Même si bien sûr, il fait les affaires de la Russie.  

J'ai accepté de vivre cette expérience de l'intérieur, en ayant comme arrière-pensée de rendre compte si la personne était bien un escroc. C'était bien le cas. Et si cette expérience pouvait inspirer davantage de gens à donner à l'armée ukrainienne, je rappelle ici l'adresse du site officiel aux Etats-Unis. Il y a aussi des sites d'aide en France. Slava Ukraine!  

Dernière mise à jour : j'ai finalement contacté le site original United 24 afin de le prévenir de la fraude.  

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Published on October 16, 2025 08:06

August 21, 2025

Mes livres audio mode d'emploi

Amazon a récemment proposé aux auteurs de vendre, sur amazon.com et via leur filiale Audible.com, leurs ouvrages en version audio en français, en offrant un vrai panel de voix masculines ou féminines. La société de Jeff Bezos met à profit la technologie de voix virtuelle, c'est à dire l'IA, afin de rendre ces adaptations de romans extrêmement rapides pour les créateurs. J'avais été bluffé par la diction en anglais, et, de la même manière, je l'ai été pour la diction en français. A l'instar de mes livres en anglais, j'ai donc décidé d'adapter tous mes romans francophones au format audio. Comme il s'agit de narration virtuelle, je baisse sensiblement les prix de vente : là où un roman de Brandon Sanderson de 9h sera vendu à 18 dollars, Le Souffle d'Aoles, qui représente 13 heures d'écoute, est vendu à un peu plus de 4 dollars. Et Le Vagabond, qui représente 9 heures d'écoute? Seulement 2 dollars. 

Un certain nombre de lecteurs me réclamaient, en dédicace, une version audio de mes romans. C'est donc chose faite. Pour un auditeur français, le mode d'emploi est simple. Même si Amazon et Audible mettent en avant les abonnements, il n'est pas nécessaire de s'abonner au service d'Audible. Il suffit d'aller sur Amazon.com ou Audible.com (Amazon Etats-Unis, le seul site à distribuer mes livres audio), de taper "Alan Spade" si vous n'avez pas le lien, de choisir le livre qui vous intéresse et de cliquer sur l'onglet "livre audio". Tout en bas de cet onglet, vous verrez un bouton "Buy". C'est ce bouton sur lequel il faut cliquer. 



Les prix apparaissent en dollars sur le site américain, mais la conversion est faite sans souci par votre banque au moment où vous payez, et sans démarche de votre part. Si vous étiez déjà sur Audible.fr, votre abonnement ne vous donnera pas accès à mes livres. C'est pourquoi il faut les acquérir à l'unité sur Amazon.com (à moins d'être abonné à Audible.com et non .fr). Il vous faudra ensuite vous déconnecter de l'application Audible sur votre smartphone, puis choisir Audible.com (à moins que ce ne soit Amazon.com, j'ai un doute) au démarrage de celle-ci afin de voir apparaître votre nouvelle acquisition dans votre bibliothèque virtuelle.Si vous n'avez jamais encore fait l'essai du livre audio, l'application Audible est gratuite sur Google Play.Une app extrêmement facile à utiliser. Elle propose le chapitrage des livres, indique le temps total restant ainsi que le temps de lecture effectif et restant sur le chapitre en cours. Elle permet même, si vous jugez la narration trop lente à votre goût, de ralentir ou d'accélérer celle-ci... au risque, bien sûr, d'une lecture un peu trop saccadée dans ce dernier cas. Une fois l'app installée, vous la lancez et choisissez Audible.com pour voir apparaître les romans que vous auriez acheté sur Amazon.com. Voici la liste de mes romans avec les liens vers les livres audio sur Amazon.com (cliquez sur les titres). En cliquant sur "Virtual Voice Sample", vous pourrez écouter un extrait audio, et juger par vous-même de la qualité de l'adaptation.

Le Souffle d'Aoles

Eau Turquoise

Les Flammes de l'Immolé

Le Vagabond

Passager clandestin

Les Nouveaux Gardiens

Memoria

L'Essence des Sens

Pourquoi acquérir mes livres sur Amazon (ou Audible) Etats-Unis et non France? Je pense qu'Amazon a agi de la sorte pour contourner d'éventuels problèmes liés aux syndicats de comédiens en France. 

Je n'aurais personnellement jamais eu les moyens de me payer les services de comédiens pour mes livres audio. De la même manière, si une adaptation vidéo de mes romans devait arriver, la probabilité la plus forte est que cela se fasse de manière virtuelle, par l'IA, sous ma direction. Il faudrait en effet que je vende des millions de romans pour intéresser le milieu du cinéma. On peut toujours rêver, vous allez me dire...

Quelques précisions, à présent, sur mon expérience d'"auditeur de mes propres livres en narration virtuelle". Déjà, par rapport à la fonction d'écoute automatique des ebooks, par exemple en version PDF, la narration virtuelle, c'est cent fois meilleur. Je dirais même qu'au niveau diction, c'est sans doute supérieur à de nombreux comédiens. 

Après, il y a les inflexions, le ton, l'emphase, la prononciation, les liaisons, la rythmique et aussi, ce qu'on pourrait appeler "l'intelligence de narration". Il faut être clair: nous avons affaire à une IA, qui, contrairement à son nom, ne comprend pas ce qu'elle raconte. Il ne s'agit pas d'une voix monocorde, il y a de l'inflexion et de l'emphase, mais beaucoup plus légères qu'avec un narrateur humain. Le ton n'est pas toujours le bon, on ne va pas se le cacher. J'ai également relevé des erreurs, aussi bien au niveau de la prononciation et des liaisons que de la rythmique. Plus quelques bugs.

Alors, pourquoi, me direz-vous, proposer mes livres en audio dans ces conditions? 

Parce que ces conditions restent bien meilleures que la lecture automatique d'un ebook par une voix monocorde. Et parce que j'ai rencontré des lectrices, et lecteurs, qui n'avaient pas le choix, notamment en raison de la baisse de leur vue. Et donc, des lectrices et lecteurs qui écoutent ces voix monocordes. Cela peut aussi être en raison d'un aspect jugé plus pratique du livre audio. 

Pour la trilogie Ardalia, j'ai pas mal joué sur les sonorités en écrivant les romans. Je savais donc qu'une narration virtuelle non guidée pouvait ne pas être appropriée. 

Fort heureusement, Amazon met à disposition des créateurs, dans KDP (Kindle Direct Publishing), le "Virtual Voice Studio". Ce studio permet "d'expliquer" de manière phonétique (non pas avec des symboles phonétiques, mais en utilisant des assemblages de lettres donnant des sons, sans tenir compte de l'orthographe) à l'IA comment prononcer un mot ou une série de mots qui reviennent. C'est très efficace, et ça peut même permettre de corriger des problèmes de liaisons, en plus bien sûr des soucis de prononciation. Il est même possible d'introduire des pauses dans la narration. 

Voici, pour vous faire sourire (et peut-être à l'attention d'Amazon), quelques défaillances ou bugs manifestes que j'ai relevés et corrigés. Heureusement, cela ne concerne que des mots assez peu usités : 

"Rester coi" : l'IA lit "Rester complément d'objet indirect", faisant la confusion avec l'abréviation grammaticale c.o.i.

"A son grand dam:" l'IA lit "A son grand dent", ignorant la signification du mot ancien "dam". 

"Vêtu de pied en cap:"l'IA lit "Vêtu de pied en capitale", confondant "cap" avec les touches du clavier qui sont l'abréviation de lettres capitales (type caps lock).

De manière plus générale, dans les termes porte-manteaux ou inventés que j'utilise dans la trilogie, tels melepeks, grisepeaux, peaudecuir ou tachefleur, l'IA va les lire "melépeks, grisépeaux, peaudécuir ou tachéfleur". Pour corriger la prononciation, j'indique donc en toute lettres "mèleupeks, griseupeaux, peaudeucuir et tacheufleur" dans le virtual voice studio. Je vérifie ce que ça donne, puis j'applique à toutes les occurrences. 

Le travail sur la trilogie Ardalia m'a donc permis de me rapprocher énormément des sonorités voulues, y compris pour les noms propres. Narration virtuelle ou pas, vous aurez ces trois romans dans une version qui se rapproche de ce que j'ai imaginé. 

Quand le vocabulaire est plus usuel, l'IA commet beaucoup moins d'erreurs, même si bien sûr il ne faut pas s'attendre à la perfection. 

Je souhaite donc une bonne écoute à ceux d'entre vous qui souhaiteraient se lancer dans l'aventure!  
 

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Published on August 21, 2025 06:25

June 24, 2025

A truand, truand et demi

Le bouffon orange, Trump, a, malgré tout son épouvantable passif, un mérite. Un escroc sait reconnaître un escroc. Un prédateur sait reconnaître un prédateur. Et donc, Trump a su reconnaître que le régime des mollahs s'efforçait de la faire à l'envers pour toute la communauté internationale, concernant son programme nucléaire. Son unique mérite au cours de son mandat en cours est selon moi d'avoir autorisé, fut-ce de manière illégale, et sans l'aval du Congrès, le bombardement des usines d'enrichissement d'uranium en Iran.

Je pense sincèrement que le but du régime des mollahs, c'était de ne faire découvrir au monde qu'ils possédaient l'arme nucléaire qu'en frappant Israël à l'aide de cette même arme.

L'article du site classe internationale brosse le tableau d'un pays, l'Iran, qui s'est efforcé depuis le shah d'Iran en 1970, d'obtenir l'arme nucléaire.
Et pourtant, dès 1968, l’Iran est l’un des premiers États signataires du TNP, le traité de non prolifération. 
En 1974, Reza Pahlavi s'efforce de faire avancer le nucléaire civil en se dotant auprès de la France de quatre réacteurs nucléaires. L'Iran est alors contrainte de signer un accord de garantie avec l'AIEA. Mais dès les années 1970, le shah mène un programme secret de nucléaire militaire. 
A son arrivée au pouvoir, Khomeny se débarrassera de ce programme, mais pour le reprendre dès 1980, constatant l'intérêt de la dissuasion nucléaire suite à la guerre menée par l'Irak contre l'Iran. 
Dès 1985, le Pakistan fournit à l'Iran des centrifugeuses, lui permettant de faire avancer son programme nucléaire militaire. 
En 1989, Khomeny accélère ce programme grâce à un accord avec l'Union soviétique. Accord finalement rompu en 1994 après que Bill Clinton ait confronté Boris Eltsine sur ses ventes de centrifugeuses à l’Iran.

S'il y a un paragraphe du site classe internationale qui retient l'attention, c'est celui-ci : 

Le 14 août 2002, Alireza Jafarzadeh, un dissident iranien exilé issu du groupe d’opposition Organisation des moudjahiddines du peuple iranien (OMPI), révèle que la République islamique a construit deux sites nucléaires à l’insu de l’AIEA : une installation d’enrichissement de l’uranium à Natanz (Ispahan) et une installation à l’eau lourde à Arak (Markazi). Ces deux technologies permettraient à l’Iran d’acquérir l’arme nucléaire. Entre 20 et 30 kg d’uranium enrichi (ou uranium 235) sont nécessaires pour construire un missile nucléaire. Quant aux réacteurs à l’eau lourde, ils peuvent produire chaque année entre 9 et 10 kg de plutonium, alternative à l’uranium 235, un missile nécessitant entre 6 et 10 kg de plutonium. Ces technologies, que ce soient les plans, pièces détachées ou centrifugeuses, ont été fournies par le Pakistan dès 1985. Abdul Qadeer Khan, père du nucléaire pakistanais, avoue en effet avoir doté l’Iran et la Corée du Nord de leurs premières centrifugeuses. En tant qu’État non partie au TNP, le Pakistan échappe à l’interdiction faite aux États parties d’aider les États signataires non dotés de l’arme nucléaire à l’acquérir. En revanche, l’Iran peut être condamné en vertu de l’article 2 du Traité pour avoir accepté une telle aide du Pakistan. En février 2003, le président iranien Mohammad Khatami confirme les suspicions des États parties au TNP en avouant l’existence de sites destinés à enrichir l’uranium en plus de ceux de Natanz et Arak : Ispahan et Yazd. C’est à partir de cette date que les États-Unis, l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France, conjointement avec le directeur général de l’AIEA Mohammed El-Baradei, entreprennent de faire signer à l’Iran le protocole additionnel aux accords de garanties de 1997.

