“Alors, sur le point de s’en aller, elle fut hésitante et, tout à coup, prit sur elle de me demander si j’étais contente de son petit garçon, s’il se montrait obéissant et poli, car, me dit-elle, elle avait peu de temps à lui consacrer, devant gagner leur vie à tous deux en faisant des ménages çà et là, et souvent elle avait peur que Clair s’en ressente et ne soit aussi gentleman qu’elle le souhaitait.
— Gentilhomme ! Mais on ne peut l’être plus que lui !
— Ah oui ! Vraiment !
Elle parut allégée d’une part de fatigue et d’inquiétude, quoique, dans sa modestie, loin d’être assurée que Clair fût aussi parfait que je le disais. Pourtant elle aurait voulu le croire et murmura :
— Si vous le dites ! Si c’est vous qui le dites !
Il lui restait de toute évidence un poids sur le cœur et soudain, sur le pas de la porte, cherchant le soutien de mon regard, elle me confia hâtivement :
— Parfois j’ai peur de ne pas bien faire. Je suis seule à élever Clair. Son père nous a quittés.
Je lui pris les mains. J’embrassai cette femme qui de sa douleur tirait tant de douceur.”
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Gabrielle Roy,
Children of My Heart