Parfois, je me prends pour Camus…

Il m’est apparu à l’esprit ce soir, qu’est peut-être revenue à nous l’époque des grandes lettres.


Il y a en effet longtemps que je n’avais ressenti une telle nécessité envers les mots. Il y a longtemps que je n’ai senti quelque chose dans l’air d’aussi intense que terrifiant et la nécessité de lui rendre la pareille sur papier. Chaque semaine, le fruit amer d’une accumulation de grands titres les plus invraisemblables les uns que les autres, me pousse au clavier comme jamais auparavant.


Je suis le fruit d’une génération qui voulait faire les choses autrement pour nous retrouver bien en selle à l’âge adulte, au sein d’un monde qui s’efface sous nos pieds à une vitesse déconcertante. Il est de cette souffrance que je sens de plus en plus partagée par les miens, mes amis, ma famille et collègues…de ce mal de vivre qui ne semble plus savoir se faire oublier.


Il s’agit d’un mode absurde. Un monde ou le simple fait d’aimer est disparu au profit d’une temporalité éphémère toujours des plus identiques, des plus vides de sens et le malaise s’enlise.


C’est ce malaise de la dépersonnification massive de tous et chacun au profit d’une imagine aussi unique qu’unifiée et inatteignable, ou l’individu disparaît au profit d’une abstraction toujours plus remplaçable que jamais et nous en sommes tous les victimes.


C’est cette manie constante vers l’objectification qui nous pourris tous l’intérieur et nous nie cette compassion tant nécessaire à une époque ou « tout » et « rien » valent maintenant  la même chose.


Voilà que nous nous retrouvons malgré nous, aujourd’hui, au sein d’une société qui fait preuve d’une haine resplendissante au cœur même d’une économie florissante. Une haine envers soi-même et une haine envers les autres qui ne laisse augurer rien de bon dans quant à la bienséance des hommes lorsque tout ce fiasco viendra à s’écrouler.


La fatigue est déjà trop grande, le mal, trop profond. Nous sommes guidés par une technocratie effroyable d’une efficacité sans équivoque qui ne laisse aucune place à l’émotion. Que dire de cette légion de jeunes brillants, dévoués, mais tous épuisé et déjà mis à mal par les requêtes incessantes d’industries toujours plus exigeantes pour finalement en arriver à rien.


Rien que du vent, rien que du vide, rien que du mal.


Ce rien qui nous tiraille de l’intérieur et qui ne saurait guérir au sein d’une structure sociale malsaine et pourrissante, ou le suicide refait soudainement surface malgré une médication omniprésente. Car nous en sommes la et le pire reste à venir.


Le risque qui nous guette est le déraillement d’une société épuisée lors d’un catalyseur social encore inconnu d’une force qui nous surprendre tous par la profondeur de sa douleur. Cette douleur tirée d’un retour de balancier qui se fait attendre trop longtemps au moment même ou la nature ne saurait plus retenir sa propre furie envers l’homme.


Je suis aujourd’hui forcé d’admettre que cette synergie destructrice n’est plus, désormais dans le règne de la science fictions mais se trouve depuis peu, dans le domaine du possible. Les épreuves qui nous guettent n’auraient étés que chimères il y a à peine deux ans. Force est de croire qu’ils seront réels bien plus tôt que nous n’aurions voulu l’admettre.


La haine a su s’incruster, se normaliser. Les murs et les camps apparaissent au moment même où nous avons tous oubliés, en tant qu’individu, comment simplement « être » avec nous mêmes et vivre avec autrui.


C’est lorsqu’une société s’efface ce sont les émotions les plus simples prennent le dessus


Ma seule réponse est que face â cette haine, chacun de nous devra retrouver la force de répondre par quelque chose aussi simple que l’amour.


C’est vrai.


À une époque ou l’éthique est dévouée de sens, la vérité est que notre humanité ne saura transparaitre qu’au travers des actes d’amour qui sauront trouver racine au sein de cette noirceur qui nous regarde maintenant droit dans les yeux.


Notre humanité ne saura survivre que dans ces moments ou l’individu seul, et seul face à l’histoire, fera le choix de se refuser à la haine et y substituera la bonté de gestes simple mais plein de sens qui sauront redonner à autrui la pleine dignité qui lui est du.


Peut-être que les générations futures y trouverons, j’ai espoir, les moments qui sauront excuser ce chemin sur lequel nous nous trouvons désormais.


D’ici là, j’espère de tout mon cœur avoir tors sur l’avenir.


Seuls les mois qui viennent nous le dirons.


Ian Truman

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Published on June 28, 2018 13:05
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