L’Iran et ses relations extérieures en 2003

En 2003, les motivations de l’Iran à se doter de l’arme nucléaire vont au-delà de la simple dissuasion qu’il pourrait exercer sur ses voisins.

L'Iran du Guide suprême Ali Khamenei signe en 2003 le protocole additionnel du Traité de non prolifération. 

Sur Wikipédia, on apprend le contexte et les détails de la signature du traité de Vienne en 2015, négocié et signé par Obama et Khamenei. Le traité limite le programme nucléaire iranien en échange d'une levée des sanctions internationales contre l'Iran. 

En 2018, Trump déchire l'accord en se désengageant. Ce qui permet à l'Iran de reprendre son programme. 

Mais le régime des mollahs avait-il jamais vraiment abandonné son programme? L'Iran aurait dépensé 2000 milliards de dollars pour son programme nucléaire. Le seul traité de Vienne aurait-il permis d'interrompre un tel immense investissement? Malgré toute cette tradition, toutes ces décennies de développement secret de l'arme?

Il y avait des inspecteurs de l'AIEA, mais ça n'a pas empêché l'Iran de construire l'usine secrète de Fordo sous la montagne. Un projet sans doute pharaonique. 

Et donc, pour moi, l'instinct de Trump, et les renseignements du Mossad étaient les bons: il fallait interrompre ce programme par une action militaire. 

Une action illégale, donc, et sans l'accord du Congrès. Mais pour un pays comme Israël, c'est une question de survie. L'Iran est à un an ou un an et demi de posséder l'arme nucléaire. Ou en tout cas l'était, avant les frappes.

Si l'on compare à une autre action illégale, celle de Poutine, on a un Etat russe qui attaque illégalement un Etat respectant les règles internationales, l'Ukraine. Là, avec les Etats-Unis, c'est un pays attaquant illégalement un Etat ne respectant pas les règles internationales, et développant la plus terrible des armes. Donc oui, c'est illégal, mais vous savez ce qu'on dit: "nécessité fait loi". Et là, en l'occurrence, c'est la nécessité de la survie pour Israël. Là où Poutine doit être combattu avec une grande force, puisque lui aussi menace la survie d'un Etat, l'Ukraine. Trump ne menace pas la survie de l'Iran.

Alors, évidemment, Trump n'a pas agi par bonté d'âme, mais pour restaurer son ego meurtri par : 

- le meme TACO (Trump always Chicken Out, Trump cède toujours à la trouille)

- ses lamentables échecs diplomatiques précédents, que ce soit avec l'Ukraine et la Russie ou avec l'Iran

- l'affaire Epstein

- le désastre DOGE et le conflit avec Musk

- la calamiteuse gestion de l'immigration, et l'envoi de la Garde nationale en Californie

- etc.

Un petit mot sur l'Iran. Il s'agit d'un Etat islamique depuis 1979, avec une constitution qui proclame notamment, je cite: "l’armée islamique et les forces de sécurité auront pour mission non seulement de protéger les frontières, mais également de porter le drapeau de la mission idéologique de l'État, à savoir le djihad pour Allah, dans le monde entier." L'armée islamique et les forces de sécurité, notez bien. On peut donner au djihad une connotation non guerrière. Mais pas en y associant les mots d'armée et de forces de sécurité. Les dictateurs annoncent toujours ce qu'ils font. Parfois, ils l'écrivent. Il faut les écouter. Et il faut savoir lire.

Pour moi, d'ailleurs, la constitution de l'Etat islamique d'Iran est illégale vis-à-vis de la Charte des Nations Unies. Pas en raison du caractère théocratique de l'Iran islamique, mais bien en raison de son caractère éminemment agressif.

Observons à présent le rapport nucléaire des deux pays, Israël et l'Iran. Israël n'a jamais signé le traité de non prolifération. Israël ne s'est jamais servi de l'arme nucléaire contre un autre pays. La doctrine d'Israël est une doctrine classique d'"Etat perché", un Etat se servant de l'arme nucléaire comme outil dissuasif. 
L'Iran a signé le TNP, mais que ce soit sous le shah ou avec Khomeny, a toujours cherché à développer l'arme nucléaire en secret. 

Si l'Iran avait voulu devenir, au même titre qu'Israël, un Etat perché, ils n'avaient qu'à se retirer du traité de non prolifération pour développer l'arme.Mais l'Iran, en restant dans le traité, en laissant l'AIEA faire ses vérifications tout en développant en secret l'arme atomique, montrait clairement une duplicité, qui est le signe, au niveau psychologique, d'une intention malveillante. Endormir l'ennemi pour que le réveil soit le plus terrible possible. 

Ce qu'a fait Trump, c'est faire goûter à l'Iran des mollahs de sa propre médecine. Trump a fait croire à l'Iran qu'il ne ferait rien, avant de frapper un coup suffisamment décisif pour retarder le nucléaire militaire iranien de plusieurs années. C'est un succès d'autant plus brillant pour Trump que c'est le seul de son mandat 2025, absolument catastrophique. Mais l'avenir dira si ce n'est pas un succès qui va se retourner contre lui.

On peut penser que les frappes israéliennes et américaines combinées ont coûté des milliards, voire des centaines de milliards de dollars à l'Iran. Pour Khamenei, qui a 86 ans, c'est une baffe monumentale. L'une de celle dont aucun dirigeant ne peut se relever. Et il est même probable que son fils ne lui succède pas. 

Les mollahs sont déjà en train de choisir leur prochain guide, les événements ayant précipité la préparation de la succession. 

Est-ce que l'affaiblissement du régime sera suffisant pour inciter le peuple à se révolter? Je crois personnellement qu'il faudra une révolte passive très forte, une asphyxie progressive de l'économie iranienne par la passivité des travailleurs iraniens pour faire tomber le régime. Et donc, c'est avant tout au peuple de trouver la solution. Même si une action extérieure peut parfois aider.  

Le peuple iranien a d'autant plus intérêt à se révolter que si un jour, le régime des mollahs nucléarise Israël, la riposte nucléaire contre l'Iran sera inévitable.  

[EDIT 25/06/2025] Un rapport de personnes chargées d'évaluer les dommages aux centrifugeuses semble établir que celles-ci auraient échappé à la plupart des dégâts liées aux bombardements de Fordo. C'est une éventualité à prendre en compte, puisque le renseignement américain sur les endroits précis où faire les frappes pouvait ne pas être le bon. Etant donné les enjeux, c'est une information qui demande bien évidemment à être vérifiée. Ce type de bombe n'avait été utilisé qu'une fois en Afghanistan. Pour moi, cette opération, même si elle devait être un échec, montre la capacité des Américains à frapper sans être vus, et donc, c'est une épée de Damoclès qui va continuer à peser sur le régime. Tout va dépendre à présent de la qualité des renseignements concernant ces centrifugeuses.  

 

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Published on June 24, 2025 07:55

June 4, 2025

Le ping, un sport de schizo

Le ping, quelque part, est un sport de schizophrène. En tout cas pour les joueurs qui entendent en faire une profession.

En tant qu'ancien petit joueur de club, j'ai gardé l'impression de l'importance du club. De mouiller le maillot pour le club, un peu comme en foot. J'ai joué principalement au stade de la départementale (au niveau le plus faible) au TT Manosquin dans les années 80 (le club a changé de nom depuis). Le président du club s'appelait Monsieur Vincent. J'ai eu la chance et le privilège d'être entraîné par Christophe Lebrun, frère aîné de Stéphane, qui n'est autre que l'un des oncles des fameux frères Lebrun.
En anglais, on aurait pu dire de Christophe "he's a natural". Ou si vous préférez : il a les gènes du ping. Limité par un souffle au cœur, il n'a jamais été mieux classé que 30 (à ma connaissance). Pas trentième, 30. Son frère Stéphane a été quant à lui 7ème joueur français. Je garde un excellent souvenir de mon passage en club, et de cette formation. 
Christophe Lebrun, entraîneur du TT Manosquin à l'époque où j'y étais Peu de clubs en France ont les moyens de payer un salaire à leurs joueurs. Mais pour les joueurs qui en bénéficient, ça se tient de mouiller le maillot pour le club, et de lui rester fidèle: ces clubs vont offrir aux joueurs pro le plus de stabilité financière. En Bundesliga, Timo Boll touchait 500 000 euros par an. Des stars moins connues pouvaient toucher plus de 150 000 euros par an. Régularité. Stabilité.On vient d'apprendre que l'ancien numéro 1 mondial chinois, la médaille d'or des JO 2024 Fan Zhendong, venait de rejoindre le club de Sarrebruck . C'est dire le besoin de stabilité d'un joueur malmené par le circuit international de la WTT. Les clubs de ping ont même créé la ligue des champions, ce qui pourrait donner l'impression de se rapprocher du modèle du foot, avec un nom extrêmement prestigieux.  Mais en réalité, le ping partage avec le tennis le même ADN de sport individuel. Ainsi, il faut savoir que les matches de ligue des champions de ping, qui sont des matches de club, n'engrangent aucun point de rang international pour les joueurs. Ce sont donc des matches qui vont encombrer le calendrier sans pour autant permettre un meilleur classement, et donc d'accéder à de meilleurs tournois. Là où les matches de circuit WTT et les matches de compètes internationales reconnues par l’ITTF (JO, championnats du monde...) permettent à la fois un meilleur classement et un plus grand prestige, tout en offrant la possibilité d'affronter les meilleurs joueurs du monde. Mais là où le bât blesse, c'est dans la dotation de ces tournois. Les deux plus importants tournois de ping sont dotés à 3 millions de dollars, là où Roland Garros 2025 est doté à plus de 56 millions d'euros. Le WTT Champions de Montpellier, par exemple, était doté à 460 000 €. Mais avec le ping, les sommes baissent très très vite dès que l'on parle de Contender ou de Feeder (les différents échelons du circuit). Les lecteurs de ce blog se souviennent de l'article intitulé " Scandaleux " que j'avais écrit au sujet de la rémunération des tournois WTT. Et donc, la plupart des joueurs de ping pro restent dépendants de leur club pour leurs revenus, ce qui crée une situation davantage schizophrénique que complémentaire: les joueurs attirent du prestige sur leur club en participant au circuit international, certes, mais la WTT exige une participation minimale aux meilleurs joueurs, ce qui ne peut manquer de créer un fossé avec les clubs et le public qui suit les compètes de club. J'ai posé la question suivante à Chat GPT : "dans quelle mesure le circuit WTT, en imposant des règles de participation à ses tournois pour les meilleurs joueurs, ne se met-il pas en compétition avec les championnats de clubs?"Réponse : Excellente question : tu touches à un point de tension réel dans le tennis de table mondial actuel. Le développement rapide du circuit WTT (World Table Tennis), avec ses règles de participation strictes pour les meilleurs joueurs, entre clairement en concurrence avec les championnats de clubs, notamment en Europe (Bundesliga, Pro A, ETTU Champions League). Voici une analyse détaillée.🎯 Les règles imposées par le circuit WTTDepuis sa refonte en 2021, le circuit WTT a :- centralisé les tournois internationaux ITTF dans une nouvelle structure plus médiatisée et lucrative (WTT Contender, Star Contender, Champions, Grand Smash)- imposé des obligations aux meilleurs joueurs, par exemple : Obligation de participer à un certain nombre de tournois WTT pour être éligible aux WTT Finals et aux points ITTF. Réduction des wildcards et introduction de restrictions d’inscription (classement minimum requis, quotas de joueurs par pays, etc.). Certaines fenêtres de tournoi sont fixées dans des calendriers bloqués, incompatibles avec les matchs de clubs.⚔️ Tensions avec les championnats de clubsEn quoi le WTT est en concurrence directe :Tension ⏰ Conflits de calendrier Les meilleurs joueurs doivent parfois choisir entre leur club et un tournoi WTT, car les dates se chevauchent (notamment les WTT Champions et Grand Smash).⚖️ Risque de surcharge physique Le rythme WTT est intensif et mondial (Asie, Moyen-Orient, Europe), ce qui limite la disponibilité des joueurs pour les matchs de championnat hebdomadaires.💰 Incompatibilité financière potentielle Certains clubs paient cher des joueurs vedettes… qui manquent des matchs clés car ils privilégient leur carrière WTT.🎟️ Perte d'attractivité locale Pour les spectateurs des championnats nationaux, voir des stars absentes ou peu impliquées nuit à l'intérêt du public et des sponsors.🤝 Mais aussi des convergences et adaptationsCertaines structures trouvent des compromis :Adaptation Exemple :📆 Clubs adaptent le calendrier Des clubs comme Düsseldorf ou Chartres laissent partir leurs stars (ex. Boll, Gauzy) sur les WTT, quitte à faire tourner l’effectif.🤝 Accord verbal ou contractuel Les clubs et joueurs fixent à l’avance les priorités de présence, souvent autour des phases décisives (playoffs, Ligue des Champions).🌍 WTT module son calendrier Le WTT évite parfois certains créneaux clés (comme pendant les Championnats Nationaux européens).💡 En résuméAspect WTT Championnats de clubsObjectif Développer une ligue mondiale avec prestige et points ITTF Stabilité financière et compétition collectivePublic ciblé International, sponsors globaux Régional/national, abonnésFlexibilité Moindre : présence imposée pour classement Moyenne : dépend des clubsTension ? ✅ Oui, croissante ✅ Oui, en particulier avec les grands clubs🔮 Vers une "WTT-first generation" ?La tendance actuelle pousse les jeunes talents à privilégier le circuit WTT, surtout pour : Gagner en visibilité mondiale. Monter au classement ITTF. Se qualifier pour les JO et mondiaux. Mais cela crée une fracture avec les clubs, surtout ceux qui misent sur la régularité des meilleurs joueurs.
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Published on June 04, 2025 09:10

April 30, 2025

Les trois corruptions de l'entrepreneur

En tant qu'auteur autoédité, je suis un entrepreneur qui n'emploie que lui-même. Je noue bien sûr des partenariats artistiques et commerciaux. Même si je peux mettre en compétition différents prestataires, mon business repose avant tout sur la coopération. Cela me met de facto à l'abri des trois formes de corruption susceptibles de toucher l'entrepreneur. C'est d'ailleurs l'un des avantages de ma situation: me permettre de poser un regard critique sur le monde du travail. 

La première des corruptions dont est susceptible d'être victime l'entrepreneur disposant d'employés dans sa compagnie, c'est de se croire supérieur à ses employés parce qu'il les a embauchés. A partir du moment où leur niveau de vie ou leur statut (et notamment pour les cadres) dépend de lui, l'employeur va se sentir intrinsèquement supérieur. Ça n'arrive pas pour tous les employeurs, bien sûr, mais c'est une tendance qui les guette d'autant plus dans les périodes de crise où le chômage est élevé, et où ils sont en situation de monopole ou quasi monopole dans leur branche.
Même dans des cas où le rapport de force est plutôt favorable à l'employé, qui peut démissionner et retrouver du travail ailleurs, le salaire de l'employeur étant plus élevé que celui de l'employé, l'idée de supériorité du patron est toujours à l'arrière-plan. Et d'autant plus si lui-même a tendance à considérer ses employés comme des larbins plutôt que comme des membres de sa famille étendue. A faire preuve de malveillance plutôt que de bienveillance.

La deuxième des corruptions de l'entrepreneur, c'est de se croire supérieur à ses employés parce qu'il peut les virer. A partir du moment où un employeur prend plaisir à virer ses employés, par exemple en paradant dans ses locaux avec un évier comme Elon Musk, on peut être sûr qu'il est victime de cette corruption. Autre élément de preuve, le fait de licencier en si grand nombre que l'on est obligé de réembaucher derrière. Là, on est clairement dans la jouissance du pouvoir sur des vies et des destinées d'employés. Ce pouvoir est d'autant plus manifeste que les salariés se sentent démunis, sans possibilité d'avoir recours à des syndicats ou de démissionner. En d'autres termes, ce pouvoir ne provient que de ce que les salariés sont prêts à concéder à l'employeur. De leur soumission. Le pouvoir n'est jamais à sens unique. C'est un échange dynamique s'inscrivant dans la dialectique du maître et de l'esclave. 

La troisième des corruptions de l'entrepreneur, c'est de se croire supérieur non seulement à ses employés, mais aussi au reste de la société. Cela se manifeste par du chantage à l'emploi auprès du gouvernement afin d'améliorer ses marges bénéficiaires. La corruption est telle, à ce stade, que l'entrepreneur va s'engager dans des manœuvres de lobbying afin de faire pression pour, de manière classique, faire baisser les charges et impôts dont est redevable sa compagnie. Ce type d'employeur succombera aussi à la tentation de la collusion d'intérêts avec ses pairs pour fixer les prix à un certain seuil, aux dépens du consommateur. L'un des exemples qui vient à l'esprit est la collusion des éditeurs sur le prix des ebooks. 

Quant au chantage à l'emploi, les exemples sont multiples, mais l'un des plus flagrants est celui de l'un des hommes les plus riches du monde, Bernard Arnault, qui a menacé de faire migrer ses entreprises aux Etats-Unis. Imaginez la haute couture à la française, Dior sans aucun employé ou créateur français, mais que des Américains. Ça semble si absurde, la rupture de l'image de marque de ces compagnies serait si complète qu'on a envie de dire à Arnault: "vas-y, fais le mon grand ! Ton départ sera l'opportunité d'un futur concurrent."

Les moyens de lutter contre ces corruptions? Faire en sorte que les gouvernements eux-mêmes soient incorruptibles, et que les candidats à la présidentielle ne bénéficient que de dons de particuliers et non d'entreprises. Faire en sorte de casser tous les monopoles, afin de permettre aux employés de démissionner pour se faire employer par la concurrence dès qu'ils se sentent rabaissés. Favoriser les petites entreprises, auto entreprises et artisans via des charges allégées et un allègement considérable de la paperasse et des formalités. Donner à des agences gouvernementales comme Pôle emploi des compétences syndicales, de défense des employés afin de mieux protéger les travailleurs des PME et des grandes entreprises dépourvues de syndicats. Et pourquoi pas, d'ailleurs, en lien avec l'inspection du travail, la médecine du travail et la justice. 

Les entreprises ressemblent encore trop souvent à de mini dictatures où c'est le psychopathe ou le pervers narcissique qui est récompensé et promu. Où règne le harcèlement, parfois jusqu'à conduire des employés au suicide. Il y a énormément à faire pour promouvoir la démocratie en entreprise. Ça passe forcément par un moindre pouvoir, ou un pouvoir plus encadré de l'entrepreneur.

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Published on April 30, 2025 06:47

April 23, 2025

L'Essence des Sens : épilogue

Et nous arrivons finalement à l'épilogue de mon dernier roman de Science-Fiction, L'Essence des Sens. Une expérience de partage d'écriture qui n'aura occasionné aucune remontée des ventes du roman. Dans un univers de surabondance culturelle, c'est une nouvelle preuve que ce qui n'est pas directement monétisé est souvent considéré, consciemment ou non, comme n'ayant aucune valeur. Je pense que pour faire prendre conscience aux gens de ce qui compte pour eux, il faudrait supprimer Internet pendant au moins une journée. On pourrait appeler cela la Journée des Créateurs. De la prise de conscience massive qui s'ensuivrait, l'idée déjà bien présente selon laquelle il faudrait se diriger vers un revenu universel inconditionnel, seul à même de démultiplier les richesses gratuites présentes sur Internet, pourrait se renforcer grandement. 

Epilogue 

Le petit cube doré était étonnamment lourd au milieu de sa chaîne. Après lui avoir mis autour du cou le cubar miniature, Belganov fit l’accolade à Lucinda. 

« Quand nous nous sommes rencontrés il y a deux ans et demi, dit-il, je n’avais que peu d’espoir que vous seriez à même de m’aider dans ma tâche. Citoyenne d’honneur Lucinda Vels, sachez que vous avez dépassé toutes mes espérances. Vous m’avez donné le pouvoir d’endormir par simple contact les nanites ektrim. Mieux encore, le casque que nous avons mis au point ensemble a protégé durablement le citoyen Jaynak, de la 574e strate. Le héros qui allait nous permettre, en mettant nos efforts en commun, d’identifier enfin ce parasite ektrim. Et avec l’aide de la Confédération des Planètes Unies, nous avons ensuite pu réaliser une contre-mesure efficace. Vous avez changé à jamais le destin de notre peuple, c’est pourquoi ce titre de citoyenne d’honneur n’est qu’un faible témoignage de notre reconnaissance. » 

Les drones-cam qui retransmettaient la scène dans tout le système flottaient autour de Belganov et Lucinda dans la salle du trône du Palais de la Première Strate. Six mois s’étaient écoulés depuis la Bataille de la Libération de Nadar. Les pertes nadariennes avaient été si lourdes que la société en était transfigurée. 

« Premier Coordonnateur, répondit Lucinda, vous me faites un très grand honneur. Je chérirai ce titre de citoyenne d’un peuple qui a montré le plus admirable des courages devant l’adversité. 

– Nous aiderez-vous encore, citoyenne ? Depuis que nos compatriotes ont réalisé l’ampleur de la trahison des Ektrims, une trahison qui les a touchés dans leur intimité la plus profonde, celle de leurs pensées, beaucoup ont peur de l’avenir. Ils craignent de se retrouver victimes du même complot pernicieux, un jour ou l’autre. Nous aiderez-vous en fondant une succursale de votre société Vels & Compagnie sur Nadar ? Pour nous permettre de nous protéger, aujourd’hui comme demain ? 

– Je vous le promets, Premier Coordonnateur. A vous et à tous vos concitoyens, que je considère désormais comme mes frères et sœurs. » 

Lucinda afficha un sourire rayonnant. La question posée par Belganov n’était bien sûr pas une surprise — tout avait été préparé. Les plans pour la succursale étaient prêts. Lucinda, avec l’accord de Belganov, travaillait depuis plusieurs mois déjà sur le projet. 

Le traumatisme collectif infligé par les Ektrims et les Fengirs aurait sans doute provoqué un dramatique repli sur soi des Nadariens, si la Confédération des Planètes Unies ne s’était portée à leur secours. La peur de se retrouver manipulés de nouveau à leur insu affectait toutes les strates de la société. L’argelen, cette roche merveilleuse, incroyable, ne suffisait pas. Les citoyens désirant se prémunir contre l’intrusion de nanites en s’implantant d’autres nanites, dont ils maîtriseraient toutes les fonctions, s’avéraient beaucoup plus nombreux qu’on ne l’aurait cru au début. Il y avait là un vrai marché. Ce n’était pourtant pas la course aux crédits qui attirait Lucinda — elle était déjà démesurément riche. Le sentiment de redonner le contrôle de leur destin aux Nadariens était un puissant aiguillon. 

Belganov lui souriait, et elle hocha la tête en lui rendant son sourire. Qui aurait cru qu’elle aurait pu nourrir ce genre de pensées, elle la « Tradi », si attachée à sa propre intégrité physique et surtout intellectuelle ? La vie était décidément pleine de paradoxes. 

*** 

« Tu crois que Merek a exagéré son récit ? demanda Naldeia. Deux jours à la dérive dans l’espace ! 

– Il a dit vrai sur ce coup-là, répondit Jaynak. J’avais vérifié les données auprès de Shaella elle-même peu après la bataille. Son Retaliator avait bien été désactivé par un canon à ion peu après qu’il ait détruit un Zarin. Plus aucune communication. Comme il était parti à la dérive, il a été jugé inoffensif par les belligérants. Les débris sont ensuite devenus tellement nombreux qu’il a fallu du temps, et de la chance, pour le retrouver en vie. Son système de survie vivait ses derniers moments, et lui aussi, du coup. » 

Jaynak contempla Ulicron la bleue, qui emplissait tout le cockpit du transporteur à présent. Naldeia et lui avaient passé la soirée de la veille chez Merek, évoquant la Bataille de la Libération telle que chacun l’avait vécue six mois plus tôt. Jaynak n’avait pas eu grand-chose à dire en ce qui le concernait. Belganov avait tenu à ce qu’il reste sur Nadar, estimant qu’il avait épuisé ses réserves de chance au cours de ses aventures précédentes. Il avait donc observé depuis la console de ses parents, focalisé en particulier sur les relevés du Rapier, où se trouvait Naldeia. Leurs retrouvailles après la victoire avaient été inoubliables, et les célébrations sur la planète, euphoriques. Nadar était maintenant candidat officiel à l’intégration dans la Confédération des Planètes Unies, et bénéficiait de démarches administratives accélérées. Les arrivées d’autres espèces sur la planète, parmi lesquelles celle des humains, se faisaient plus fréquentes. Comme il leur était difficile de visiter les cités elles-mêmes en raison de leur gravitation particulière, des centres touristiques avaient été bâtis aux emplacements où se trouvaient certains des bâtiments des Fengirs. 

Le transporteur se posa dans le spatioport d’Uls. La lune possédait une atmosphère compatible avec le système respiratoire des Nadariens, qui y bénéficiaient d’une gravité moins forte et pouvaient évoluer par bonds. Naldeia et Jaynak traversèrent les couloirs du spatioport avant de rejoindre par navette la cité minière. Autour d’eux, il n’y avait que droïdes, drones et androïdes. Depuis le Grand Dévoilement — ainsi avait été baptisée la révolution nadarienne —, Ulicron exploitait toujours son tirinium, mais sans plus se servir de prisonniers reconvertis en esclaves. L’ambiance était industrieuse, mais froide. 

Le glisseur déposa Naldeia et Jaynak devant le Centre du Recueillement. Surmonté d’une double coupole, le bâtiment était aussi imposant que lumineux. A l’intérieur flottait une odeur de sengré allégé. Jaynak avait sélectionné un nom sur sa tablette. Lui et Naldeia avaient ensuite pris place dans un bipode. Celui-ci fila le long des corridors, prit des embranchements à vive allure, avant de ralentir, puis de s’arrêter. 

Jaynak sentait sa compagne nerveuse. Il serra sa main dans la sienne, et ensemble, ils franchirent le seuil. Comme la plupart des salles de ce qui était un véritable musée, celle-ci possédait des appareils de minage authentiques, ainsi que des blocs de tirinium. Elle était également équipée des différents projecteurs permettant de simuler une réalité virtuelle. Pour l’heure, les fonctions holographiques n’étaient pas activées. Le personnage qui se tenait à quelques pas était bien réel, et il sembla à Jaynak qu’il avait perdu de sa carrure. Son séjour dans le Cœur d’Argea devait y être pour quelque chose. Surveillé en permanence par trois drones de surveillance-répression, Grendchko les toisait avec sa malveillance coutumière. 

L’individu avait perdu une chose en plus de son poids — son arrogance, remplacée par de la servilité. Naldeia retira sa main de celle de Jaynak et croisa les bras, se plaçant en face du Premier Coordonnateur déchu et le fixant dans les yeux. « Comment se passe ton stage de Remise sur la Voie ? » demanda-t-elle.  

Grendchko se contenta d’un geste impuissant. 

« Tu n’as pas envie de me violer ? Je ne suis pas armée, vas-y ! 

– Je… ce n’est pas permis », croassa-t-il. A son timbre de voix, il était évident qu’il n’avait plus l’habitude de parler. 

Jaynak soupçonnait que si le billet pour Ulicron n’avait pas été si onéreux, ses anciennes victimes auraient fait la queue pour venir lui rendre visite. Les drones SR ne servaient pas seulement à surveiller Grendchko, mais aussi à neutraliser tous ceux qui auraient été tentés de se faire justice. 

Jaynak s’approcha d’une console, et composa le nom de Lorckcho. « Journée typique », articula-t-il. Aussitôt, leur ancien compagnon d’infortune apparut. Aminci, les yeux exorbités, la bave aux lèvres, sous emprise, il marchait dans le couloir d’une mine, son extracteur à la main. Grendchko, Naldeia et Jaynak ne voyaient que lui, avaient l’impression d’être Lorckcho tout en le contemplant de l’extérieur, tant la simulation était immersive. Quand Grendchko essayait de fermer les paupières, une décharge électrique en provenance d’un drone les lui rouvrait. Lorckcho titubait, parfois. Ses yeux étaient entièrement jaunes. Les trois Nadariens suivirent chacun de ses mouvements pendant des minutes qui ressemblaient à des heures. Parvenu à un gisement de tirinium qu’éclairait un drone, Lorckcho activa son extracteur. Il découpa, et une fois les blocs détachés, le drone qui l’accompagnait les emprisonna dans un champ magnétique, puis les plaça dans une large hotte que portait le misérable détenu. En dépit de la gravité moindre, les jambes de celui-ci fléchirent sous le poids. Puis il s’écroula. Il mit plusieurs minutes à réussir à se relever en haletant, plus hébété que jamais. 

Naldeia et Jaynak avaient les larmes aux yeux. Grendchko, quant à lui, considérait la scène avec une moue méprisante. Lorckcho se mit à marcher péniblement sous sa charge. La holosim semblait devoir se prolonger indéfiniment. 

Naldeia et Jaynak n’eurent pas le cœur de poursuivre jusqu’à la mort par overdose de leur compagnon. 

« Tu sais qui est ce prisonnier ? demanda Jaynak. 

– Non, citoyen, répondit Grendchko. 

– Quelle politesse, de ta part ! dit Naldeia. Je suppose que ce sont ces charmants drones qui se sont chargés de te l’inculquer. 

– Il s’appelait Lorckcho et était l’un des citoyens condamnés à ton fameux Stage de Remise sur la Voie pour s’être trouvé dans les Cavernes d’Ambre d’Argea au mauvais moment, l’informa Jaynak. Souviens-toi bien de son nom. Ton Adepte, Ymeo, l’avait jugé inapte et l’avait fait transférer dans les mines d’Ulicron. 

– C’est à elle que vous devriez vous en prendre, alors. Pas à moi ! 

– Oui, tu es innocent du crime dont on t’accuse, bien sûr, dit Naldeia. 

– On dit qu’on peut mesurer le degré de civilisation d’un peuple à la manière dont il traite ses prisonniers, fit Jaynak. Tu as été jugé coupable de la plupart des charges retenues contre toi, dans les procès auxquels tu as eu à faire face. Condamné à devenir guide touristique ici, gardien de la mémoire des tourments que toi et tes sbires avez infligés. J’espère que tu mesures bien la différence avec ce qu’était devenue la civilisation de Nadar sous ta direction. J’espère que tu comprends où se trouve la vraie grandeur. 

– Je crois que tu espères beaucoup, mon amour », dit Naldeia. 

Jaynak prit la main de sa compagne, et ils firent demi-tour. Peu avant de franchir la porte, Jaynak se retourna en direction de Grendchko. « Nous ne te souhaitons pas bonne chance dans ta nouvelle vie. »

Le résumé de ce chapitre, commenté

par deux voix de l'IA en anglais.

 

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Retrouvez les cinq premiers chapitres en cliquant sur ce lien.

 
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Published on April 23, 2025 08:32

April 14, 2025

L'Essence des Sens : chapitre 42

A titre expérimental, j'ai décidé de faire paraître un nouveau chapitre de mon dernier roman, L'Essence des Sens (Science-Fiction), sur ce blog chaque semaine. Voici le quarante-deuxième.  

42. Rétribution 

 « Les rapports des espions de la Confédération sont formels, dit Naldeia. Les forces de l’Expansion font mouvement. La IIIe, la Vème, la VIIe et la IXe flotte. De deux choses l’une. Soit il s’agit d’un leurre et les Ektrims et leurs alliés Zayborgs et Fengirs vont attaquer ailleurs. Soit ils se dirigent vraiment sur Nadar pour y semer la destruction et y récupérer un maximum de ressources. Si c’est bien leur plan, dans un second temps, ils mettront le cap vers Quantor, où les attendent d’autres réserves de trinocium et denorium. L’amirauté de la Confédération des Planètes Unies croit en cette seconde hypothèse. Elle pense que les espions ennemis se sont laissés endormir par les rumeurs de massification de la flotte de la C.P.U. dans les secteurs les plus stratégiques du quadrant. En résumé, Coordonnateur, d’après l’amirauté, l’Expansion a bel et bien l’intention de faire de Nadar un exemple. 

– Et donc, la Confédération nous demande l’autorisation de pénétrer en masse dans notre système ? » 

Par delà les années-lumière, l’hologramme du Coordonnateur Telnov regardait Naldeia d’un air martial. L’homme avait les épaules larges. Au-delà de sa rigidité toute militaire, de l’intelligence brillait dans l’éclat bleuté de ses yeux. Il donnait le sentiment de la compétence. 

« C’est exact, Coordonnateur. L’arrivée des flottes ennemies dans notre système serait une question de jours tout au plus. 

– Vous avez l’autorisation. Que les strates de nos ancêtres nous soient favorables. 

– Elles le seront, Coordonnateur. Je vous transmets les coordonnées des points d’entrée prévus de l’ennemi, et ceux de notre flotte. » 

Naldeia salua, puis mit fin à la communication avant d’envoyer les données par un canal ultra sécurisé. Un mois en temps galactique universel s’était écoulé depuis que le croiseur ektrim avait manqué anéantir toute vie sur Nadar en cherchant à s’en prendre à Altanis. Jaynak avait recouvré son vrai visage, au sens premier du terme. Les moments qu’ils avaient vécus ensemble avant son retour sur Nadar avaient été d’autant plus intenses et grisants que tous deux savaient qu’ils étaient peut-être les derniers. Dans ses périodes de doute, Naldeia puisait dans ces souvenirs de l’intimité partagée sur le Rapier pour retrouver de la confiance. Il y avait aussi ces messages que Jaynak lui envoyait de temps en temps. 

Tous les Nadariens s’étaient vus retirer leur nanite ektrim. La sœur de Jaynak, Niducia, n’en revenait pas de son ignorance passée ni de l’étendue des secteurs d’ombre dans lesquels baignait la mémoire collective des Nadariens. En historienne passionnée, elle s’était plongée dans les zones de la matrice qui avaient été jusque là interdites à ceux qui n’étaient pas des Réfractaires. L’oncle de Jaynak, Irkouk, n’avait cessé de pavoiser depuis que sa famille avait été mise devant l’évidence, quitte à encourir l’irritation des parents de Jaynak. Merek avait eu du mal à accepter un changement aussi radical. Faire le deuil d’un proche aurait déjà été quelque chose, mais faire celui d’une réalité entière était une toute autre montagne à gravir. A l’instar de très nombreux de ses concitoyens, il avait recours à des Sondeurs de l’âme pour le guider au travers de ses phases de déni, et démonter les informations falsifiées que l’ennemi s’efforçait de colporter au sein des réseaux internes de la planète. Processus aussi délicat que difficile, tant l’ego était au cœur du déni. Mais les preuves en faveur des Réfractaires étaient multiples, et l’argelen, le plus précieux des alliés. Merek avait fini par accepter de remonter dans un chasseur, et de se mettre au service de la nouvelle alliance. Ses compétences allaient être sollicitées beaucoup plus rapidement qu’il ne l’aurait sans doute souhaité. 

Naldeia retransmit auprès de Shaella et de l’amiral du Rapier le consentement de Telnov. L’heure était venue de retourner au bercail, mais les circonstances n’auraient pu être plus dramatiques. 

Shaella McGinnis embrassa du regard le panorama au travers de la baie vitrée. Les astéroïdes épars faisaient figure d’intrus au milieu du rassemblement de bâtiments. Il y avait là L’Axanor, le Ka’Zel’Tan, le Thaïlakan, le Casper Prime, L’Ondarim, le Trompe la Mort, L’Ixu, le Longarm, et bien d’autres. Issus pour la plupart des systèmes de la Confédération des Planètes Unies, les immenses croiseurs, accompagnés de frégates et de destroyers étaient venus discrètement, au compte-goutte. Des dispositifs d’occultation installés sur les astéroïdes assuraient une relative confidentialité à la flotte — les perturbations gravitationnelles pouvaient signaler à un observateur attentif qu’il y avait anguille sous roche. Aussi imposante fût-elle, la flotte ne représentait cependant qu’une partie du dispositif mis en place. D’autres forces de projection s’apprêtaient à emprunter différents Relais en direction du système d’Altanis. La Confédération jouait gros dans cette partie de poker menteur. Si les Ektrims perçaient à jour ses intentions, la C.P.U. délivrerait un effroyable coup d’épée dans l’eau, qui aurait au mieux pour conséquence la perte de l’une de ses planètes ou de ses bases stratégiques. 

Au pire, des systèmes entiers pouvaient tomber. 

C’était l’audace même du pari qui en faisait tout le sel. L’amirauté avait souscrit à l’idée de Shaella. Selon elle, les Ektrims estimeraient probablement que l’action de la Confédération envers Nadar se limiterait à ses opérations commando et autres tentatives sous couverture de subversion du pouvoir. Pour renforcer ce point de vue, quand le Coordonnateur Belganov avait déclaré placer sa planète sous la protection de la Confédération, le Haut Conseil de la C.P.U. n’avait confirmé aucun engagement immédiat. Un processus législatif avait bien été annoncé du bout des lèvres, long et tortueux, qui devrait permettre à Nadar d’adhérer à la Confédération des Planètes, à terme. Mais cette démarche prendrait des années, laissant l’opportunité à l’Expansion de frapper bien plus tôt. L’idée était de donner l’impression de faiblesse, de lourdeur et d’irrésolution au niveau politique, du côté de la Confédération. Nadar, quant à elle, en se proclamant sous la protection de la C.P.U. sans vraiment l’être officiellement, apparaissait comme désespérée, réalisant tout à coup que son départ de l’Expansion la plaçait dans un vide juridique extrêmement dangereux. 

Nadar était la chèvre attachée à son piquet, qui bêlait d’autant plus fort qu’elle sentait le prédateur se rapprocher. 

Le jeu était cruel, mais nécessaire. Shaella se tourna vers Lucinda. A sa surprise, la dirigeante de Vels & Associés avait tenu à rester sur le Rapier, où se trouvait aussi son compatriote Balchak. « Vous êtes sûre que vous ne voulez pas retourner parmi les vôtres ? L’Amaranox pourrait vous accueillir. » La frégate quantorienne était l’une des quelques-unes qui devaient participer à l’engagement. La Fondation des Indépendantistes avait été prévenue de la probabilité d’une bataille galactique, mais n’avait dépêché en soutien que de rares bâtiments de tonnage moyen — c’était sans doute pour le mieux, car des mouvements trop importants auraient risqué d’éveiller l’attention des espions de l’Expansion. 

« Je souhaite abuser encore un peu de votre hospitalité, dit Lucinda. Comme je vous l’ai déjà expliqué, vous m’avez trop bien convaincue. Je ne pourrais croire en l’avenir de Quantor que si les forces de l’Expansion sont stoppées pour de bon. Le Rapier me paraît le meilleur point d’observation. 

– Parce que vous croyez que nous allons nous contenter d’observer ? 

– Je me suis préparée à cette bataille. 

– Dans ce cas, veuillez regagner votre cabine et prendre un peu de repos. Vous pourrez nous rejoindre au poste d’observation réservé aux membres du Diligent quand nous serons sur le point de sortir de l’hyperespace. » 

 

Belganov se précipita sur la console qui relayait les données des détecteurs longue portée. Les analyseurs étaient formels, une flotte appartenant à l’Expansion venait bien d’apparaître aux confins du système d’Altanis. Le moment était venu de voir si les exercices d’entraînement à la défense interstellaire avaient été bien assimilés. « Déclenchez l’Opération Riposte, dit-il au Coordonnateur Telnev. Placez la planète en alerte indigo. » Il tourna son regard vers l’icône représentant Halnev. C’était un canal d’urgence, et le Premier Guide Communiant d’Argea ne tarda pas à se manifester. « Vous prenez le relais sur la planète, dit-il après lui avoir expliqué la situation. Je vais coordonner la défense à partir du Strator

– Comme vous voudrez, Premier Coordonnateur. » L’air peiné sur le visage d’Halnev ne laissait aucun doute quant à sa désapprobation. 

Belganov ne chercha pas à lui fournir de justification. Ils en avaient déjà discuté et débattu, Belganov ne pourrait se contenter d’organiser la défense à partir d’Argea. C’était pourtant simple à comprendre. Il n’avait pas sauvé miraculeusement la planète une première fois, en prenant l’initiative d’une intervention de la dernière chance, pour assister de loin au combat interstellaire qui allait décider du destin de son peuple. Il se leva de son fauteuil et prit place dans son monopode. Equipé de propulseurs antigrav, l’engin, suivant sa programmation, le conduisit vivement au hangar où l’attendait sa navette. L’équipage de six personnes y arriva au même moment. Bientôt, le transporteur léger décolla en direction de l’orbite éloignée de Nadar, où veillait le Strator

Les robots de réparation avaient redonné au vaisseau mère nadarien toutes ses capacités. Depuis un mois, toute la planète avait complètement basculé en économie de guerre. Les chantiers navals tournaient à plein régime, essentiellement focalisés sur la remise en état de la flotte. Coupée qu’elle était des relations économiques avec ses anciens alliés, Nadar ne pourrait sans doute pas tenir indéfiniment à ce rythme, c’est pourquoi il y avait une petite part de soulagement mêlée aux inquiétudes terribles qui assaillaient Belganov — enfin, le dénouement approchait. Il rejoignit la salle de commandement du Strator

« La flotte ennemie est de taille beaucoup plus modeste que nous le craignions, annonça Telnev. C’est la VIIe. Il est possible que les autres aient été retardées. Si nous frappons maintenant, les probabilités de l’emporter sans trop de pertes sont de 80 %. Cela nous permettrait de réduire les forces ennemies, plutôt que d’attendre qu’elles se regroupent. 

– C’est sans doute un piège, dit Belganov. Mieux vaut patienter, puisque nos alliés ne sont toujours pas arrivés. 

– S’ils arrivent », dit Telnev. 

Belganov l’interrogea du regard, mais le Coordonnateur de la flotte n’ajouta rien. S’il y avait eu du nouveau du côté de Naldeia, il l’en aurait prévenu. Ses doutes ne reposaient donc que sur le caractère extraordinairement inhabituel de cette alliance avec la C.P.U. Plutôt que de répondre, Belganov se contenta de s’efforcer de communiquer la confiance par son attitude. Il passa en revue les croiseurs, cuirassés, destroyers, et frégates qui s’éloignaient en ce moment de Nadar afin d’éviter à la planète toute retombée néfaste du titanesque combat à venir. Du coin de l’œil, il surveillait la flotte de l’Expansion. Il remarqua une nuée de petits points s’échapper du corps des troupes. 

« Chasseurs ennemis déployés », dit l’Adepte affecté aux détecteurs courte portée. 

Belganov vérifia les données transmises par l’Intelligence Synthétique du Strator. Parmi les chasseurs et bombardiers des premières vagues adverses, il n’y avait que des Retaliators et des Crushers. Des vaisseaux pilotés par des nadariens, faisant partie des forces détachées de manière permanente au sein des flottes de l’Expansion. Depuis la révolte sur Nadar, le commandement s’était en vain efforcé de joindre ces chasseurs. Il aurait fallu les rapatrier et extraire leurs nanites ektrims avant de commencer les séances de désendoctrinement, mais ce n’avait pas été possible. 

« Ils cherchent à créer de la confusion, dit Belganov. Provoquer de l’indécision parmi nos pilotes pour les rendre plus vulnérables. 

– A mon avis, c’est pire que ça, dit Telnev. Regardez ! » 

Magnifiée par les soins du Coordonnateur de la flotte, des lignes de chasseurs Zarin Zayborgs, accompagnés d’Intimidators et Gen-A fengiriens s’étaient mis en formation d’attaque. L’Intelligence Synthétique du Strator fit apparaître un second hologramme sur un champ plus large, où l’on aperçut distinctement un destroyer faire feu de ses canons à protons sur l’un des chasseurs aux avant-postes, qui explosa. En passant d’un hologramme à l’autre, Belganov vit que les Zarins et Intimidators tiraient également. Les Retaliators et Crushers disparaissaient les uns après les autres dans des gerbes de plasma. 

« Ils sont en train d’assassiner les nôtres ! 

– Comme nous avons détruit les leurs, dit sombrement Telnov. C’est une rétribution. Une vengeance, si vous préférez. » 

Belganov fut sur le point de donner l’ordre de se lancer à l’assaut. Il vérifia alors les détecteurs. 

Une flotte de la Confédération des Planètes Unies venait d’apparaître, mais à l’autre bout du système — bien trop loin pour aider les chasseurs nadariens. « Votre hypothèse d’un piège qui nous est tendu semble bien se confirmer, fit Telnov. Les forces de l’Expansion cherchent à nous attirer près de leur point de chute. L’IS du Strator estime elle aussi que nous sommes loin d’avoir vu la totalité de la flotte ennemie. Une partie est probablement occultée, mais la majorité doit sans doute être en hyperespace. 

– Nous n’avons pas le choix, dit Belganov avec résignation. Notre premier devoir est envers Nadar. En nous rapprochant d’eux, c’est notre planète que nous risquerions. Activez les détecteurs de neutrinos. Nous devons identifier toute tentative de contournement pendant que notre attention est attirée ailleurs. » 

Les Retaliators et Crushers en avant de la flotte ennemie effectuaient des manœuvres d’évasion sans pour autant répliquer contre leurs agresseurs. Que leur comportement soit dû à l’implantation de nanites ektrim, à leur conditionnement ou à la désactivation à distance de leurs armes par l’ennemi, le résultat était dramatique. Ils disparaissaient les uns après les autres, balayés par une adversité bien supérieure. Belganov reçut plusieurs appels de commandants de vaisseaux désireux de se porter au secours des pilotes nadariens. 

Il leur interdit de bouger. Le spectacle de destruction était à vous glacer le sang. Belganov devait se répéter que la puissance ne résidait pas dans l’action dans ce cas de figure, mais bien dans le contrôle de ses émotions. Il fallut attendre qu’il ne reste plus aucun des chasseurs nadariens issus des rangs de l’Expansion pour que la IIIe, la Vème et la IXe flotte apparaissent dans toute leur écrasante supériorité. La Vème et la IXe se révélèrent toutes proches de la VIIe, prouvant que la mise à mort des chasseurs nadariens avait bien été un traquenard — la IIIe provenait d’un autre point du système. La Vème et la IXe se mirent à s’éloigner de la VIIe, de manière à maximiser l’impact lorsqu’elles frapperaient simultanément. 

« C’est la fin, murmura Telnov. Nous ne pourrons jamais espérer résister contre cela. 

– Il le faudra bien, dit Belganov. Nous devons faire front, envers et contre tout. » 

Vaisseaux mères, vaisseaux amiraux, croiseurs, cuirassés, destroyers, frégates et porte-missiles étaient en nombre si important que l’on aurait pu croire qu’il s’agissait de chasseurs. Quoique plus puissantes que la VIIe flotte, les forces nadariennes allaient être submergées. 

Le Rapier était lancé à vitesse maximale en direction de la flotte des protecteurs de Nadar. Il n’était que l’un des croiseurs parmi les centaines en provenance du système d’Estregor. Une à une, les autres flottes de la Confédération des Planètes Unies apparurent dans le système d’Altanis. Shaella nota avec satisfaction que trois des flottes alliées avaient emprunté des trajectoires qui leur permettraient d’empêcher la IIIe flotte ennemie de rejoindre la bataille. Le piège se refermait — à moins bien sûr que les espions de la Confédération n’aient été bernés et que l’Expansion n’envoie en ce moment même des flottes supplémentaires. 

Une fois le Rapier suffisamment proche des forces de Belganov, ses Skinangels, Ionthunder et Belligerant jaillirent de ses hangars, comme ils le faisaient de ceux des autres bâtiments de tonnage important. Il était temps, car les chasseurs nadariens se battaient quant à eux à un contre dix contre l’ennemi. Pour se maintenir en vie, ils n’effectuaient que des incursions rapides hors de la protection des boucliers de leurs croiseurs, destroyers et cuirassés. Ces mêmes boucliers rougeoyaient sous l’éclat incessant des tirs de turbolasers et canon à plasma, et voyaient leur résistance sapée par les canons à ions et à protons. Des éclairs bleutés jaillissaient de croiseurs ektrims. L’espace était illuminé d’explosions, souvent d’ailleurs en provenance de contre-torpilles venant annihiler les tentatives de destruction on provenance de l’ennemi. 

Shaella fit un point rapide sur la situation. La convergence des alliées à impulsion maximale avait été massive. Les flottes parvenues en défense de Nadar s’avéraient désormais plus nombreuses et mieux équipées que celles pourtant très imposantes de l’Expansion. 

L’augmentation cérébrale de Shaella fonctionnait à plein régime, lui faisant remonter les données en provenance des différentes zones du secteur. Ce n’était pas elle qui était aux commandes du Rapier, mais elle approuvait les décisions de l’amiral qui officiait dans la salle de commandement. 

Longtemps, la bataille titanesque parut indécise. Shaella apprit que quatre croiseurs ennemis s’étant désoccultés non loin d’Altanis avaient été détruits. Elle se félicita de la décision des plus hautes instances de la C.P.U., qui avaient envoyé six croiseurs renforcer les défenses nadariennes déjà présentes dans le secteur. 

La flotte de Belganov connaissait de nombreuses pertes, mais ne fut mise en défaut qu’une seule fois dans sa défense de la planète. Un croiseur et deux destroyers fengiriens parvinrent à franchir le rideau défensif pour se diriger droit sur Nadar. Une fois en position, des escouades de chasseurs s’attaquèrent aux satellites postés en sentinelle et aux Retaliators en défense orbitale. 

Le Rapier lui-même, secondé de cinq destroyers et une dizaine de frégates intervint à temps. Quatre des plus importants satellites de défense venaient d’être détruits quand les alliés de la C.P.U. achevèrent enfin d’éliminer les Fengirs. Fanatisés, ceux-ci se sacrifièrent pour leur cause. Les boucliers planétaires avaient tenu, et les épaves des transports de troupes fengiriens se calcinaient à leur contact. 

Shaella consulta les détecteurs. Débordée de toutes parts, mise au supplice, la IIIe flotte de l’Expansion était en train de se faire annihiler méthodiquement. La Vème, la VIIe et la IXe avaient toutes subi des pertes considérables. Lorsqu’il ne resta plus un seul vaisseau opérationnel de la IIIe, et que les flottes de la Confédération issues de cette partie du secteur se dirigèrent vers le gros de la bataille, les forces de l’Expansion, déjà terriblement éprouvées, n’eurent d’autre choix que de battre en retraite. Elles subirent de nouvelles lourdes pertes avant de pouvoir s’enfuir par les différents Relais d’Accélération qu’elles avaient utilisés à l’aller. 

La bataille pour la défense de Nadar se soldait par une victoire éclatante. En vérifiant les boucliers du Strator, Shaella constata qu’ils n’étaient plus qu’à 10 %. La tension qui l’habitait ne la quitta vraiment qu’en écoutant le discours de célébration et de remerciement de Belganov.

Le résumé de ce chapitre, commenté

 par deux voix de l'IA en anglais.

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Published on April 14, 2025 06:11

April 7, 2025

L'Essence des Sens : chapitre 41

A titre expérimental, j'ai décidé de faire paraître un nouveau chapitre de mon dernier roman, L'Essence des Sens (Science-Fiction), sur ce blog chaque semaine. Voici le quarante-et-unième.  

41. Le Cœur d’Argea 

Belganov et Balchak accueillirent Jaynak, Naldeia ainsi que Shaella et son commando sur le destroyer qui les avait recueillis, L’Ambré. C’était celui des deux qui était en meilleur état. Contrairement au Réfractaire et au second destroyer, ses capacités motrices avaient résisté aux combats et aux radiations d’Altanis. Bien que le rendez-vous avec la flotte ait été manqué, Belganov pourrait rejoindre celle-ci rapidement en orbite de Nadar. Le croiseur et les deux destroyers devraient subir des réparations extensives dans les chantiers spatiaux, afin de redevenir opérationnels le plus tôt possible. 

Belganov sourit en pénétrant dans la salle de détente où se trouvaient ses anciens compagnons. « Pas la moindre égratignure ! C’est un miracle, nous avions cru vous avoir perdus. 

– Nous pouvions dormir sur nos deux oreilles, répondit Shaella en lui rendant son sourire, parce que nos ennemis avaient pris soin de nous enfermer dans des champs de stase quasiment indestructibles. 

– Leur seul point faible était leur alimentation, compléta Naldeia. Et elle a été coupée juste au moment propice. 

– Très heureux de vous revoir en si bonne santé, fit Balchak. 

– Merci d’être allé chercher de l’aide, dit Shaella. Vous êtes arrivés à point nommé. » 

Balchak se contenta de hocher la tête. 

« Les Quantoriens sont toujours là quand on a besoin d’eux, commenta Belganov. Je savais que notre planète courait un danger mortel, mais sans Balchak pour nous aiguiller au bon endroit… Et puisqu’on en est aux remerciements, merci encore pour votre opération sur Nadar, Shaella McGinnis. Grâce à vous et votre équipe, nous avons découvert par quel moyen les Ektrims nous ont implanté leurs nanites. Figurez-vous qu’ils utilisaient de petits drones furtifs. 

– Notre alliance produit déjà d’appréciables résultats, dit Shaella. J’espère que votre peuple s’en réjouit. » 

Belganov prit une expression embarrassée. « Je l’avoue, certains de mes Guides ont été très surpris quand je leur ai annoncé que c’était des humains qu’ils devaient rechercher dans ce croiseur ektrim. Les choses sont allées si vite que même parmi les Réfractaires, tout le monde n’a pas encore assimilé cette nouvelle alliance avec la Confédération des Planètes Unies. Je n’en ai pas encore informé le peuple, mais la Ruche s’est fait un plaisir de donner l’information, mélangée à un tel déluge de fake news que nous avons dû couper nos semblables du réseau de l’Expansion. Les gens sont très désorientés. Heureusement que nous avons l’argelen pour les aider à retrouver leurs repères. Et cette découverte d’une usine secrète de drones furtifs devrait peser lourd pour les convaincre du bien-fondé de notre action. Surtout quand ils sauront que tous les nanites ektrim étaient piégés. Nous ne leur dirons qu’après les avoir enlevés, bien entendu. 

– Et quand vous leur apprendrez que la bien-aimée Expansion a essayé de détruire Nadar en surchauffant Altanis, dit Jaynak. 

– Sans oublier, enchaîna Shaella, les prochaines représailles que préparent déjà les Ektrims. Avec tout mon respect, Premier Coordonnateur, vous n’allez plus pouvoir garder le secret au sujet de notre alliance. Il vous faut préparer au plus vite votre peuple à la confrontation. L’ennemi a prouvé qu’il ne perdait pas de temps. Qui sait, le fait d’annoncer publiquement que vous êtes sous la protection de la Confédération des Planètes Unies le dissuadera peut-être de passer à l’acte. 

– Vous avez raison, bien sûr. Quoique, concernant l’aspect dissuasif de notre alliance, je n’ai guère d’espoir, connaissant le caractère vindicatif des Fengirs. 

– De notre côté, nous aurions besoin que vous mettiez à notre disposition un transporteur, dit Shaella. 

– Certainement, dit Belganov. Vous souhaiteriez une escorte ? 

– Je ne crois pas que nous aurons une autre mauvaise surprise. Balchak nous accompagnera de nouveau avec L’Eclat d’Alcor, n’est-ce pas ? 

– Avec plaisir, répondit l’intéressé. 

– Dans ce cas nous n’aurons rien à craindre. Assurez-vous simplement que le Relais vers Estregor nous livre le passage. 

– Ce sera fait. » 

Jaynak fit signe à Belganov, qui l’interrogea du regard. 

« Puis-je me joindre à eux ? demanda Jaynak. Avant de revoir mon frère et ma famille, je souhaiterais retrouver mon visage d’avant, vous comprenez. » Jaynak désigna sa figure, toujours modifiée par l’empreinte de la moussor. 

Naldeia lui pressa la main, ce que Belganov remarqua. Il se demanda si la requête n’était pas un prétexte pour passer un peu plus de temps avec la jeune femme avant leur séparation. Jaynak et sa nouvelle compagne avaient côtoyé la mort de si près… « Requête accordée, dit Belganov. Autre chose ? » 

Il n’y avait rien d’autre. Ils décidèrent de partager un ultime repas avant de se quitter. 

Dès son retour sur Nadar, Belganov convoqua le Coordonnateur de la flotte. Il fit à Telnov le compte-rendu des derniers événements. Tous deux convinrent de faire surveiller Altanis par quatre bâtiments de classe Protector munis de détecteurs de neutrinos, afin de repérer un éventuel vaisseau camouflé. Solution provisoire en attendant de renforcer la défense de l’étoile de manière permanente par la construction de nouvelles stations d’observation et de surveillance. Telnov n’accueillit pas avec enthousiasme le fait de devoir sacrifier une part aussi importante de sa flotte — en plus des quatre bâtiments sur place, huit autres devraient assurer le ravitaillement et la rotation des équipages. Néanmoins, ils n’avaient pas le choix et le Coordonnateur de la flotte le savait. 

Belganov demanda ensuite au Premier Guide Communiant d’Argea de préparer le peuple à un grand discours de sa part. Dès qu’il eut achevé de le mettre au point, à l’heure fixée par Halnev, Belganov prit la parole. Son allocution fut retransmise par les mêmes médias autrefois à la solde des Fengirs, à l’exception bien sûr de la Ruche, qui n’était plus opérationnelle. Belganov y annonça l’alliance avec la Confédération des Planètes Unies, et se donna un an pour stabiliser la situation avant d’organiser des élections libres. Il détailla toutes les mesures militaires et civiles mises en œuvre. L’extraction des nanites ektrim était l’une des priorités, mais Belganov ne cacha pas le péril mortel auquel venait d’échapper la planète. Pour appuyer sa démonstration, il retransmit le message de l’Exarque stellaire Than’Agh. 

Les films holo enregistrés par les vaisseaux qui avaient intercepté le croiseur ektrim et ses armes létales vinrent ensuite attester que les paroles de l’Exarque ektrim n’avaient pas été de vaines menaces. 

« Mon prédécesseur va devoir être jugé, annonça Belganov. Le nombre de procès qui l’attend est toutefois tellement important que cela va prendre du temps de réunir tous les éléments nécessaires. Une chose ne change malheureusement pas par rapport aux derniers mois — la flotte va avoir besoin de très nombreux bras. Chers enfants des strates, je vous engage à vous porter volontaire en masse si nous voulons offrir un avenir à notre planète. » 

Belganov surveilla avec anxiété les conséquences de son discours. Il craignait en particulier des émeutes incitées par les partisans de Grendchko. 

Il s’avéra que la plupart des gens étaient tellement soulagés de revoir leurs proches partis pour la guerre contre Oblan, mais aussi tellement déstabilisés par les dernières informations qu’ils se révélaient incapables de réagir contre le nouveau pouvoir. Quant aux anciens Fervents, la disparition des Fengirs de la surface de la planète les laissa désemparés. A l’instar de la grande majorité de la population, ils retrouvaient le chemin des Cavernes d’Ambre de chaque cité, désireux de se plonger dans l’argelen, à la recherche de repères. La perspective d’une guerre contre les alliés d’antan agissait pour sa part comme un vent puissant dissipant les brumes de l’incertitude afin de remobiliser les masses. 

Le lendemain de son discours qui fut ensuite connu sous le nom de Séisme de Belganov, le Premier Coordonnateur reçut en son Palais un prisonnier de marque. Grendchko était escorté de quatre soldats. Trois drones SR assurant sa protection personnelle, Belganov fit signe aux gardes de se reculer. Grendchko n’était pas entravé. Il semblait stupéfait de ce qu’il voyait. 

« Vous avez volé mon trône ! accusa-t-il bille en tête en le désignant du doigt. J’ai gagné les élections à la loyale ! Vous n’avez pas le droit d’essayer de me les voler. » Poussant un grondement, il se rua tête baissée sur Belganov. 

Son corps fut pris d’un tremblement. Activé par l’un des gardes, le dispositif fixé à sa taille venait de lui envoyer une décharge qui le priva du contrôle nerveux sur ses membres — il s’effondra sur le ventre. Belganov fit signe aux soldats de le retourner. Ensuite, il entreprit de marcher sur le torse de l’ennemi vaincu, magnétisant ses pieds afin de se maintenir en équilibre. L’éclat bleuté des yeux de Grendhcko ne perdait aucun de ces mouvements. Le Premier Coordonnateur déchu s’efforça de parler, sans y parvenir. 

« Sans les nanites ektrim qui conditionnaient nos semblables à voter pour le favori des Fengirs, vous n’auriez jamais pu être élu, dit Belganov en baissant les yeux. Remarquablement, nos analyses ont révélé que vous-même n’avez pas été parasité par l’un de ces nanites. Je soupçonne vos anciens alliés d’avoir été tellement satisfaits de découvrir quelqu’un d’aussi naturellement stupide et servile qu’ils ont décidé de ne rien changer. Vous étiez la marionnette idéale, celle dont on peut modéliser la moindre des réactions, tant vous êtes mu par vos pulsions primaires. » 

Belganov contempla un instant le plafond, comme pour se recueillir. « Vous restez néanmoins un Nadarien. A ce titre, et eu égard à votre rang, certes usurpé, d’ancien Premier Coordonnateur, vous allez être détenu, dans l’attente de votre jugement, dans notre lieu le plus sacré. Le Cœur d’Argea va vous accueillir. » 

Belganov ne manqua pas de relever la lueur d’effroi dans les yeux de Grendchko. Le Cœur d’Argea était une pièce profondément enfouie dans les Cavernes d’Ambre, où la gravité décuplée ne vous laissait faire le moindre mouvement qu’au prix de terribles efforts. L’endroit n’était pas mortel, mais donnait l’impression de réintégrer la roche, expérience mystique prisée de certains, qui en connaissaient toutefois les conséquences. Il était en effet impossible de sortir du sanctuaire sans aide extérieure, et s’y nourrir était une vraie épreuve. 

Belganov demeura immobile un instant, comme s’il attendait une réponse. Puis il hocha la tête d’un air satisfait et démagnétisa ses pieds pour se diriger avec nonchalance vers son trône.

Le résumé de ce chapitre, commenté par deux voix de l'IA en anglais.

Broché 19 € Relié 26,38 €

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Retrouvez les cinq premiers chapitres en cliquant sur ce lien.

 

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Published on April 07, 2025 10:13

March 31, 2025

L'Essence des Sens : chapitre 40

A titre expérimental, j'ai décidé de faire paraître un nouveau chapitre de mon dernier roman, L'Essence des Sens (Science-Fiction), sur ce blog chaque semaine. Voici le quarantième. 

40. Le jeu des pyramides 

En reprenant connaissance, Shaella réalisa que son nanite était encore fonctionnel. Conçu pour résister à des décharges électriques, il avait donc passé l’épreuve avec brio. Elle sut qu’elle avait été droguée, de même que ses compagnons, eux aussi transportés sur les épaules de Zayborgs — ses membres refusaient de lui répondre. Décidée à masquer les rares atouts dont elle pouvait disposer aux yeux de l’ennemi, elle choisit de ne pas se servir de son augmentation pour essayer de reprendre le contrôle sur son corps. Son nanite lui apprit tout de même que Fal n’était pas dans leur groupe. 

Au moment où une porte glissait pour leur livrer le passage, Shaella redressa la tête et aperçut Jaynak et Naldeia. Eux aussi avaient repris conscience, mais ne paraissaient pas plus maîtres de leurs mouvements. Dans la salle spacieuse où ils venaient d’entrer, des icônes en langage ektrim flottaient au-dessus de consoles opérées par des individus longilignes, au crâne oblong, dont les doigts interminables s’agitaient comme au ralenti. Coincée sur l’épaule de son porteur, il était difficile à Shaella de se faire une idée de ses environs. Ce ne fut que lorsqu’on la plaça dans un champ de stase à l’avant de la pièce, en face de baies panoramiques donnant sur l’hyperespace, qu’elle réalisa être dans la salle de commande du vaisseau — aux premières loges. Ses compagnons furent installés sur des dispositifs similaires, six autres humains et deux Nadariens. Le champ permettait de tourner la tête, mais bras et jambes, soulevés en l’air, ne bénéficiaient que d’une mobilité limitée. Shaella connaissait le principe de ce type de technologie. Elle savait que toute tentative pour forcer le champ entraînerait une immobilisation totale. Pour couronner le tout, la moindre utilisation de son nanite serait aussitôt repérée. 

Les tachyons qui environnaient Shaella avaient de quoi donner le tournis. De toutes les couleurs du spectre lumineux, ils déferlaient sans répit comme s’ils avaient pour but de vous engloutir dans leur tourbillon chromatique. Ils disparurent d’un seul coup, remplacés par une lueur blanche qui aurait été aveuglante sans la polarisation automatique des parois de vitriglass. Celles-ci permettaient de distinguer des secteurs plus foncés. L’éclat ardent emplissait l’intégralité des baies devant Shaella. 

Shaella savait n’avoir été inconsciente que pendant une période relativement courte. Comme la plupart des bâtiments d’un gabarit similaire, le croiseur ektrim était capable de recourir à des sauts en hyperespace par lui-même, sans passer par un Relais d’Accélération. La portée de ces sauts était cependant plus limitée. 

Ce qu’elle avait sous les yeux ne pouvait donc être qu’Altanis. On pouvait presque deviner les réactions nucléaires se produisant sur l’étoile du secteur, tant elle était proche, à présent. La température de la pièce, pourtant, demeurait stable autant que Shaella put en juger. Elle percevait l’écho de conversations et des cliquetis. Les voix étaient celles d’Ektrims, à l’exception de feulements indiscutablement fengiriens. 

Les membres du commando de l’Angle M, quant à eux, restaient muets, respectant les consignes à observer dans ce cas de figure. Jaynak et Naldeia ne disaient mot eux non plus, apparemment écrasés par la situation. On ne pouvait le leur reprocher — la présence si proche de l’étoile du système des Nadariens était de mauvais augure. 

Un double bruit de pas se fit entendre, l’un mat et distinct, l’autre étouffé. Drapé dans une toge semi-transparente laissant apercevoir les courants électriques qui le traversaient, l’Ektrim avait de petits yeux emplis de malice enfoncés dans leurs orbites. La peau de son visage était lisse, cependant sa manière de se mouvoir, ainsi que l’expérience au fond de ses yeux auguraient le grand âge. Ce liseré rouge autour du col le désignait comme commandant du vaisseau. Shaella ne fit qu’entrevoir le Fengirien qui l’accompagnait, lequel restait en retrait. L’Ektrim passa devant chacun des champs de stase et dévisagea les prisonniers tour à tour. Nul indice extérieur n’indiquait le rang de Shaella, et pourtant, ce fut en la scrutant du regard qu’il prit la parole. 

« Heureux de voir que vous avez tous repris conscience », fit l’Ektrim. Sa voix avait la propriété perturbante d’être à la fois haut perchée et de s’insinuer dans les oreilles, comme si elle provoquait un écho, ou comme si elle provenait de plusieurs endroits en même temps. « La Confédération des Planètes Unies a eu tort d’aller fourrer son sale nez dans des affaires qui ne la concernent en rien. » L’individu se déplaça jusqu’à se mettre en face de Naldeia et Jaynak. « Quant aux Nadariens, ils n’ont, pour utiliser l’une de vos pittoresques formules humaines, rien compris au film. Ils n’ont pas saisi qu’ils n’existeraient déjà plus s’ils n’avaient pas intégré l’Expansion, jadis. Nos alliés les Fengirs voulaient les anéantir. Dans sa grande mansuétude, l’Assemblée galactique ektrim en a décidé autrement.

 – Afin de nous réduire en esclavage, lâcha Jaynak entre ses dents. 

– Les esclaves connaissent leur statut. Nous vous avons offert bien mieux. Nous vous avons offert l’illusion de la liberté. Mieux encore — nous vous avons offert la possibilité de donner votre vie pour une cause qui vous dépasse largement, celle de l’Expansion. » L’Ektrim pivota pour s’avancer à grands pas vers Shaella. Le Fengir à la fourrure rousse observait son manège les bras croisés, imperturbable. « Et quant à vous, reprit l’Ektrim, la pitoyable tentative de votre minable organisation n’aura servi qu’à faire troquer aux Nadariens une illusion contre une autre. Vous les avez plongés dans la chimère de la rébellion. Quand bien même aucune rébellion n’était possible. Comme vous allez en avoir l’éclatante démonstration, les Ektrims ont toujours le dernier mot. » Le commandant de vaisseau désignait l’extérieur de l’une de ses serres. Le ricanement qui s’échappa des minces lèvres, presque translucides, était si aigu qu’il vrillait le cerveau — une série d’électrochocs aurait eu un effet similaire. 

Shaella ne cilla pas. 

« Regardez cela ! fit l’Ektrim. Et ceci ! » Successivement, il pointa l’un de ses longs doigts crochus en direction des baies à bâbord et tribord, vers ce qui pouvait figurer une paire de pyramides d’obsidienne en position horizontale. Soudain, l’individu dégingandé se figea et prit une inspiration. Ses pupilles atteignirent la fixité de celui qui regarde vers l’intérieur. Les pyramides se détachèrent alors du vaisseau et s’éloignèrent l’une de l’autre, s’orientant sur Altanis. Shaella devinait que l’Ektrim venait d’en donner l’ordre en passant par une augmentation cérébrale. « Un seul double tir de ces fabuleuses pointes d’antimatière, expliqua le commandant, suffirait à ravager la moitié de Nadar. Ce n’est pourtant pas ce qu’elles vont faire. » Il y avait indiscutablement une lueur de folie dans le regard qu’il jeta à Shaella. « Les explosions que ces pointes vont provoquer à la surface d’Altanis ne permettront bien sûr pas de détruire l’étoile. En revanche, les réactions en chaîne vont créer une tâche stellaire de nature à augmenter la température de l’atmosphère de Nadar de 20 degrés. Dans les cinquante prochaines années, l’évaporation va générer un effet de serre qui recouvrira Nadar comme une cloche. Le prodigieux effet d’emballement augmentera cette fois la température de surface de 100 degrés. L’effet est irréversible. Nul de vos nouveaux petits alliés ne pourra y survivre, humaine. Une mort soudaine aurait été bien trop douce, vous comprenez. On ne quitte pas l’Expansion sans conséquence. » 

Un nouveau ricanement monstrueux s’éleva dans la salle de commande du croiseur. 

*** 

Belganov savait avoir pris un vrai risque en sautant aussi près de l’étoile de Nadar. Mais que pouvait-il faire d’autre ? Le récit de Balchak l’avait convaincu que l’avenir de son peuple était en jeu. Le croiseur possédait plusieurs heures d’avance, que l’on ne pouvait regagner qu’en faisant un pari avec le destin. Le Coordonnateur des Nadariens disposait cependant d’un atout — son croiseur comme les deux destroyers venaient d’être construits et étaient tous trois équipés de la dernière génération de réacteurs antigrav et d’impulsion. En contrepartie, les vaisseaux n’avaient pas encore fait leurs preuves au combat. 

Dès la sortie de l’hyperespace, les signaux d’alarme de la salle des machines retentirent dans Le Réfractaire — le patronyme du croiseur, récemment renommé. Le voyant orange du système de survie se mit lui aussi à clignoter, alertant sur une prochaine défaillance possible. L’intolérable chaleur en provenance de l’étoile Altanis saturait les dispositifs de captation d’énergie et de retransmission au vaisseau, et les boucliers déflecteurs étaient sursollicités. Belganov fut néanmoins soulagé de constater que les deux destroyers en avaient également réchappé. L’Adepte-technicien de la salle des machines vint prévenir que tous les systèmes étaient au maximum de leur capacité, mais ne pourraient sans doute pas tenir bien longtemps. Belganov se concentra sur les signaux des stations de protection. 

« Par les démons des strates ! marmonna-t-il. » 

Balchak, qui avait eu le temps de le rejoindre, lui lança un regard inquiet. 

Belganov effleura une icône de sa console, et les hologrammes de deux pyramides autopropulsées, se détachant sur la blancheur aveuglante d’Altanis, apparurent. « D’après les données en provenance des stations de protection, corroborées par l’Intelligence Synthétique du vaisseau, nous avons là deux projecteurs d’antimatière. Il y a 99 % de chance que ce soit le moyen par lequel les Ektrims entendent éradiquer notre civilisation. 

– Ces espèces de pyramides seraient suffisantes pour détruire votre étoile ? » Balchak ne masquait pas son scepticisme. 

– Non, bien sûr. Mais l’explosion d’antimatière serait assez puissante pour l’agacer et déclencher sa colère. Il en résulterait une hausse de température dans tout le système, qui nous serait fatale sur le moyen terme. » Belganov avait les yeux dans le vague, et Balchak ne douta pas qu’il avait eu recours à son augmentation pour effectuer ses calculs et formuler sa prédiction. Belganov secoua la tête. « Nous sommes mal placés pour intercepter ces projecteurs. Et les stations de protection ne peuvent pas intervenir, en raison du saut en hyperespace de l’Ektrim, qui l’a mis hors de portée. 

– Voilà qui semble très mal engagé. 

– En revanche, poursuivit Belganov sans relever la remarque, nos destroyers sont chacun en situation de pouvoir intercepter l’un de ces projecteurs. Et Le Réfractaire est bien placé pour s’occuper du croiseur ennemi. » 

Belganov donna ses ordres. Les deux destroyers se détachèrent pour se diriger chacun vers l’une des pyramides. La salle des machines reçut pour instruction de mettre les réacteurs antigrav en surrégime. Lentement au début, puis avec une vitesse croissante, le croiseur s’arracha à l’effarante gravité d’Altanis. 

« Nous serons à portée de tir du croiseur ennemi dans trois minutes », annonça l’Adepte en charge des systèmes de combat. 

Le voyant orange des systèmes de survie repassa au vert, signe qu’ils s’étaient suffisamment éloignés de la couronne d’Altanis. La lueur bleutée dans les yeux de Belganov s’agrandit. Une nuée de Zarins, chasseurs pilotés par les Zayborgs, venait de surgir des entrailles du croiseur. « Comment pourront-ils échapper à l’attraction d’Altanis ? s’interrogea-t-il. 

– Ils ne pourront pas, dit Balchak. Aussi près de la couronne de l’étoile, des vaisseaux de cette taille ne sont pas équipés pour. Le seul moyen pour eux de survivre serait que le croiseur ektrim accélère pour se positionner sur leur trajectoire et les récupérer. Mais il ne le fera pas. Ces Zarins ne sont qu’une distraction, visant à donner l’occasion à ce satané croiseur de s’enfuir. Je suggère de modifier légèrement votre trajectoire d’interception afin de les éviter, mais de garder vos propres chasseurs bien à l’abri. » 

L’Adepte de la sécurité devait posséder un traducteur simultané, car il se mit à protester auprès de Belganov. Celui-ci savait que nulle hésitation n’était permise à ce stade. Il décida de se fier à son intuition. 

« Calcul d’une nouvelle trajectoire d’interception, dit Belganov. Préparez les systèmes défensifs et offensifs. » Son augmentation lui suggérait différentes possibilités d’attaque contre ce type de croiseur. Il choisit d’alterner lancement de missiles et de torpilles tout en ciblant l’ennemi à l’aide des canons lasers et à protons. L’attaque devrait être dévastatrice, la plus brève possible. 

Les Zarins s’efforcèrent de corriger leur trajectoire pour intercepter le croiseur. Trop forte, la gravité de l’étoile du système ne l’autorisa pas. Leurs tirs de torpilles et leurs lasers manquèrent Le Réfractaire ou s’écrasèrent sur ses boucliers. Comme l’avait prédit Balchak, les chasseurs légers continuèrent leur course en direction d’Altanis, sans parvenir à faire demi-tour. 

Le croiseur ennemi, en revanche, fit feu de toutes ses pièces. Belganov fut contraint de modifier son champ de déflexion, lequel ne protégea plus aussi bien le vaisseau contre le rayonnement d’Altanis. Le Réfractaire fut très vite secoué, et l’on signala des dégâts au niveau de la poupe. Le croiseur ektrim, quant à lui, avait survécu aux différents projectiles. Son propre bouclier luisait sous les tirs, mais tenait bon. Il lâcha soudain un éclair bleuté, qui illumina la salle de commande, mais ne parvint pas à franchir les défenses du Réfractaire. 

« Les boucliers ne sont plus qu’à 30 %, signala l’Adepte chargé des systèmes défensifs. Nous ne pourrons plus résister bien longtemps à ce rythme. 

– C’est pourtant ce que nous devons faire, dit Belganov. 

– L’Eclat d’Alcor pourrait vous venir en aide, suggéra Balchak. 

– Ce serait du suicide. Ce qui est valable pour les Zarins l’est aussi pour vous, mon cher. » 

Belganov décida de poursuivre les attaques sans relâche. Il savait être désavantagé en raison de sa proximité plus grande avec Altanis, laquelle avait affaibli ses boucliers. Néanmoins, il devait se raccrocher à l’idée de finir par trouver une faille dans la cuirasse. Les explosions retentissaient de manière de plus en plus violente dans le croiseur. 

« Nous avons perdu tous les canons à protons à tribord, et tous les lasers sauf un », annonça un Adepte. 

– Boucliers à 10 %. » 

La projection holo du croiseur ennemi, dont les boucliers s’étaient affaiblis sérieusement, révélait que ces derniers ne recevaient presque plus d’impacts. Belganov se dit qu’au prochain tir adverse, leur propre vaisseau ne pourrait plus résister à l’éclat d’Altanis. La partie était jouée, et ils avaient perdu. Il serra les dents, attendant l’impact fatal. 

De violents éclats de lumière entourèrent le croiseur ektrim. Ses boucliers devinrent rouge cramoisi, puis une explosion se forma sur la partie sphérique de sa superstructure. Les courants bleutés qui parcouraient le croiseur n’étaient presque plus visibles. L’un des Adeptes signala que l’ennemi avait perdu ses boucliers, son système de distorsion et la majeure partie de sa puissance en impulsion. Belganov consulta ses détecteurs, et s’aperçut que les deux croiseurs l’avaient finalement rejoint. C’étaient eux qui concentraient leur tir sur l’ennemi, désormais privé de boucliers. 

« Cessez le feu ! ordonna-t-il. Abordage simultané en ventral et en dorsal. Commandants de destroyers au rapport. 

– Cible détruite, fit l’un. 

– Cible détruite », fit l’autre. 

Un irrépressible tremblement saisit Belganov, qui se serait écroulé si Balchak n’avait eu le réflexe de le soutenir. La tension nerveuse avait été terrifiante. Belganov ne réalisa pleinement la portée de l’exploit qu’en recevant une double transmission qui montrait les explosions de plasma englober les sombres pyramides. Selon ses commandants, aucun des deux projecteurs d’antimatière n’avait eu le temps de tirer sur l’étoile. 

Shaella prit conscience que l’éclat des boucliers déflecteurs avait viré au rouge grenat. C’était la fin des haricots pour le croiseur ektrim, mais aussi pour tous ses occupants. Une vague d’énergie succéda à cette constatation, déferlant dans la salle, et Shaella sut que les systèmes gravimétriques avaient connu une défaillance en voyant voler plusieurs ektrims, qui allèrent se fracasser contre les parois. Elle se demanda pourquoi elle et ses compagnons n’avaient pas subi le même sort. Différentes alertes stridentes retentissaient au moment où le champ de stase, qui leur avait sauvé la vie, n’étant plus alimenté, libéra l’équipage du Croc de Shaenor. Hébétés, les compagnons s’entreregardèrent. Ils semblaient tous aller bien, y compris Jaynak et Naldeia, qui tombèrent dans les bras l’un de l’autre. 

La salle de commandement était sens dessus dessous. Le sang bleu sombre d’Ektrims maculait les parois, on retrouvait ça et là des membres ou autres composants de droïdes ou d’appareils divers. Un grognement masqua un instant le bruit des sirènes. Une fourrure rousse se détacha de l’une des baies de vitriglass où la silhouette laissa des traces écarlates mêlées à des poils. L’un des yeux du Fengir avait éclaté dans son orbite, tandis que le second était fixé sur Shaella. Le leader fengirien ne réussit pas à sortir toutes les griffes de ses quatre mains, mais il trouva suffisamment d’équilibre pour se mettre en position et bondir. 

Shaella activa aussitôt le mode combat de son augmentation neuronale. Les derniers restes de drogue qui n’avaient pas été balayés par l’afflux d’adrénaline le furent sous l’effet des courants issus de ses neurones, reliés à ses modifications sur chaque membre. Elle évita avec une vivacité surhumaine les griffes ennemies, se déporta de côté et enchaîna avec un violent coup de pied dirigé sur la carotide de son adversaire. Le Fengir se rejeta en arrière, sonné. L’afflux sanguin n’avait été interrompu que brièvement cependant, et l’ennemi devait bénéficier de ses propres améliorations. 

Un bras nadarien s’enroula autour du cou recouvert de fourrure. Une main se plaqua sur la pommette. Il y eut un craquement quand Jaynak, d’une torsion soudaine, brisa les cervicales du Fengir. Le colossal corps roux retomba au sol. Il y tressauta quelques instants comme s’il essayait de ramper, avant de s’immobiliser définitivement. 

Shaella n’eut pas le temps de remercier ou de féliciter Jaynak. Un premier choc retentit, qui projeta tout le monde au sol. Puis un second, qui souleva humains comme Nadariens. 

« On dirait bien que le croiseur vient d’être abordé », dit-elle. 

Elle se dirigea vers ce qu’elle devinait être la console de commandement principal. Le modèle fut heureusement reconnu par ses bases de données, et elle commença aussitôt à le pirater. Il était temps — l’IS du vaisseau ayant détecté la mort de l’Ektrim qui commandait le croiseur, cherchait à déclencher l’autodestruction. Seuls les dégâts subis l’avaient empêché jusqu’à présent d’entamer la réaction finale. Une partie du vaisseau avait été exposé au vide stellaire, mais les systèmes automatiques avaient procédé avec succès au confinement d’urgence. L’explosion qui avait provoqué cela était selon toute évidence responsable de la défaillance des systèmes gravimétriques, tout comme de la vague d’énergie à laquelle ils devaient la mort de leurs ravisseurs. 

Shaella s’efforça de couper les entrées à l’IS menant au réseau énergétique. Elle téléchargea ensuite un plan du vaisseau, avec l’endroit où Fal était gardé prisonnier. 

Le temps que son équipage et elle se mettent à parcourir les coursives, des combats s’étaient déclenchés. Les drones et droïdes nadariens s’avéraient cependant plus nombreux et en meilleur état que leurs adversaires. Rares étaient quant à eux les Zayborgs et Fengirs à avoir survécu. Quand un commando nadarien intercepta Shaella et ses hommes, elle communiqua au Guide les données concernant Fal. Le Nadarien chercha à la convaincre d’évacuer aussitôt, mais céda devant sa détermination. 

Les droïdes qui se trouvaient dans la même pièce que Fal avaient tous été vaincus au combat. L’androïde n’en était cependant pas responsable puisqu’il portait toujours son verrou de contention. Ils transportèrent Fal en attendant de pouvoir s’attaquer à cette technologie exotique. 

Des dispositifs antigrav les soulevèrent jusqu’à l’un des destroyers qui avaient pris le croiseur en sandwich. Le Réfractaire était le plus endommagé des bâtiments alliés. Il parvint malgré tout à accompagner les deux destroyers, et d’un commun effort, les trois vaisseaux s’arrachèrent une nouvelle fois à la gravitation d’Altanis. 

Derrière eux, une explosion finale engloutit le croiseur ektrim.

Et pour la première fois, le résumé de ce chapitre, commenté par deux voix de l'IA en anglais : absolument BLUFFANT! 

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Retrouvez les cinq premiers chapitres en cliquant sur ce lien.

 

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Published on March 31, 2025 09:21

March 26, 2025

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Published on March 26, 2025 09:47